INNOVATION ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE autour des chantiers souterrains
L’expertise d’Eiffage Génie Civil dans les travaux souterrains est majeure et s’est encore renforcée au cours des dix dernières années grâce aux chantiers du Grand Paris Express. Présente sur tous les fronts en France et en Europe, l’entreprise multiplie les innovations en matière environnementale et contribue au développement économique des territoires sur lesquels elle intervient. Le point avec son président, Guillaume Sauvé.
Dans le monde des travaux souterrains et des tunnels, quels sont votre positionnement et vos principales expertises ?
Eiffage Génie détient une expertise très ancienne en matière de travaux souterrains en France avec un linéaire de plus de 250 km creusés ces 40 dernières années. Ses équipes ont participé à tous les grands projets dans ce domaine, qu’il s’agisse de tunnels ferroviaires, routiers et autoroutiers, industriels, collecteurs d’assainissement ou installations hydrauliques (avec galeries, puits, cheminées, caverne…).
Elles sont rompues à toutes les techniques,qu’elles soient traditionnelles à l’explosif ou à l’aide de machines à attaque ponctuelle, ou encore au tunnelier. Au-delà, elles maîtrisent parfaitement les aspects géotechniques et géologiques que réclame cette spécialité.
Enfin, elles ont aussi développé des compétences spécifiques en matière de caractérisation et d’évacuation des déblais, dont la gestion est un élément crucial aujourd’hui.
Le Grand Paris reste en France et dans le monde le plus important projet d’infrastructure.
Dans ce cadre, à quels niveaux êtes-vous intervenus ? Quelles sont les opérations qui vous ont mobilisées et vous mobilisent encore ?
Eiffage Génie Civil, et au-delà, l’ensemble des métiers du groupe Eiffage sont impliqués dans les travaux du Grand Paris. Chez Eiffage Génie Civil, nous avons remporté, dès 2014, le premier marché de ce programme pour la RATP, avec le lot 1 du prolongement de la ligne 14, au nord, incluant un tunnel et deux gares, entre Saint-Lazare et la porte de Clichy. S’en sont suivis :
- les marchés du lot T2B de la ligne 15 avec plus de 7 km de tunnel et 3 gares, dont la plus profonde de France à Saint-Maur ;
- le lot 1 de la ligne 16 qui est le plus important du Grand Paris Express, avec près de 20 km de tunnel incluant la pose de voies et cinq gares, ainsi que deux contrats signés avec la Société du Grand Paris ;
- le lot 3 du prolon-gement de la ligne 14 au sud (3,5 km de tunnel et 3 gares) pour la RATP ;
- plusieurs opérations pour Éole ;
- la ligne E du RER, tant en ouvrage, avec le pont de Bezons, qu’en souterrain, avec le creusement d’un tunnel entre Haussmann et Nanterre la Folie ;
- la gare de Porte-Maillot, qu’en rail, enfin, puisque nous avons posé des voies en tunnel, mais également sur le tronçon aérien de la ligne jusqu’à Mantes-la-Jolie.
Toutes ces opérations ont représenté un volume de travaux concomitants inédit, mobilisant des milliers de collaborateurs et le creusement simultané de 10 tunneliers dans les sous-sols franciliens. Aujourd’hui, les creusements sont terminés et nos équipes s’affairent au génie civil des gares. En parallèle, les équipes d’Eiffage Énergie Systèmes travaillent sur les infrastructures électriques et celles d’Eiffage Construction sur les superstructures des gares. Le domaine des grands travaux d’infrastructures a beaucoup évolué au cours des dernières décennies et implique de nouveaux enjeux tech- niques, technologiques et humains.
Comment un acteur comme Eiffage appréhende-t-il ces dimensions ?
Le Grand Paris constitue pour nos métiers un formidable accélérateur de développe- ment et d’innovations, doublé de forts enjeux en termes de responsabilité sociétale.
Au fil des chantiers réalisés pour le Grand Paris ces dix dernières années, nous avons formé des centaines de personnes et permis l’insertion de dizaines de jeunes et moins jeunes éloignés de l’emploi.
Nous avons également développé nombre d’innovations. Je citerais, une première en France : l’utilisation de béton fibré pour les voussoirs d’une grande partie du tunnel de la ligne 16. Ce matériau est deux fois moins consommateur en ressources que le béton armé. Il permet de réduire les émissions de CO2 dans les cimenteries et les aciéries. 10 000 tonnes équivalents CO2 sont ainsi économisées en moyenne pour 10 km de tunnel. Autre innovation d’importance que nous pouvons citer : un procédé de caractérisation rapide des déblais breveté par nos équipes. Baptisé Carasol®, il permet une analyse des déblais en moins d’une heure, là où il fallait auparavant jusqu’à trois à cinq jours !
Accréditée Cofrac Essais, cette solution réduit les surfaces de stockage sur les chantiers, et évite, le cas échéant, le transfert des matériaux vers un lieu de dépôt intermédiaire ce qui limite également le nombre de camions sur les routes ! Dans cette même optique, nous avons également évacué, dès que c’était possible, les déblais par voies fluviales ou ferroviaires et acquis une flotte de véhicules propres, au gaz ou électriques, là encore pour limiter nos émissions.
Sur ce segment, quels sont les projets qui vous mobilisent actuellement en France et dans le monde ?
Aujourd’hui, nous réalisons l’ouvrage trans- frontalier le plus important de la liaison ferroviaire Lyon-Turin, qui nous a été attribué en juillet 2021. Eiffage Génie Civil est man- dataire d’un groupement chargé du creusement d’un tunnel bitube de 22 kilomètres, dont 2 x 18 kilomètres vers Turin, qui nécessite l’utilisation de 2 tunneliers, et 2 x 4 kilomètres vers Lyon, qui seront réalisés en méthode traditionnelle.
Nous nous positionnons également sur la troisième ligne du métro de Toulouse. Nous sommes adjudicataires des lots 1 et 2, soit au total près de 13 kilomètres de tunnel, neuf stations, neuf ouvrages annexes ainsi qu’une tranchée couverte. Enfin, sur le plan international, nous sommes présents sur le projet de l’autoroute E18 en Norvège. Nous y réalisons, notamment, 10 kilomètres de tracé autoroutier 2 x 2 voies en grande partie souterrain, incluant le creusement de deux tunnels bitubes sur 7,6 kilo- mètres : le tunnel de Bjønnås (2,5 kilomètres) et le tunnel de Grenland (5,1 kilomètres).
Aujourd’hui, comment vous projetez-vous ? Quelles sont vos perspectives ?
Notre volume d’activité est conséquent et les perspectives sont bonnes compte tenu des nouveaux projets d’infrastructures pré- vus d’ici la fin de la décennie. En Île-de-France, le Grand Paris reste notre cœur de cible. Nous avons déjà obtenu, fin 2022, le marché de gestion des déblais de la future ligne 15 Est, qui marque le lancement de la seconde phase du programme. Nos équipes d’études sont pleinement mobilisées sur les nouveaux appels d’offres lancés par la Société du Grand Paris, notamment pour les lignes 15 Est et 15 Ouest. Ces marchés seront, d’ailleurs, attribués selon un nouveau mode de dévolution : en conception-construction.
En France, nous démarrons, en parallèle, le chantier de l’interconnexion de Saint-Jean-de- Maurienne entre le futur tunnel de base du Mont-Cenis de la ligne ferroviaire Lyon-Turin et le réseau ferroviaire existant. Un chantier phasé qui s’achèvera au printemps 2032.
Nous sommes également mandataires du groupement en charge du marché global de performance portant sur la reconstruction du Technicentre de maintenance de la SNCF à Villeneuve Prairie (94).
Le projet comprend la conception, la construction et la maintenance du site, pendant six ans (avec une tranche optionnelle de 3 x 3 ans), à conduire sans aucune interruption d’exploitation. À l’étranger, enfin, nous intervenons sur 80 km de la future ligne à grande vitesse High Speed 2 qui reliera Londres à Birmingham au Royaume-Uni. En Côte d’Ivoire, nous travaillons sur un projet d’aménagement hydroélectrique. En parallèle, nous sommes mobilisés sur des projets d’installations portuaires en Afrique et en Colombie ainsi que sur le prolongement du TER de Dakar au Sénégal.