RSE et nouveaux défis réglementaires : le rôle clé des équipes data
La pression croissante portée sur les entreprises par les réglementations RSE oblige à mettre en place une gouvernance transverse de la donnée. Les équipes RSE et data ne peuvent ainsi fonctionner isolément les unes des autres : au contraire il faut dès maintenant constituer une pluridisciplinarité qui permettra de faire face aux exigences futures des réglementations.
Aviez-vous remarqué que vous pouvez désormais connaître bien plus que le Made in des vêtements que vous achetez ? En effet, dans le cadre de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec), depuis le 1er janvier 2023 les entreprises françaises ont pour obligation de fournir au moment de l’achat l’information du pays de confection, de tissage et de teinture. La loi Agec concerne un nombre croissant d’entreprises : en 2023, les entreprises ayant un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros et ayant plus de 25 000 produits mis sur le marché en France annuellement ; en 2024, celles qui ont 20 millions d’euros de CA et 10 000 produits ; en 2025, un CA de 10 millions d’euros et 10 000 produits. Au-delà de cette loi, ce sont de nouvelles réglementations et initiatives RSE qui s’imposent progressivement dans les entreprises. Elles permettent au consommateur d’être mieux averti sur l’impact environnemental et social des produits qu’il achète et sur les entreprises qui les produisent. Mais ces initiatives impliquent une gouvernance transverse de la donnée environnementale qui est bien souvent nouvelle et difficile à mettre en place. Des compétences techniques en traitement et en compréhension de la donnée se révèlent alors indispensables.
Une pression accrue
L’accélération des initiatives des entreprises sur la RSE est à mettre en regard de la pression accrue des réglementations qui pèsent sur elles. Tandis que les lois Agec et d’affichage environnemental viennent renforcer les informations environnementales à disposition du client au moment de l’achat d’un produit, la Non Financial Reporting Directive (NFRD) et la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) régissent les rapports extra-financiers. Ces rapports permettent de piloter au plus près des indicateurs sur l’empreinte environnementale et sociétale des entreprises (comme leur consommation en eau ou leur mix énergétique) et viennent étayer les informations à disposition des investisseurs. Loin d’être ponctuelles, ces réglementations sont amenées à se développer dans les dix prochaines années en élargissant les champs couverts par les critères. Par exemple le scope 3, qui inclut les émissions indirectes d’une entreprise liées à ses fournisseurs et à la fin de vie des produits, pourra être requis dans le calcul de l’impact environnemental de l’entreprise. L’application de ces réglementations est susceptible d’être soumise à des contrôles plus rigoureux et de faire l’objet de sanctions renforcées en cas de non-conformité. Aussi ces réglementations vont concerner de plus en plus de géographies, à l’échelle européenne, voire internationale – par exemple, les États-Unis développent actuellement leur équivalent de la CSRD pour le reporting extra-financier via l’International Financial Reporting Standards (IFRS) : les Sustainability Disclosure Standards.
Scope 3
Le scope 3 est l’un des trois niveaux d’émissions de gaz établis dans le GHG Protocol (Green House Gas Protocol) qui concerne les gaz à effet de serre.
Sont concernées depuis le 1er janvier 2023 les entreprises de plus de 500 salariés qui doivent fournir à l’État un bilan d’émissions de gaz à effet de serre (BEGES) comprenant les émissions indirectes significatives (loi Grenelle II).
Le scope 1 concerne les émissions de gaz à effet de serre directes résultant de la combustion d’énergies fossiles (gaz, pétrole, charbon…).
Le scope 2 concerne les émissions de gaz à effet de serre indirectes liées à la consommation de l’électricité, de la chaleur ou de la vapeur nécessaire à la fabrication du produit.
Le scope 3 concerne les autres émissions indirectes (extraction de matériaux, achats de marchandises, achats de services, transport des salariés et des clients, utilisation des produits ou services vendus, traitement des déchets…). C’est la part la plus importante d’émissions d’une entreprise.
Selon l’Ademe, les émissions indirectes représentent environ 75 % des émissions d’une activité.
De nombreuses possibilités pour les entreprises
La RSE ne doit cependant pas être perçue seulement comme une contrainte réglementaire, car elle offre également de nombreuses possibilités pour les entreprises, notamment pour se démarquer de leurs concurrents. En communiquant ouvertement sur leurs actions en matière de développement durable, celles-ci peuvent renforcer leurs relations clients, leur réputation et leur engagement envers l’environnement. Le tout en assurant un meilleur contrôle des cycles de vie produits par l’intégration de pratiques durables dans la chaîne d’approvisionnement.
Les équipes RSE ne peuvent pas rester isolées
La conformité aux réglementations transverses a toujours été un défi de taille pour les entreprises, étant un sujet complexe qui nécessite une coordination étroite entre de multiples fonctions au sein de l’entreprise. Aussi, la sensibilisation est souvent insuffisante à tous les niveaux hiérarchiques et accroît la difficulté. Dernièrement, c’est la mise en conformité avec le règlement général sur la protection des données (RGPD) qui a posé de nombreux problèmes aux entreprises françaises ; elle n’est d’ailleurs toujours pas totalement achevée. Les réglementations RSE rejoignent cette catégorie de problématiques transverses. Les équipes RSE dédiées à ces sujets jouent un rôle crucial en traduisant opérationnellement les réglementations, en gérant les projets et en assurant la communication autour de ces initiatives essentielles. Cependant, ces équipes dédiées se trouvent confrontées à des difficultés techniques spécifiques, la collecte et le traitement des données RSE étant souvent complexes. Ces données proviennent de multiples sources et sont parfois limitées ou de mauvaise qualité. De plus, le calendrier réglementaire est serré, laissant peu de marge de manœuvre aux entreprises pour se préparer adéquatement, notamment en termes de systèmes d’information. Il est donc nécessaire pour les équipes RSE de s’entourer de profils techniques, capables de comprendre les questions métiers, au sein d’une organisation dédiée à ces sujets, pour mieux les appréhender.
Une task force RSE dédiée avec des profils data
Pour faire face à ces défis, il est essentiel de former des équipes pluridisciplinaires mêlant compétences métiers et compétences techniques. Ces task forces dédiées aux sujets RSE (réglementaires ou non) permettent une réponse efficace et pérenne. Cette task force RSE peut être structurée de la manière suivante : premièrement les équipes RSE se consacrent à la traduction des sujets spécifiques de l’entreprise dans le contexte de la RSE. Elles supervisent les projets et veillent à la communication autour des initiatives entreprises. Puis les référents métiers assurent la collecte de la donnée et sont responsables de sa qualité. Ils sont le point de contact sur les sujets RSE au sein de leur métier spécifique. Les data analystes assurent la coordination avec les métiers et prennent en charge l’ensemble des aspects liés à la donnée, allant de son traitement à la visualisation et à l’interprétation des résultats. Enfin, un profil orienté projet IT assure la bonne traduction et le déploiement technique des besoins data de la RSE dans les systèmes d’information de l’entreprise.
Le data analyste
Dans ces task forces, le data analyste joue un rôle primordial, en portant une vision qui combine maîtrise technique de la donnée et compréhension business. Ses compétences en traitement, retraitement et gestion des données complexes, en modélisation et formulation d’hypothèses, en manipulation d’outils de calcul et de visualisation, sont essentielles pour mettre au point des solutions de pilotage des données environnementales. Le contexte changeant des réglementations en appelle à la créativité des data analystes, qualité qui se révèle essentielle quand le parcours de la donnée – de sa collecte à sa restitution – reste très peu automatisé à court terme. Alliant rigueur et flexibilité, le data analyste est capable d’atterrir en très peu de temps à des solutions data fonctionnelles, bien que partiellement dégradées par rapport à la cible de plus long terme, qui sera atteinte par itérations successives et adaptation de l’entreprise au changement.
“Mettre en place dès aujourd’hui une organisation pluridisciplinaire. ”
Conjointement avec la mise au point de solutions data pour la RSE de court terme, il participe à penser ces solutions pour la pérennité. Par son positionnement technique et métier, il est un facilitateur pour anticiper l’automatisation de ces solutions dans les systèmes, en étroite collaboration avec l’IT, ainsi que leur appropriation par le métier.
S’entourer de profils data dans les équipes RSE
Bien anticiper des besoins data et techniques est essentiel pour faire face aux réglementations RSE qui sont de plus en plus nombreuses, exigeantes et évolutives. Mettre en place dès aujourd’hui une organisation pluridisciplinaire dédiée aux sujets RSE permet d’anticiper ces évolutions, pour s’adapter avec agilité aux exigences grandissantes. La collaboration entre les équipes data et RSE en est encore à ses débuts, mais sensibiliser dès aujourd’hui les profils RSE à la data et réciproquement les profils data aux problématiques RSE est essentiel, car l’expertise data est clé pour traiter ces sujets. Enfin, cette collaboration ouvrira demain la porte à des applications data plus poussées pour la RSE, du côté de l’intelligence artificielle par exemple via les algorithmes d’optimisation des ressources. Notre cabinet, eleven, dispose d’une solide expérience de ces sujets et d’une équipe dont les compétences et la flexibilité permettent la réussite de tels projets.