Reflets des jours mauves
Comme l’y invite son titre, Reflets des jours mauves est un roman qui installe le présent et le passé dans un subtil jeu de miroirs. Fragilisé au soir d’une réception en son honneur, le professeur Michel Lazare, un généticien de renom, se retourne sur les événements qui, trente ans plus tôt, ont dévié à jamais le cours de son existence. Un jeune journaliste lui ayant demandé une interview et quelques étrangers ayant manifesté une forme de bienveillance, il cède à la tentation de se délivrer par le partage.
Au long d’une nuit de confidences dans le sous-sol d’un bar ‑parisien, le récit rebondit sans cesse sur lui-même et, à leur insu, rapproche des protagonistes réunis par le hasard. Le secret graduellement révélé, qui joint une formidable histoire d’amour à une effarante découverte médicale, interpelle aussi le lecteur. Maintenu jusqu’à la dernière ligne, le suspense est étayé par des réflexions sur les avancées de la science et les dilemmes moraux qu’elles induisent. Le style fluide et prégnant soutient l’évocation des années 1990 et éclaire la fascination pour le décryptage du génome.
Le voyage auquel le lecteur est convié parcourt aussi bien le temps que l’espace : l’attentat meurtrier de 1994 en Argentine (central dans le précédent roman de Tenenbaum, Les Harmoniques, 2017), le génocide des Tutsis au Rwanda, les arcanes de la Kabbale et les débuts de l’informatique médicale sont autant de thèmes abordés avec délicatesse.
Une lecture captivante, qui laisse aussi des traces.