Hervé Kabla (84) découvreur de start-up
Nos lecteurs sont assurément familiers des chroniques que notre camarade Hervé Kabla consacre chaque mois à un entrepreneur, généralement jeune et souvent startupper (mais pas que). À l’occasion de son 50e portrait d’entrepreneur (p. 18), nous avons pensé qu’il était temps de lui demander de faire son autoportrait.
Je suis X84, sorti ingénieur civil des télécoms. J’ai suivi un DEA en IA, puis huit mois dans une société de services, GFI. Je m’y suis un peu ennuyé, et j’ai rejoint Dassault Systèmes, où je suis resté dix-sept ans, dont dix dans la R & D. En 2000, j’ai pris un congé création d’entreprise pour travailler sur un moteur de recherche d’images avec Robert Azencott. Mais il n’y avait pas de marché à l’époque pour cette technologie, et notre société, EasyGlider, s’est cassé la figure au bout d’un an. Retour chez Dassault Systèmes, avec deux ans à faire des allers-retours avec Israël, où Dassault avait racheté une start-up appelée Smarteam. J’ai vécu ensuite quelques années de placard.
Puis, ça a été l’arrivée du Web 2.0. En 2008, j’ai pris un nouveau congé création, pour participer au lancement d’un logiciel de base de données ultrarapide, mais je ne me suis pas entendu avec le fondateur. En même temps, j’ai fondé une agence de communication pour aider les entreprises à créer leur blog et à gérer leur présence sur les réseaux sociaux. Ce projet-là a plutôt bien réussi. Nous sommes montés à 40 personnes fin 2016, même si depuis 2017 nous décroissons, en lien avec l’ubérisation croissante des métiers de la communication.
Pourquoi cette série de portraits d’X entrepreneurs ?
L’idée est née d’une discussion avec Michel Berry, il y a cinq ans. On constatait alors une baisse du nombre d’adhérents/abonnés à l’AX et à La J & R. On s’est dit que ce serait bien de proposer des contenus qui intéresseraient davantage les jeunes lecteurs. D’où l’idée de s’intéresser aux X, jeunes ou moins jeunes, qui avaient fondé leur boîte. Sur LinkedIn, j’en ai trouvé environ un millier, et ce nombre n’a cessé de croître depuis. Et je me suis lancé. Les articles paraissent à raison d’un par mois dans La Jaune et la Rouge, également repris sur mon blog.
Essai de taxonomie des X entrepreneurs
On trouve en gros trois types de parcours : ceux qui se lancent dès la sortie, sans passer par la case grand groupe, comme Pierre Haren (73) avec ILOG (J & R n° 734) ou Yves Weisselberger (79) avec SnapCar (J & R n° 704) ; ceux qui ont fait un parcours classique pendant dix ou quinze ans et, parvenus à la quarantaine, ont envie de passer à autre chose (j’en suis un exemple !) ; et ceux qui passent par une start-up, souvent à partir de travaux commencés à l’X, par exemple dans le mastère de Bruno Martineau, comme Emeric de Waziers (2012) avec Wingly (J & R n° 713) ou Timothée Rebours (2012) avec Seald (J & R n° 725).
Sur des promos plus jeunes, on trouve un autre profil : ceux qui partent aux États-Unis et y sont confrontés à un univers de créateurs d’entreprises. Ils sont très différents de ceux qui sont restés en France. On a des profils « hypertechnos », comme David Fattal (98) et Pierre-Emmanuel Evreux (98) avec leur technologie d’écrans holographiques pour applications mobiles (J & R n° 716) ; mais aussi des applications centrées sur les usages :
Pierre-Hugues Schmit (98) avec La Compagnie (J & R n° 718) ou Thomas Guillaume (98) et son Famileo (J & R n° 726) ; ou encore industrialiser une techno qui existe déjà : Maurice N’Diaye (2005) avec Synomia (J & R n° 717). Et, bien sûr, de plus en plus d’applications de l’IA !
Il y a des promos qui sont comme des attracteurs : 90, 2003, 2010… sont parmi les plus représentées. Pourquoi ces concentrations, ou au contraire des vides ? Il y a peut-être un lien avec les événements externes, comme la crise de 2008 ou la guerre du Golfe, qui modifient l’attitude des jeunes X vis-à-vis du marché du travail.
Quelles leçons tirer de ces portraits ?
Sur une centaine de personnes contactées, j’ai obtenu 50 interviews. Le plus souvent par courriel, mais je les rencontre aussi parfois. En général, ils aiment bien parler de leur entreprise ! Et puis, ça les aide aussi à formaliser leur discours. Il y a peu de femmes : j’en ai contacté trois, et une seule a répondu, Claire Lapassat (2005) qui a créé L’Atelier universel (J & R n° 739). Sans doute parce qu’il y a une prise de risque supplémentaire, quand on est une femme, à se lancer dans ce genre d’aventure entrepreneuriale.
On sent, chez les jeunes entrepreneurs, qu’il y a une certaine angoisse sur le futur. Ils sont en recherche de repères et de cadres. C’est un rôle que l’AX peut jouer : ils peuvent y rencontrer des anciens avec qui discuter pour les aider à se repérer pour leur propre projet. Avec « 10 questions », on leur raconte des histoires pour leur montrer ce qu’on peut faire dans des genres très différents. Cette série n’est pas près de s’arrêter.
Retrouvez les 50 portraits des X entrepreneurs
Commentaire
Ajouter un commentaire
[…] ce qui me vaut un portrait sympa par l’équipe éditoriale […]