Daniel Dewavrin

Daniel Dewavrin (X58) un grand dirigeant engagé au service de l’industrie française

Dossier : TrajectoiresMagazine N°797 Septembre 2024
Par Olivier MARTIN (X77)
Par Marie DEWAVRIN

Décé­dé le 21 avril 2024, Daniel Dewa­vrin a connu une car­rière indus­trielle riche en rebon­dis­se­ments et en suc­cès avant de se consa­crer à plu­sieurs fédé­ra­tions patro­nales et asso­cia­tions, dont l’AX.

Né le 24 juin 1936, Daniel est le fils d’André Dewa­vrin dit colo­nel Pas­sy, fon­da­teur et chef du Bureau cen­tral de ren­sei­gne­ments et d’action, ancêtre de la DGSE. Exfil­tré en 1941 vers l’Angleterre avec sa mère et sa sœur, il ne revint en France qu’à l’âge de dix ans, ne par­lant pas le fran­çais. Études à Jan­son-de-Sailly, Louis-le-Grand, l’X, puis Supaé­ro, avant de rejoindre le corps des ingé­nieurs de l’air. Une for­ma­tion ensuite com­plé­tée par le CPA et Har­vard Busi­ness School.

Sa car­rière com­mence au ser­vice de l’État (1963−1967) comme ingé­nieur de l’Air à l’Atelier indus­triel de l’aéronautique à Bor­deaux, où il découvre l’organisation indus­trielle, puis il tra­vaille sur des pro­jets d’implantation indus­trielle pour la pro­duc­tion des réac­teurs des pro­grammes franco-anglais.

Un capitaine pour les gros temps

En 1967, il rejoint l’entreprise fami­liale de robi­net­te­rie Piel, où il s’initie à la vie indus­trielle et en retire une forte expé­rience humaine. Il prend ensuite la direc­tion géné­rale de la filiale aéro­nau­tique de Ratier-Figeac en 1977. Asso­ciée aux pre­miers suc­cès de l’Aéro­postale, cette entre­prise était alors en très grande dif­fi­cul­té. Sus­ci­tant l’adhésion de ses équipes et avec l’appui de tech­ni­ciens hors pair, il par­vient à redres­ser la barre et à prendre les tour­nants tech­no­lo­giques des com­mandes numé­riques et des maté­riaux com­po­sites. Très atta­ché à l’entreprise Ratier-Figeac aujourd’hui lea­der mon­dial dans le domaine des hélices de forte puis­sance, il gar­de­ra des fonc­tions plei­ne­ment opé­ra­tion­nelles jusqu’en 1981 et en res­te­ra pré­sident jusqu’en 1999.

Daniel se révé­la par­ti­cu­liè­re­ment habile dans des situa­tions com­plexes comme capi­taine de gros temps, ce qui lui a valu de deve­nir à trois reprises PDG de l’entreprise absor­bante de celle qu’il diri­geait : Luchaire (1979−1990), Ber­trand-Faure (1990−1999), puis Fau­re­cia (1999−2000).

Fin négo­cia­teur et ras­sem­bleur, il navi­gua dans un envi­ron­ne­ment indus­triel com­pé­ti­tif et en constante évo­lu­tion, en proie à des OPA hos­tiles au sein d’une concur­rence mondiale.

Il se défi­nis­sait comme un patron chef d’orchestre, ras­sem­blant ses équipes autour de valeurs com­munes afin de s’assurer qu’elles fassent bloc autour d’un projet.

Un patron engagé

Sa fin de car­rière est tour­née vers un enga­ge­ment au sein de plu­sieurs fédé­ra­tions patro­nales et asso­cia­tions. Proeu­ro­péen, l’attractivité indus­trielle de la France lui tient particulière­ment à cœur. Il milite à la fois contre ce qu’il per­çoit comme des rigi­di­tés admi­nis­tra­tives et des pré­lè­ve­ments abu­sifs, et éga­le­ment contre une déré­gu­la­tion mon­diale mal maî­tri­sée. Réfu­tant for­te­ment le concept de socié­té post­in­dus­trielle, il sou­tient que tout pays avan­cé doit pou­voir s’appuyer sur une indus­trie com­pé­ti­tive. Pré­sident de l’UIMM de 1999 à 2006 et du GFI (Grou­pe­ment des fédé­ra­tions indus­trielles) de 2002 à 2005, il publia deux rap­ports fai­sant des pro­po­si­tions concrètes pour lut­ter contre le déclin de l’industrie fran­çaise : « Une ambi­tion indus­trielle pour la France » et « Pour une nou­velle poli­tique industrielle ».

Pré­sident de l’AX de 2006 à 2010, Daniel Dewa­vrin eut à défi­nir la posi­tion de l’AX devant le pro­jet Paris-Saclay, très for­te­ment pous­sé par le pou­voir poli­tique. Consta­tant que la gouver­nance de l’X n’était alors pas réel­le­ment en mesure de por­ter au mieux les inté­rêts de l’École sur ce chan­tier majeur, il lan­ça une réflexion impor­tante qui condui­sit en 2013 à un chan­ge­ment com­plet de gou­ver­nance de l’École avec la nomi­na­tion d’un pré­sident à temps plein et rému­né­ré, à l’instar de toutes les autres grandes écoles fran­çaises, et issu du monde indus­triel et tech­no­lo­gique. L’X décou­vrait alors un mode de gou­ver­nance moderne répon­dant aux besoins de son développement.

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