Philippe Durteste (X58) un poète qui aimait la mer
« Papa était un poète » furent les premiers mots prononcés par son fils Thierry (vice-amiral), au début de la messe de requiem de Philippe Durteste, le 2 juin 2023, à Saint-Louis-des-Invalides.
Un poète qui aimait la mer et qui fut heureux à Polytechnique. Il en a aimé l’esprit, non seulement pour la camaraderie indéfectible, les sciences, mais aussi pour la recherche en son âme et conscience de son destin, et du devoir envers notre patrie.
Philippe naît à Paris le 15 février 1939 d’un père médecin-colonel et d’une mère pharmacienne. Après des études secondaires à Colmar, une prépa au lycée Saint-Louis et l’X, il choisit la Marine où il sut se faire reconnaître et aimer, comme un des leurs. Après la Jeanne‑d’Arc en 1960, il rejoint les sous-mariniers, chez qui il exprima son goût pour l’efficacité et la technique. Très vite il s’intéressa aux applications du génie atomique. Son dernier embarquement sur un sous-marin fut le commandement du SNLE Le Tonnant en 1980.
Au fur et à mesure de son expérience, il comprit qu’il n’y avait pas d’autre voie que la dissuasion nucléaire. Bien sûr il savait écouter ceux qui s’y opposaient. Mais c’était un homme de conviction. À quelques semaines de sa mort, il trouva la force d’écrire un article dans La Jaune et la Rouge, paru en mai 2023, pour participer jusqu’au bout au débat que suscite parmi nous la dissuasion nucléaire.
Des sous-marins au porte-avion
En 1985, il commanda le porte-avion Foch, apprit à piloter et mit en place des dispositions nouvelles pour assurer la sécurité du retour à bord de ses pilotes, principes encore en vigueur sur le porte-avion Charles-de-Gaulle. Cette réalisation lui a valu le trophée de la sécurité des vols.
En 1988, il refonda l’enseignement des mathématiques et de la physique en génie atomique, à l’École des applications militaires de l’énergie atomique de Cherbourg, qu’il dirigea.
Promu contre-amiral en1990, il a été chargé des opérations en Atlantique. Il y acquit alors auprès de ses homologues du haut commandement des marines anglo-saxonnes une estime et une amitié qui dureront toute sa vie. De 1995 à 1998, il fut préfet maritime et commandant de la région maritime pour la Méditerranée. Pour le 40e anniversaire de la promotion X58, il eut l’heureuse initiative de nous inviter tous à Toulon, inoubliable photo de la promotion sur le Foch, puis réception à la résidence. En 1996, il a été le premier amiral français à commander la force maritime européenne Euromarfor.
Après avoir quitté le service actif, il devint président de l’Institut français de navigation et un membre très actif du groupe X Mer. Mais une des actions qui lui tenaient le plus à cœur fut de réaliser à Toulon le monument national des sous-mariniers (MNSM) morts pour la France ou en service commandé, monument inauguré en 2009.
De la mer à la montagne de Sainte-Foy-Tarentaise
Il a épousé Françoise, sœur de Philippe Lenoir (X58), compagne extraordinaire qui lui donna trois enfants, et huit petits-enfants, et elle assura, entre autres missions, le secrétariat de l’amicale Entraide Marine-Adosm. Avec toute la famille, Philippe se passionna pour la montagne entourant Sainte-Foy-Tarentaise ; leur maison, ancienne et villageoise, fut un lieu d’accueil pour beaucoup.
Parkinsonien depuis plus de vingt-cinq ans, il lutta constamment pour garder une vie active, non seulement par des contacts professionnels, mais aussi avec ses amis en continuant le théâtre, l’opéra, le bridge, le golf. Hélas, Françoise disparut en mai 2022. Poète jusqu’au bout, sentant la mort venir, début mai 2023 il décida de se rendre à Sainte-Foy prier sur sa tombe face à leur montagne. C’est là que le destin l’a pris…