FOCUS SUR LE POCES, le Pôle de Compétences en Environnement Souterrain
Le PoCES fête en 2023 son 5e anniversaire. Porté par l’Université de Lorraine au travers de Mines Nancy et de l’École Nationale Supérieure de Géologie de Nancy, et financé par le GIP Objectif Meuse, le PoCES organise chaque année des formations continues et des journées techniques liées aux travaux souterrains. Dans ce cadre, il bénéficie d’un partenariat privilégié avec l’ANDRA et l’AFTES. Sandrine Monguillon, Directrice de la Formation Spécialisée et Continue de l’École des Mines de Nancy, et Stéphane Bertheaux Virgili, Chef de projet au PoCES, nous en disent plus.
Pouvez-vous nous présenter le Pôle de Compétences en Environnement Souterrain et son périmètre d’action ?
Le PoCES propose aux entreprises qui interviennent dans le milieu souterrain des formations adaptées et sur-mesure dans différents domaines.
Au départ, à la création du PoCES, en novembre 2017, notre périmètre d’action couvrait essentiellement les grands travaux souterrains de creusement de tunnels ferroviaires ou routiers. Depuis un peu plus d’un an, nous avons fait le choix d’élargir notre périmètre et proposons dorénavant des formations dans les domaines de la construction d’ouvrages d’art souterrain (génie civil, creusement, construction de tunnels), de l’exploitation des carrières souterraines, l’exploration et l’exploitation minière et l’extraction des matériaux de construction.
Pouvez-vous nous dire à qui s’adresse votre offre de formation ?
Dans notre catalogue de formation, on retrouve 6 grands modules. Ils s’adressent à un large public de techniciens et cadres qui évolue dans des entreprises de travaux, des bureaux d’études, des exploitants, maîtrises d’ouvrage, maîtrises d’œuvre, etc
Parmi les thèmes des modules proposés, il y a :
- le module « Auscultation des tunnels et ouvrages souterrains » qui consiste à installer des instruments de mesure et des capteurs sur les ouvrages pour suivre leur évolution et mettre en place les actions de suivi nécessaires ;
- le module « Aérage des tunnels et des galeries en milieux souterrains » afin de former les personnels qui travaillent sur la ventilation intérieure des galeries. C’est un sujet qui intéresse plus particulièrement les maîtres d’ouvrage, les exploitants, les bureaux d’études et les entreprises de travaux qui ont besoin de comprendre comment ventiler l’intérieur d’une galerie, quels sont les matériels à mettre en œuvre, comment concevoir les réseaux de ventilation… ;
- deux modules sur la sécurité et les risques en milieu souterrain afin de mieux cerner, anticiper et gérer ces risques, élaborer et mettre en place d’un cahier des charges, des mesures et des procédures…
- le module « Conduite de travaux en milieux souterrains » destiné à des conducteurs de travaux, chefs de chantier ou d’équipes qui souhaitent être confortés dans leurs pratiques et qui peuvent avoir besoin d’une mise à jour sur les récentes évolutions réglementaires, mais aussi à de jeunes cadres ou encadrants qui viennent du monde du génie civil et qui ont besoin d’approfondir leurs connaissances ;
- un module spécifique à destination des élus et des responsables locaux : « Sensibilisation aux risques organisationnels en tunnels et galeries souterraines ».
« L’idée est de leur apporter une visibilité sur les problématiques qui peuvent survenir en environnement souterrain afin de leur donner les clés en matière de prévention et de gestion de crise. »
L’idée est de leur apporter une visibilité sur les problématiques qui peuvent survenir en environnement souterrain afin de leur donner les clés en matière de prévention et de gestion de crise.
Concrètement, les formations proposées vont permettre de couvrir toutes les phases d’un chantier y compris la dimension ventilation, les risques professionnels associés aux travaux souterrains, ou encore la réglementation en matière de contractualisation.
Par ailleurs, nous profitons de la proximité des installations du laboratoire souterrain de l’ANDRA à Bure pour y effectuer les travaux pratiques avec nos stagiaires. Nous proposons ainsi une « formation action » qui va combiner des cours fondamentaux et une mise en pratique. Par exemple, si le cours a lieu dans la matinée, les travaux pratiques sont généralement prévus dans l’après-midi dans les galeries de l’ANDRA.
Pour accompagner les professionnels des travaux souterrains, vous proposez notamment l’application Virtual PoCES. De quoi s’agit-il et que permet-elle d’accomplir ?
C’est une application de réalité virtuelle qui a été développée en partant du constat simple : on ne peut pas exposer nos stagiaires aux risques qui peuvent survenir à l’intérieur d’un tunnel. À partir de là, nous avons travaillé sur la matérialisation virtuelle d’une galerie souterraine en phase d’exploitation et d’une autre galerie en phase de creusement afin de couvrir un large éventail de cas d’usages et de scénarios.
Dans le tunnel en activité, nous allons simuler, par exemple un incendie, pour aider les stagiaires à développer les bons réflexes et pratiques dans un environnement confiné, où il n’est pas évident d’avoir une réaction naturelle.
Dans la galerie en travaux, nous organisons une sorte de « chasse aux risques » en milieu souterrain pour sensibiliser les stagiaires aux bonnes pratiques : savoir s’équiper, respecter les procédures d’identification, le port du casque, du masque, de chaussures, de chasuble… Une fois leur équipement validé, la personne va avoir accès à la galerie et, à partir de là, elle va jouer le rôle de « préventeur » en quelque sorte, afin de faire constater aux membres de son équipe les éventuels équipements obligatoires manquants.
En leur donnant la possibilité de vivre ces situations de la vie professionnelle en réalité virtuelle, les stagiaires vont pouvoir développer les postures les plus pertinentes pour circuler en toute sécurité dans un tunnel. L’outil va également leur permettre d’apprendre à identifier d’autres types de risques en lien avec la ventilation, les systèmes électriques, l’absence de matériel obligatoire comme les extincteurs… En se déplaçant, toujours grâce à la réalité virtuelle, dans la galerie vers les zones de co-activité, nous allons travailler sur d’autres risques et réflexes dans un contexte où des engins sont en déplacement, où les explosifs sont préparés pour un creusement, où il faut évaluer la situation d’effondrement suite à une explosion…
« La réalité virtuelle permet de faire de l’immersive learning, une méthode pédagogique qui vient compléter les cours théoriques et pratiques. »
La réalité virtuelle permet de faire de l’immersive learning, une méthode pédagogique qui vient compléter les cours théoriques et pratiques. Son objectif est de permettre à une personne grâce au casque de réalité virtuelle de vivre l’évènement « comme si elle y était ». C’est aussi un outil collaboratif qui facilite les échanges. Ainsi, l’ensemble d’un groupe de stagiaires, par l’intermédiaire de l’écran, peut voir ce que la personne fait à l’intérieur de la réalité virtuelle, participer à la résolution du problème et interagir.
Au-delà, cet outil virtuel peut également évoluer afin de devenir un outil d’évaluation du stagiaire sur les compétences qui sont visées par le module de formation.
Enfin, nous souhaitons aussi le positionner comme un outil de pré-recrutement. Pour le projet de tunnel Lyon-Turin qui est actuellement en cours, pour le creusement, il y a un besoin gigantesque en main d’œuvre évaluée à plusieurs milliers de personnes. Les agences d’intérim qui sont sur le terrain doivent sélectionner des candidats, des intérimaires et des personnes en CDD, pour les entreprises de travaux. Pour les aider à sélectionner les candidats et notamment vérifier qu’ils ne sont pas claustrophobes et qu’ils peuvent évoluer en milieu confiné, nous avons pris contact avec de nombreuses agences d’emploi pour mettre à leur disposition notre outil pour leur faire vivre en réalité virtuelle les situations auxquelles ils pourront être confrontés dans le cadre des travaux de creusement. L’idée est aussi démystifier les travaux souterrains et de lever ainsi les idées reçues et les appréhensions éventuelles sur cet univers.
La 5e édition de vos Journées Techniques est prévue du 6 au 8 juin prochain. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Avec cet événement, chaque année, notre objectif est de rassembler la communauté du monde souterrain sur un sujet technique. Nous sommes heureux de voir que, chaque année, les professionnels sont de plus en plus nombreux à y participer. Cette année nous avons choisi de questionner le thème des risques « Milieux souterrains et risques : du fond à la surface, prédiction et prévention ».
Les différentes interventions scientifiques et techniques, les retours d’expériences visent à améliorer la compréhension des risques (financiers, contractuels, environnementaux, techniques, matériels, humains, etc.) en milieux souterrains et à dégager les contours d’une approche partagée. Cette année, le PoCES innove en organisant également un serious game afin de faire émerger une réflexion individuelle puis collective sur les questions d’acceptabilité des projets et travaux souterrains.
Prenez le rôle de différents acteurs du territoire, du monde associatif, d’un service de l’état, d’un maître d’ouvrage, d’un maître d’œuvre ou d’un constructeur pour reproduire une situation propice à l’émergence de controverses. Un serious game original proposé et organisé par Marie BALEO de chez Manifeste (https://www.manifeste-agence.com/apropos) et l’équipe PoCES.