Entre deux…
Nous sommes toujours entre deux… entre deux chaises, entre deux feux, entre deux maux, entre deux amours, entre deux eaux, entre deux mers, entre deux marées (en Iroise), entre deux grains (en Cornouaille), entre deux ponts (au mois de mai), entre deux fêtes (en fin d’année), entre deux vagues de Covid (partout), voire simplement dans un entre-deux, d’autant plus inconfortable que non spécifié.
Janus de l’écrit
Le rédacteur en chef, lui, est toujours entre deux numéros. Janus de l’écrit, il porte à la fois le souci du numéro paru : est-il bon ? aura-t-il la faveur des lecteurs ? le dosage des sujets était-il juste ? avons-nous laissé passer trop d’anglicismes ? etc., et celui du numéro à paraître : a‑t-on bien choisi le thème du dossier ? les articles seront-ils prêts à temps ? le numéro est-il trop copieux ? ou pas assez ? les sujets sont-ils suffisamment variés ? a‑t-on fait trop sérieux ? au contraire trop léger ? quelle image pour la couverture ? finira-t-on par avoir le mot du président ? risque-t-on de fâcher quelqu’un ?
Il ne porte pas seul ce double souci. Il est aussi entre deux : entre le comité éditorial et son président qui lui prodiguent conseils, encouragements, et parfois réprimandes, et l’équipe de rédaction qui lui apporte aide, idées, matière, stimulation, contestation et souvent corrections.
Mais son plus sévère censeur, c’est toi, ô lecteur attentif, qui scrute le numéro avec le soin d’un correcteur à l’écrit de l’X, traquant la moindre inexactitude, la plus légère incohérence, le plus véniel oubli. Surtout si tu es d’une promo un peu ancienne, je veux dire nettement plus ancienne que la mienne, car je suis aussi dans cet entre-deux générationnel inconfortable, encore éloigné des records d’ancienneté de certains de nos camarades (notre doyen ne vient-il pas de fêter ses 105 ans ?) mais certainement tout aussi éloigné des tout jeunes alumni qui nous lisent chaque jour plus nombreux. Comment faire pour que tous trouvent leur bonheur dans nos pages ?
Entre deux visions de l’Europe
Et c’est encore à un entre-deux que nous convie le thème de notre dossier du mois : celui d’une Europe entre la décision britannique (du moins anglaise, car les autres Britanniques ne semblent pas unanimes sur ce point) de quitter l’Union européenne, et le jour fatidique de la réalisation effective de cette sortie. Entre les quelques décennies où Albion, imprudemment admise au concert des nations européennes, a travaillé avec constance à saper le projet européen de l’intérieur, et le temps qui s’ouvre, où elle va pouvoir revenir enfin à sa stratégie pluricentenaire, qui est de le saper de l’extérieur.
Entre-deux, vous disais-je…
“L’entre-deux d’une Europe
entre la décision britannique de quitter l’Union européenne
et le jour fatidique de la réalisation effective de cette sortie.”
Voir le dossier Croire en l’Europe