Pierre Berest

Pierre Berest (X70) : un expert en cavités souterraines mondialement connu

Dossier : TrajectoiresMagazine N°781 Janvier 2023Par Jean-Marc BÉGUIN (X70)Par Jean CHAPELON (X70)

Décé­dé le 28 juillet 2022, Pierre Berest était sans conteste un des meilleurs scien­ti­fiques de sa pro­mo­tion. Ingé­nieur géné­ral des Mines, il a diri­gé de 1990 à 2001 le Labo­ra­toire de méca­nique des solides de l’École poly­tech­nique et ne l’a plus jamais quitté.

Expert en cavi­tés sou­ter­raines, il était appe­lé dans le monde entier pour expli­quer un effon­dre­ment, pré­ci­ser les condi­tions de fer­me­ture d’un puits ou juger de la per­ti­nence d’un sto­ckage sous-ter­rain. Il a signé plus de 200 articles dans de nom­breux domaines concer­nant les ouvrages sou­ter­rains et le sto­ckage sou­ter­rain de gaz, pétrole, déchets radio­ac­tifs. L’un de ses der­niers articles visait à démon­trer qu’un cra­tère ne pou­vait être que rond, par­faite illus­tra­tion de sa curio­si­té et de son goût pour les démons­tra­tions brillantes.


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Pédagogie et humour

Pro­fes­seur asso­cié de méca­nique des milieux conti­nus à l’École poly­tech­nique de 1989 à 2000, pro­fes­seur à l’École des ponts, membre du col­lège de l’École poly­tech­nique, excellent péda­gogue, Pierre Berest maniait avec brio l’humour et la culture. Pré­sident du Groupe per­ma­nent déchets auprès de l’Autorité de sûre­té nucléaire, il a reçu le Grand Prix Gaz de France attri­bué par l’Académie des sciences en 1999. Grand scien­ti­fique donc, mais pas seule­ment. Toute sa vie il a mon­tré un goût et une apti­tude pour l’écriture et plus géné­ra­le­ment la lit­té­ra­ture. Il tenait cela de son père pro­fes­seur agré­gé de lettres et maire de Brest de 1973 à 1977. Même dans les articles tech­niques, il pre­nait un soin par­ti­cu­lier pour choi­sir une expres­sion et ne man­quait pas de par­se­mer ses expo­sés de cita­tions lit­té­raires appropriées.

Cette incli­na­tion a trou­vé son pro­lon­ge­ment dans sa famille avec sa femme Lélia Pica­bia, pro­fes­seur de lin­guis­tique, et deux de ses filles, Anne et Claire Berest roman­cières à suc­cès (Gabriële, La Carte pos­tale, Rien n’est noir, etc.).

Son père était bre­ton nous l’avons dit et si lui, pro­fon­dé­ment bre­ton, n’a jamais cher­ché à s’installer en Bre­tagne où il avait fait sa sco­la­ri­té au lycée de Brest jusqu’en math sup, il ne man­quait jamais de venir se res­sour­cer dans sa mai­son de vacances du Dos­sen, où il pou­vait res­ter très long­temps à médi­ter face à la mer.

À l’École poly­tech­nique il pra­ti­quait avec talent le vol­ley et sa détente lui avait valu le sur­nom de « cui­cui », tant il don­nait l’impression de voler. 

Déjà à Louis-le-Grand

Le plus vieux sou­ve­nir que nous ayons de Pierre remonte au der­nier tri­mestre de 1968, alors que nous venions d’intégrer la classe de mathé­ma­tiques spé­ciales de Louis-le-Grand. Des bataillons de CRS, rap­pe­lant les évé­ne­ments du mois de Mai, entou­raient le lycée dont le fonc­tion­ne­ment rele­vait, lui, de mœurs archaïques. Le pro­fes­seur Ramis, pres­ti­gieux auteur du manuel de mathé­ma­tiques de toutes les classes pré­pa­ra­toires de l’époque, ne tolé­rait pas la moindre contes­ta­tion. Il com­men­çait son cours, dans un silence abso­lu, et don­nait de nom­breux exer­cices pen­dant le cours : le pre­mier qui trou­vait la solu­tion pas­sait au tableau pour la pré­sen­ter, stop­pant ain­si la réflexion de ses cama­rades. Tous les 32 étions téta­ni­sés : mal­heur à celui dont la démons­tra­tion se révé­lait foi­reuse ! Il devait retour­ner piteu­se­ment à sa place sous les quo­li­bets de « fouet­tez bizuth ». Dans ce contexte, Pierre a réus­si le tour de force d’être le pre­mier 32 à oser lever la main au pre­mier tri­mestre pour pro­po­ser une solu­tion juste, qui était signe pré­mo­ni­toire de ses réus­sites futures et qui lui valut l’admiration de tous.

Pierre Berest était en plus un tra­vailleur achar­né. Il ne s’est pas arrê­té à l’âge de la retraite et conti­nuait d’aller au labo, jusqu’à sa mala­die ; une semaine avant sa mort, il était encore en train de rédi­ger l’expertise d’une cavi­té aux Pays-Bas !

Pierre, ton intel­li­gence, ton humour, ta modes­tie, ta culture et en un mot ton ami­tié vont nous man­quer cruellement.

Commentaire

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alain.ternot.1968répondre
19 janvier 2023 à 16 h 28 min

Mer­ci pour cet hom­mage à Pierre Berest que j’ai connu à l’oc­ca­sion de son stage d’in­gé­nieur-élève à Gaz de France. Je me sou­viens de sa sur­prise et son inté­rêt lorsque je lui ai mon­tré des résul­tats de mesures hydrau­liques pié­zo­élec­triques de pré­ci­sion dans les karsts pro­fonds d’un forage de Mont­mi­rail. Il avait été enthou­sias­mé quand je lui ai pré­sen­té les marées ter­restres qui appa­rais­saient sur les logs, et je sais que depuis, son inté­rêt pour les réponses en fré­quences des cavi­tés sou­ter­raines l’ont accom­pa­gné toute sa vie. Que son œuvre nous éclaire…

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