La digue de sable
François Mayer (X45)
Rédacteur : Pierre Séguin (X73)Editeur : Librairie du Roule, 2023François Mayer a fait une belle carrière dans l’industrie, mais il avait tâté de l’écriture et du jazz à l’École et, une fois en retraite en 1993, il s’y remit avec délectation ; pour la musique, c’est l’aventure des Dixieland Seniors, à l’origine tous de la promo 45, toujours actifs avec un certain renouvellement ; pour l’écriture, ce fut d’abord La digue de sable. Le portrait que Pierre Lazslo lui a consacré dans notre numéro 780 de décembre dernier était dithyrambique à cet égard : j’ai voulu vérifier… et je n’ai pas été déçu. Je n’ai pas été autant enthousiasmé, charmé et ému par un roman depuis des années.
En un peu plus de 500 belles pages, l’auteur décrit dans une fiction familiale à peine transposée de son expérience personnelle la période 1929–1941 en France, au sein d’un milieu aisé, cultivé et influent, marquée par une double origine juive et protestante de la famille. La grande histoire et l’intime s’y rejoignent dans un mélange concocté avec un art incroyable de puissance et de délicatesse en même temps (et sans chichis dans les affaires du sexe). Il y a là-dedans beaucoup d’intelligence, beaucoup de science, beaucoup de savoir-faire, mais encore plus ce qu’on appelle la grâce, don qui est paraît-il gratuit mais qui n’est pas attribué à tous les auteurs.
Ce roman a déjà été recensé dans nos colonnes en novembre 2003, à sa sortie (n° 589) ; contrairement au recenseur de l’époque, je n’appartiens pas au même milieu ni à la même période que l’auteur ; pourtant son récit m’a parlé comme à lui, j’ai retrouvé dans ses allusions les mêmes références que les miennes, je me suis retrouvé dans le personnage de Joël – c’est la force des grands textes que d’être compris par-delà le temps. À ce titre il méritait d’être remis sur le devant de la scène. À noter qu’on peut trouver sur la version internet de la revue un article de la rubrique AtypiX datant de quelques années, qui donne des précisions sur la vraie vie de François Mayer.