Pompon rouge et bonnet jaune
En 1823, l’École redevient militaire avec la Restauration. Les élèves sont dotés de deux chapeaux, l’un dur, le bicorne, l’autre mou, le bonnet de police.
Qu’est-ce qu’un bonnet de police ? C’est la coiffure de repos (de « salle de police ») car, pour jouer à la belote, le casque n’est pas très pratique. C’est également celle des forçats, des marins, bref, de tous ceux qui ont besoin d’avoir la tête couverte pour se tenir chaud. Le bonnet est « terminé par une touffe de fils », qui a donné d’un côté le pompon des marins, et de l’autre le gland du bonnet de police. Il a perduré dans les armées sous la forme du calot.
Du troupier au bazoff
Ce bonnet de police chanté, par exemple, par Claris dans Notre École polytechnique, était du reste le modèle réglementaire de la troupe du Génie, c’est-à-dire avec passepoil et gland écarlates. En seconde année, L’Argot de l’X nous indique que les élèves l’échangeaient contre un « élégant bonnet de police à gland d’or », coiffure des sous-officiers (les bazoffs).
En 1843, le bonnet de police à pompon est remplacé par un chapeau plus rigide à visière : le képi. Les X conservent leur bonnet, mais n’ont plus le droit de sortir avec.
En 1843, les X conservent leur bonnet, mais n’ont plus le droit de sortir avec
On imagine la double conséquence, sachant que les élèves, à cette époque, payaient leur trousseau : plus besoin de payer le gland « or », remplacé à moindre coût par le jône – aussi appelé jonquille par les textes ; plus besoin de changer de couleur après la première année. C’est ainsi que la rouje et la jône, à l’origine la première et la seconde année, se sont mises à alterner, à un moment qu’on peut situer entre 1843 et 1858.
L’alternance décrétée
En 1874, on remplace le bonnet de police par un képi dit « de petite tenue », dont la grenade est bien entendu alternativement rouje ou jône.
Orange mécanique
La tradition se renouvelle. Dans les années 1950, les maillots de sport des équipes officielles mêlant deux promotions sont de couleur orange. Aujourd’hui, les oranjes sont les camarades qui, ayant eu la chance de faire partie de deux promos successives, sont à la fois jônes et roujes.
Hélas, le ministre se trompe en rédigeant le règlement puisqu’il écrit : « Elle est de couleur jonquille pour les élèves de 1re année, et écarlate pour ceux de 2e année. » On corrige enfin, par le règlement de 1887, qui précise : « Sur le devant du bandeau est placée une grenade (hauteur 25 mm), brodée en laine jonquille pour les élèves d’une division ; en laine écarlate pour les élèves de l’autre division, et ainsi de suite en alternant. »
Chouchou et cagoule
Après plus d’un siècle de stricte alternance dans des domaines aussi variés que les maillots de sport, ou le titre de La Jaune et la Rouge, qui ne l’a finalement emporté qu’au nom de la Commission paritaire sur la presse, le rouje semble s’imposer définitivement sur deux éléments d’uniforme : le chouchou des polytechniciennes, et les cagoules des missaires.