Daniel Dewavrin (X58) un grand dirigeant engagé au service de l’industrie française
Décédé le 21 avril 2024, Daniel Dewavrin a connu une carrière industrielle riche en rebondissements et en succès avant de se consacrer à plusieurs fédérations patronales et associations, dont l’AX.
Né le 24 juin 1936, Daniel est le fils d’André Dewavrin dit colonel Passy, fondateur et chef du Bureau central de renseignements et d’action, ancêtre de la DGSE. Exfiltré en 1941 vers l’Angleterre avec sa mère et sa sœur, il ne revint en France qu’à l’âge de dix ans, ne parlant pas le français. Études à Janson-de-Sailly, Louis-le-Grand, l’X, puis Supaéro, avant de rejoindre le corps des ingénieurs de l’air. Une formation ensuite complétée par le CPA et Harvard Business School.
Sa carrière commence au service de l’État (1963−1967) comme ingénieur de l’Air à l’Atelier industriel de l’aéronautique à Bordeaux, où il découvre l’organisation industrielle, puis il travaille sur des projets d’implantation industrielle pour la production des réacteurs des programmes franco-anglais.
Un capitaine pour les gros temps
En 1967, il rejoint l’entreprise familiale de robinetterie Piel, où il s’initie à la vie industrielle et en retire une forte expérience humaine. Il prend ensuite la direction générale de la filiale aéronautique de Ratier-Figeac en 1977. Associée aux premiers succès de l’Aéropostale, cette entreprise était alors en très grande difficulté. Suscitant l’adhésion de ses équipes et avec l’appui de techniciens hors pair, il parvient à redresser la barre et à prendre les tournants technologiques des commandes numériques et des matériaux composites. Très attaché à l’entreprise Ratier-Figeac aujourd’hui leader mondial dans le domaine des hélices de forte puissance, il gardera des fonctions pleinement opérationnelles jusqu’en 1981 et en restera président jusqu’en 1999.
Daniel se révéla particulièrement habile dans des situations complexes comme capitaine de gros temps, ce qui lui a valu de devenir à trois reprises PDG de l’entreprise absorbante de celle qu’il dirigeait : Luchaire (1979−1990), Bertrand-Faure (1990−1999), puis Faurecia (1999−2000).
Fin négociateur et rassembleur, il navigua dans un environnement industriel compétitif et en constante évolution, en proie à des OPA hostiles au sein d’une concurrence mondiale.
Il se définissait comme un patron chef d’orchestre, rassemblant ses équipes autour de valeurs communes afin de s’assurer qu’elles fassent bloc autour d’un projet.
Un patron engagé
Sa fin de carrière est tournée vers un engagement au sein de plusieurs fédérations patronales et associations. Proeuropéen, l’attractivité industrielle de la France lui tient particulièrement à cœur. Il milite à la fois contre ce qu’il perçoit comme des rigidités administratives et des prélèvements abusifs, et également contre une dérégulation mondiale mal maîtrisée. Réfutant fortement le concept de société postindustrielle, il soutient que tout pays avancé doit pouvoir s’appuyer sur une industrie compétitive. Président de l’UIMM de 1999 à 2006 et du GFI (Groupement des fédérations industrielles) de 2002 à 2005, il publia deux rapports faisant des propositions concrètes pour lutter contre le déclin de l’industrie française : « Une ambition industrielle pour la France » et « Pour une nouvelle politique industrielle ».
Président de l’AX de 2006 à 2010, Daniel Dewavrin eut à définir la position de l’AX devant le projet Paris-Saclay, très fortement poussé par le pouvoir politique. Constatant que la gouvernance de l’X n’était alors pas réellement en mesure de porter au mieux les intérêts de l’École sur ce chantier majeur, il lança une réflexion importante qui conduisit en 2013 à un changement complet de gouvernance de l’École avec la nomination d’un président à temps plein et rémunéré, à l’instar de toutes les autres grandes écoles françaises, et issu du monde industriel et technologique. L’X découvrait alors un mode de gouvernance moderne répondant aux besoins de son développement.