FOCUS SUR LE POCES, le Pôle de Compétences en Environnement Souterrain

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°785 Mai 2023
Par Sandrine MONGUILLON
Par Stéphane BERTHEAUX VIRGILI

Le PoCES fête en 2023 son 5e anni­ver­saire. Por­té par l’Université de Lor­raine au tra­vers de Mines Nan­cy et de l’École Natio­nale Supé­rieure de Géo­lo­gie de Nan­cy, et finan­cé par le GIP Objec­tif Meuse, le PoCES orga­nise chaque année des for­ma­tions conti­nues et des jour­nées tech­niques liées aux tra­vaux sou­ter­rains. Dans ce cadre, il béné­fi­cie d’un par­te­na­riat pri­vi­lé­gié avec l’ANDRA et l’AFTES. San­drine Mon­guillon, Direc­trice de la For­ma­tion Spé­cia­li­sée et Conti­nue de l’École des Mines de Nan­cy, et Sté­phane Ber­theaux Vir­gi­li, Chef de pro­jet au PoCES, nous en disent plus.

Pouvez-vous nous présenter le Pôle de Compétences en Environnement Souterrain et son périmètre d’action ?

Le PoCES pro­pose aux entre­prises qui inter­viennent dans le milieu sou­ter­rain des for­ma­tions adap­tées et sur-mesure dans dif­fé­rents domaines.

Au départ, à la créa­tion du PoCES, en novembre 2017, notre péri­mètre d’action cou­vrait essen­tiel­le­ment les grands tra­vaux sou­ter­rains de creu­se­ment de tun­nels fer­ro­viaires ou rou­tiers. Depuis un peu plus d’un an, nous avons fait le choix d’élargir notre péri­mètre et pro­po­sons doré­na­vant des for­ma­tions dans les domaines de la construc­tion d’ouvrages d’art sou­ter­rain (génie civil, creu­se­ment, construc­tion de tun­nels), de l’exploitation des car­rières sou­ter­raines, l’exploration et l’exploitation minière et l’extraction des maté­riaux de construction.

Pouvez-vous nous dire à qui s’adresse votre offre de formation ?

Dans notre cata­logue de for­ma­tion, on retrouve 6 grands modules. Ils s’adressent à un large public de tech­ni­ciens et cadres qui évo­lue dans des entre­prises de tra­vaux, des bureaux d’études, des exploi­tants, maî­trises d’ouvrage, maî­trises d’œuvre, etc

Par­mi les thèmes des modules pro­po­sés, il y a :

  • le module « Aus­cul­ta­tion des tun­nels et ouvrages sou­ter­rains » qui consiste à ins­tal­ler des ins­tru­ments de mesure et des cap­teurs sur les ouvrages pour suivre leur évo­lu­tion et mettre en place les actions de sui­vi nécessaires ;
  • le module « Aérage des tun­nels et des gale­ries en milieux sou­ter­rains » afin de for­mer les per­son­nels qui tra­vaillent sur la ven­ti­la­tion inté­rieure des gale­ries. C’est un sujet qui inté­resse plus par­ti­cu­liè­re­ment les maîtres d’ouvrage, les exploi­tants, les bureaux d’études et les entre­prises de tra­vaux qui ont besoin de com­prendre com­ment ven­ti­ler l’intérieur d’une gale­rie, quels sont les maté­riels à mettre en œuvre, com­ment conce­voir les réseaux de ventilation… ;
  • deux modules sur la sécu­ri­té et les risques en milieu sou­ter­rain afin de mieux cer­ner, anti­ci­per et gérer ces risques, éla­bo­rer et mettre en place d’un cahier des charges, des mesures et des procédures…
  • le module « Conduite de tra­vaux en milieux sou­ter­rains » des­ti­né à des conduc­teurs de tra­vaux, chefs de chan­tier ou d’équipes qui sou­haitent être confor­tés dans leurs pra­tiques et qui peuvent avoir besoin d’une mise à jour sur les récentes évo­lu­tions régle­men­taires, mais aus­si à de jeunes cadres ou enca­drants qui viennent du monde du génie civil et qui ont besoin d’approfondir leurs connaissances ;
  • un module spé­ci­fique à des­ti­na­tion des élus et des res­pon­sables locaux : « Sen­si­bi­li­sa­tion aux risques orga­ni­sa­tion­nels en tun­nels et gale­ries souterraines ».
« L’idée est de leur apporter une visibilité sur les problématiques qui peuvent survenir en environnement souterrain afin de leur donner les clés en matière de prévention et de gestion de crise. »

L’idée est de leur appor­ter une visi­bi­li­té sur les pro­blé­ma­tiques qui peuvent sur­ve­nir en envi­ron­ne­ment sou­ter­rain afin de leur don­ner les clés en matière de pré­ven­tion et de ges­tion de crise.
Concrè­te­ment, les for­ma­tions pro­po­sées vont per­mettre de cou­vrir toutes les phases d’un chan­tier y com­pris la dimen­sion ven­ti­la­tion, les risques pro­fes­sion­nels asso­ciés aux tra­vaux sou­ter­rains, ou encore la régle­men­ta­tion en matière de contractualisation.

Par ailleurs, nous pro­fi­tons de la proxi­mi­té des ins­tal­la­tions du labo­ra­toire sou­ter­rain de l’ANDRA à Bure pour y effec­tuer les tra­vaux pra­tiques avec nos sta­giaires. Nous pro­po­sons ain­si une « for­ma­tion action » qui va com­bi­ner des cours fon­da­men­taux et une mise en pra­tique. Par exemple, si le cours a lieu dans la mati­née, les tra­vaux pra­tiques sont géné­ra­le­ment pré­vus dans l’après-midi dans les gale­ries de l’ANDRA.

Pour accompagner les professionnels des travaux souterrains, vous proposez notamment l’application Virtual PoCES. De quoi s’agit-il et que permet-elle d’accomplir ?

C’est une appli­ca­tion de réa­li­té vir­tuelle qui a été déve­lop­pée en par­tant du constat simple : on ne peut pas expo­ser nos sta­giaires aux risques qui peuvent sur­ve­nir à l’intérieur d’un tun­nel. À par­tir de là, nous avons tra­vaillé sur la maté­ria­li­sa­tion vir­tuelle d’une gale­rie sou­ter­raine en phase d’exploitation et d’une autre gale­rie en phase de creu­se­ment afin de cou­vrir un large éven­tail de cas d’usages et de scénarios.

Dans le tun­nel en acti­vi­té, nous allons simu­ler, par exemple un incen­die, pour aider les sta­giaires à déve­lop­per les bons réflexes et pra­tiques dans un envi­ron­ne­ment confi­né, où il n’est pas évident d’avoir une réac­tion naturelle.
Dans la gale­rie en tra­vaux, nous orga­ni­sons une sorte de « chasse aux risques » en milieu sou­ter­rain pour sen­si­bi­li­ser les sta­giaires aux bonnes pra­tiques : savoir s’équiper, res­pec­ter les pro­cé­dures d’identification, le port du casque, du masque, de chaus­sures, de cha­suble… Une fois leur équi­pe­ment vali­dé, la per­sonne va avoir accès à la gale­rie et, à par­tir de là, elle va jouer le rôle de « pré­ven­teur » en quelque sorte, afin de faire consta­ter aux membres de son équipe les éven­tuels équi­pe­ments obli­ga­toires manquants.

En leur don­nant la pos­si­bi­li­té de vivre ces situa­tions de la vie pro­fes­sion­nelle en réa­li­té vir­tuelle, les sta­giaires vont pou­voir déve­lop­per les pos­tures les plus per­ti­nentes pour cir­cu­ler en toute sécu­ri­té dans un tun­nel. L’outil va éga­le­ment leur per­mettre d’apprendre à iden­ti­fier d’autres types de risques en lien avec la ven­ti­la­tion, les sys­tèmes élec­triques, l’absence de maté­riel obli­ga­toire comme les extinc­teurs… En se dépla­çant, tou­jours grâce à la réa­li­té vir­tuelle, dans la gale­rie vers les zones de co-acti­vi­té, nous allons tra­vailler sur d’autres risques et réflexes dans un contexte où des engins sont en dépla­ce­ment, où les explo­sifs sont pré­pa­rés pour un creu­se­ment, où il faut éva­luer la situa­tion d’effondrement suite à une explosion…

« La réalité virtuelle permet de faire de l’immersive learning, une méthode pédagogique qui vient compléter les cours théoriques et pratiques. »

La réa­li­té vir­tuelle per­met de faire de l’immersive lear­ning, une méthode péda­go­gique qui vient com­plé­ter les cours théo­riques et pra­tiques. Son objec­tif est de per­mettre à une per­sonne grâce au casque de réa­li­té vir­tuelle de vivre l’évènement « comme si elle y était ». C’est aus­si un outil col­la­bo­ra­tif qui faci­lite les échanges. Ain­si, l’ensemble d’un groupe de sta­giaires, par l’intermédiaire de l’écran, peut voir ce que la per­sonne fait à l’intérieur de la réa­li­té vir­tuelle, par­ti­ci­per à la réso­lu­tion du pro­blème et interagir.
Au-delà, cet outil vir­tuel peut éga­le­ment évo­luer afin de deve­nir un outil d’évaluation du sta­giaire sur les com­pé­tences qui sont visées par le module de formation.

Enfin, nous sou­hai­tons aus­si le posi­tion­ner comme un outil de pré-recru­te­ment. Pour le pro­jet de tun­nel Lyon-Turin qui est actuel­le­ment en cours, pour le creu­se­ment, il y a un besoin gigan­tesque en main d’œuvre éva­luée à plu­sieurs mil­liers de per­sonnes. Les agences d’intérim qui sont sur le ter­rain doivent sélec­tion­ner des can­di­dats, des inté­ri­maires et des per­sonnes en CDD, pour les entre­prises de tra­vaux. Pour les aider à sélec­tion­ner les can­di­dats et notam­ment véri­fier qu’ils ne sont pas claus­tro­phobes et qu’ils peuvent évo­luer en milieu confi­né, nous avons pris contact avec de nom­breuses agences d’emploi pour mettre à leur dis­po­si­tion notre outil pour leur faire vivre en réa­li­té vir­tuelle les situa­tions aux­quelles ils pour­ront être confron­tés dans le cadre des tra­vaux de creu­se­ment. L’idée est aus­si démys­ti­fier les tra­vaux sou­ter­rains et de lever ain­si les idées reçues et les appré­hen­sions éven­tuelles sur cet univers.

La 5e édition de vos Journées Techniques est prévue du 6 au 8 juin prochain. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Avec cet évé­ne­ment, chaque année, notre objec­tif est de ras­sem­bler la com­mu­nau­té du monde sou­ter­rain sur un sujet tech­nique. Nous sommes heu­reux de voir que, chaque année, les pro­fes­sion­nels sont de plus en plus nom­breux à y par­ti­ci­per. Cette année nous avons choi­si de ques­tion­ner le thème des risques « Milieux sou­ter­rains et risques : du fond à la sur­face, pré­dic­tion et prévention ».

Les dif­fé­rentes inter­ven­tions scien­ti­fiques et tech­niques, les retours d’expériences visent à amé­lio­rer la com­pré­hen­sion des risques (finan­ciers, contrac­tuels, envi­ron­ne­men­taux, tech­niques, maté­riels, humains, etc.) en milieux sou­ter­rains et à déga­ger les contours d’une approche par­ta­gée. Cette année, le PoCES innove en orga­ni­sant éga­le­ment un serious game afin de faire émer­ger une réflexion indi­vi­duelle puis col­lec­tive sur les ques­tions d’acceptabilité des pro­jets et tra­vaux souterrains.

Pre­nez le rôle de dif­fé­rents acteurs du ter­ri­toire, du monde asso­cia­tif, d’un ser­vice de l’état, d’un maître d’ouvrage, d’un maître d’œuvre ou d’un construc­teur pour repro­duire une situa­tion pro­pice à l’émergence de contro­verses. Un serious game ori­gi­nal pro­po­sé et orga­ni­sé par Marie BALEO de chez Mani­feste (https://www.manifeste-agence.com/apropos) et l’équipe PoCES.

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