L’enfant@l’hôpital et Polytechnique : une merveilleuse aventure humaine
Chaque année, depuis déjà vingt-cinq ans, des élèves polytechniciens réalisent leur stage de formation humaine civile à L’enfant@l’hôpital. Ils étaient deux en 1998, ils sont au nombre de cinq aujourd’hui. Nous sommes trois à prendre la plume ici pour vous parler de notre engagement, de notre implication auprès de l’association L’enfant@l’hôpital, et de l’épanouissement qu’ils nous procurent.
L’association existe depuis plus de trente-cinq ans et se donne pour mission d’accompagner les enfants en situation de handicap ou malades, à travers toute la France, pour les ramener à la lecture et à la culture.
Les missions de L’enfant@l’hôpital
L’accompagnement qu’elle propose repose sur des ateliers conçus sur-mesure en fonction de l’âge, de la pathologie et du niveau cognitif de chaque enfant. Lors de ces ateliers, les enfants accèdent ensemble à Kolibri, une application numérique conçue pour s’adapter à toutes les formes de handicaps. Via Kolibri, les enfants suivent chaque semaine les aventures de voyageurs solidaires et chaleureux aux quatre coins du monde. Lecture, écriture, géographie, chants, gastronomie…
“Via Kolibri, les enfants suivent chaque semaine les aventures de voyageurs solidaires et chaleureux aux quatre coins du monde.”
Chaque carnet est prétexte à la découverte et à l’apprentissage : en étudiant les pays traversés, en calculant le nombre de kilomètres parcourus, en cuisinant une recette, en écrivant une lettre au voyageur. Les enfants reçoivent les récits hebdomadaires et peuvent directement poser des questions à leurs voyageurs qui y répondent pour la séance suivante.
Le rôle des animateurs
Les animateurs, polytechniciens ou issus d’autres formations, se rendent dans les établissements partenaires pour faire le lien entre les voyageurs et les enfants. Ils sont les véritables messagers du voyageur sur le terrain. Ils traversent la France et les huit délégations régionales de l’association pour découvrir les récits de voyage, distribuer la parole, imaginer des activités annexes. Bref : créer, inventer, renouveler et surprendre les enfants et leur redonner l’envie d’apprendre et de découvrir.
Une association en constante évolution
Depuis sa création il y a trente-sept ans, l’association ne s’est jamais reposée sur un modèle de fonctionnement acquis et immuable. Au contraire, elle a toujours cherché à s’adapter aux besoins d’une société en constante évolution et elle questionne en permanence son sens, sa population cible, les outils utilisés ou son périmètre d’intervention.
En particulier, elle a fondé son développement sur l’observation de ses bénéficiaires et sur l’adaptation la plus fine et la plus souple possible à leurs besoins. Sa longue expérience lui offre ainsi suffisamment de recul pour observer plusieurs évolutions. Celles-ci constituent des défis à relever dans les toutes prochaines années pour une amélioration continue et active de sa méthode pédagogique : l’adaptation au raccourcissement des séjours hospitaliers, l’accompagnement des enfants souffrants de troubles dys (troubles d’apprentissages cognitifs) dont le nombre croît d’année en année, et la communication avec les enfants atteints de grands handicaps.
Kolibri : une plateforme interactive
Aux débuts de l’association, le logiciel outil, Kanari, ne possédait que très peu de fonctionnalités. En 2005, un nouvel outil a été développé en interne : Kolibri qui permet d’éditer des carnets de bord avec images, vidéos, d’établir une communication entre les enfants et les voyageurs par messagerie, ainsi que de créer des quizz directement sur la plateforme. En 2019, face à la lenteur de Kolibri, l’association s’est lancée dans la refonte complète de l’outil avec l’aide en partie en mécénat de compétences de l’entreprise digitale Tymate.
Un long travail avec des anciens animateurs et des anciens voyageurs a permis d’établir le nouveau cahier des charges du logiciel. Ce travail de remise à niveau permanent, certes coûteux en temps et en argent, est indispensable pour que l’association continue d’attirer les voyageurs et facilite le travail des animateurs au quotidien. Depuis 2019, la gestion de Kolibri a été aussi confiée à Tymate : elle est désormais entre les mains expertes de cette agence de développement web, qui adapte le site aux attentes des jeunes suivant un cahier des charges que l’association lui transmet. Le mécénat de compétences permet à l’association de réaliser ces évolutions à moindre coût.
Les quatre-vingt-un ateliers de l’association à travers la France
L’association est présente dans de nombreuses régions et est gérée par des délégations régionales : Paris intra-muros, Île-de-France, Côte d’Or, Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Hauts-de-France, Grand Est et Loire, Limousin. Chaque délégation est en contact direct avec les centres de son territoire et s’interroge sur la pertinence des ateliers. Ces réflexions conduisent le plus souvent à la reconduction et à la création d’ateliers, et parfois à leur fermeture, selon les besoins des enfants. La particularité de l’association est de privilégier les lieux difficiles d’accès dans lesquels peu d’associations interviennent, et où l’isolement géographique s’ajoute à l’isolement causé par la maladie ou le handicap.
Une journée type en période de formation humaine civile
Chaque jour, les animateurs se rendent dans les différents établissements. En arrivant, ils font un point avec l’enseignant de la classe ou l’équipe médicale pour définir le programme de l’atelier. Les ateliers durent entre 45 min et 1 h.
L’atelier démarre par la lecture du carnet de voyage de la semaine par les enfants. Des activités sont organisées en lien avec le contenu du carnet : atelier de cuisine, suivi sur une mappemonde, recherche sur des instruments de musique locaux… Chaque semaine, les enfants découvrent les réponses aux questions posées aux voyageurs lors de l’atelier précédent. Certains ateliers revêtent une importance particulière : les visites de départ et de retour des voyageurs suivis. Lors de ces visites, les voyageurs interagissent directement en présentiel avec les enfants. Ils montrent le contenu de leurs bagages avant leur départ, racontent des anecdotes sur leur voyage à leur retour, expliquent comment les interactions avec les enfants ont influencé leur voyage. Ce sont des moments très riches durant lesquels les enfants se sentent privilégiés.
« Les six mois passés à L’enfant@l’hôpital sont riches d’enseignement pour les élèves de Polytechnique. »
Le soir, les animateurs polytechniciens rentrent à l’appartement qu’ils partagent en colocation à Paris. Ils échangent autour de leur journée et rédigent sur Kolibri leurs comptes-rendus d’ateliers pour informer l’équipe de l’association. Chaque semaine, des points de suivi sont également organisés avec l’équipe de l’association et avec les délégués régionaux, pour s’assurer de la cohérence des interventions et du bien-être physique et psychologique des animateurs. Les services d’une psychologue partenaire de l’association sont également proposés aux animateurs en cas de besoin.
Les six mois passés à L’enfant@l’hôpital sont riches d’enseignement pour les élèves de Polytechnique. Ils sont surtout l’occasion de relativiser les événements, mesurer sa chance et prendre conscience des choses qui comptent vraiment.
Nous faisons le vœu que ce partenariat fructueux, tant pour les élèves polytechniciens que pour l’association, durera encore longtemps et fera la une de La J&R 2048 à l’occasion de ses 50 ans !
Cinq ans, dix ans, quinze ans après, qu’est-ce que signifie notre soutien à l’association L’enfant@l’hôpital ?
Aujourd’hui notre engagement, bien que moins opérationnel, consiste à améliorer la visibilité de l’association.
La sortie de la crise sanitaire constitue un tournant pour de nombreuses associations, qui ont vu leurs budgets drastiquement réduits par les coupes de dons de la part des entreprises, partenaires et particuliers. Au moment où L’enfant@l’hôpital poursuit son adaptation aux outils numériques et aux différents profils des publics accompagnés, en réinventant ses méthodes pour les faire coller le plus possible aux attentes des nouvelles générations, nous intervenons en support pour susciter l’intérêt de mécènes potentiels. À travers les fondations d’entreprise ou les réponses à des appels à projet, nous apportons notre contribution.
Nous cherchons également à tisser un réseau sur l’ensemble du territoire, en vue notamment de renforcer les délégations régionales, qui sont les ambassadeurs auprès des établissements comme les IME (Instituts médicoéducatifs), les IEM (Instituts d’éducation motrice), les services hospitaliers et les établissements scolaires.
Enfin, nous intervenons dans une visée fédératrice, pour raviver et maintenir le réseau des anciens animateurs, tout en cherchant à transmettre nos expériences aux nouvelles générations d’élèves de l’X.
Vous souhaitez en savoir plus sur l’association ou savoir comment nous aider ? Contactez Claire, Camille ou Juliette ou rendez-vous sur le site : www.enfant-hopital.org
En illustration : Assemblée générale de L’enfant@l’hôpital en mars 2022. De gauche à droite, ligne du bas : Marion Roger (X10), Philippe Cherabier (X14), Enzo Sèle (X21), Axel Garreau (X20), Rémi de Vergnette (X20), ligne médiane : Maxime Ropars (X21), Pauline Amrouche (X21), Victor Chabirand (X21), Claire Bach (X17), Quentin Montes (X20), ligne du haut : Antoine Bonnet (X21), Elie Prost (X18), Camille Ghibaudo (X06), Florian Tedeschi (X06), Quentin Garnier.
Claire (X17)
« Le besoin de voyager des enfants m’a permis de voyager tout en restant en Suède ! »
Une fois rentrée dans le monde de L’enfant@l’hôpital pendant la période de formation humaine civile, c’est difficile d’en sortir. Alors bien sûr, une fois sur le campus, le temps se fait plus rare entre les cours, le sport et les binets. J’ai suivi de loin leurs activités. Puis la Covid est arrivée et, en conséquence, les difficultés rencontrées par l’association pour recruter : comment permettre aux enfants de suivre des voyageurs qui parcourent le monde quand les frontières sont fermées ? Pour moi, cette période était synonyme de départ en 4A à Stockholm. J’ai proposé à l’association d’être une voyageuse – un peu statique certes, mais voyageuse quand même – si les difficultés de recrutement se poursuivaient.
Voilà comment pendant un an, j’ai écrit chaque semaine un article sur ma vie en Suède : un moteur incroyable pour m’encourager à explorer plus, faire des rencontres ou des activités folles. Un bon prétexte également pour interroger mes amis rencontrés sur place sur leur culture. Le besoin de voyager des enfants m’a permis de voyager tout en restant en Suède ! Une fois rentrée en France, j’ai été élue vice-présidente de l’association en 2022 pour continuer à la soutenir !
Camille (X06)
« L’enfant@l’hôpital, c’est avant tout une aventure humaine. »
L’enfant@l’hôpital, c’est avant tout une aventure humaine : avec les enfants et les adolescents certes, mais aussi leurs parents, les équipes médicales, les enseignants, l’équipe de l’association et nos camarades de formation. J’ai vécu des moments très difficiles, en service d’hématologie à Toulouse notamment, où j’ai été confrontée à trois décès. Traverser cela avec l’enseignante du service, en parler avec mes camarades de formation qui avaient parfois traversé des épreuves similaires, et en parler aussi avec l’équipe de l’association lors de nos réunions hebdomadaires, a créé des liens indéfectibles.
Seize ans après, je revois régulièrement l’enseignante de Toulouse, qui a tissé de forts liens avec mes enfants quand j’habitais dans cette ville. Nous nous sommes à nouveau retrouvées pour un déjeuner avec les quatre stagiaires et l’ancienne secrétaire générale de l’association en janvier 2023. Et l’assemblée générale de l’association est toujours l’occasion de retrouvailles. C’est donc naturellement que j’ai déposé cette année un dossier auprès de la fondation de mon employeur pour accompagner un projet de l’association.
Juliette (X18)
« J’ai appris à me dépasser, à vaincre mes peurs, à captiver un auditoire sur des sujets que je maîtrisais à peine. »
L’expérience avec L’enfant@l’hôpital ne se limite pas à six mois de période de formation humaine civile. L’influence de cette aventure sur ma vie va bien plus loin que mon engagement aux côtés de l’association. Être bénévole dans cette association a d’abord été pour moi l’occasion de découvrir un monde que je ne connaissais pas : voir les fractures sociales générées par le handicap, échanger avec des jeunes de nos quotidiens, rire avec des soignants et des éducateurs. D’un point de vue humain, ces six mois m’ont autant apporté que dix ans d’existence.
J’ai appris à me dépasser, à vaincre mes peurs, à captiver un auditoire sur des sujets que je maîtrisais à peine. Travailler auprès d’enfants en difficulté est un combat de tous les jours. C’est par exemple l’histoire du combat que j’ai mené avec une petite fille de dix ans, qui osait à peine prendre la parole en début d’année car elle ne savait pas lire, et qui a acquis tellement de confiance en elle qu’à la fin de ma mission elle était volontaire pour lire en atelier.
Flexibilité, adaptation, confiance, sourire, espoir. C’est ainsi que je pourrais décrire ce que j’ai vécu six mois durant, et que je serais prête à recommencer à n’importe quel moment, si l’occasion m’était donnée.