Eugène-Anatole Demarçay (1870) et l’europium
En complément au dossier de novembre 2019 sur la chimie, nous tenons à citer un élément dont le mérite de la découverte en 1901 revient à un polytechnicien. Il s’agit de l’europium, élément numéro 63, qui appartient à la famille des lanthanides.
L’europium
L’europium est un métal, aux applications nombreuses et importantes. Au sein des lanthanides, il se distingue par sa réactivité, largement supérieure à celle de ses congénères ; ainsi que par sa mollesse à l’état solide, comparable à celle du plomb : il se raye facilement à l’ongle et se laisse couper au couteau. Une autre caractéristique, le mettant à part des autres lanthanides, est sa relative rareté sur la planète.
Ses états d’oxydation principaux sont + 2 et surtout + 3. On peut convertir le premier en un second sous pression : l’europium atteint la supraconductivité en dessous de 1,8 K et lorsqu’on le comprime au-delà de 80 GPa.
On lui connaît deux isotopes naturels, d’abondances comparables, et pas moins de 35 isotopes artificiels. Les applications principales actuelles tirent parti de la phosphorescence, dans chacun des deux états d’oxydation. Ainsi, les écrans de télévision recèlent actuellement chacun entre un demi et un gramme d’oxyde d’europium. Les ordinateurs quantiques, auxquels on peut prédire un bel avenir, font appel à des puces à base d’europium.
Pour plus d’informations, voir la notice très complète sur Wikipedia.
Du radium à l’europium
Eugène-Anatole Demarçay (1870) est une figure attachante de la chimie française au tournant du vingtième siècle. Né en 1852, il entra jeune à l’École polytechnique. Il fit partie de son corps enseignant comme préparateur, puis répétiteur. Sa notice nécrologique nota (1904) : « L’esprit droit, la franchise indépendante tempérée de bonne humeur et d’une parfaite éducation [lui attirent] bientôt l’amitié des maîtres de son temps : Cahours, Wurtz, Deville, Dumas, Friedel, Cornu, Schützenberger, Lecoq de Boisbaudran. »
D’abord organicien, il devint spectroscopiste. Collaborateur de Pierre et Marie Curie, il confirma en 1898 leur découverte du radium.
En 1896, il eut l’intuition que des échantillons de l’élément récemment découvert, le samarium, recelaient des traces d’un élément inconnu ; il isolera l’europium en 1901 et proposa son nom.
À présent que l’Europe est aussi une « fédération » internationale d’États, il convient de souligner davantage encore l’existence de cet élément, que Demarçay eut l’autre intuition, prophétique, de nommer, dans sa note aux Comptes Rendus de l’Académie des sciences, en son honneur.