La FinTech française : Une croissance qui se poursuit et une excellence qui se confirme !

Dossier : Vie des entreprises, FintechMagazine N°798 Octobre 2024
Par Maximilien NAYARADOU

Mal­gré la baisse des finan­ce­ments, la fin­tech fran­çaise reste extrê­me­ment dyna­mique avec 14 licornes et de belles pers­pec­tives de déve­lop­pe­ment dans tous les domaines. Maxi­mi­lien Naya­ra­dou, direc­teur géné­ral de Finance Inno­va­tion qui suit, accom­pagne et anime l’écosystème depuis déjà plus de 15 ans, nous en dit plus. 

Finance Innovation est le cluster de la finance digitale et de la fintech. Quelques mots pour présenter vos missions et votre périmètre d’action.

Créé en 2007 par l’État, Finance Inno­va­tion est l’un des sept pôles de com­pé­ti­ti­vi­té mon­diaux, sur les 54 pôles de com­pé­ti­ti­vi­té label­li­sés par le CIACT en France.
La mis­sion de Finance Inno­va­tion est d’accompagner les fin­techs, les insur­techs et les acteurs du sec­teur finan­cier et de les aider à lever des fonds publics et pri­vés pour accé­lé­rer leur crois­sance. Dans ce cadre, notre rôle consiste à iden­ti­fier et accé­lé­rer les fin­techs et leurs pro­jets inno­vants ; contri­buer à la trans­for­ma­tion digi­tale et durable de la finance et de l’économie ; mon­ter des pro­jets de R&D en finance digi­tale d’envergure natio­nale et européenne.

Actuel­le­ment, Finance Inno­va­tion regroupe une large com­mu­nau­té qui com­prend plus de 600 acteurs de l’innovation finan­cière, dont des grands groupes, des fin­techs, des ETI, des PME, des labo­ra­toires de recherche… 
Au sein de cet éco­sys­tème, nous nous mobi­li­sons pour pro­mou­voir l’innovation dans la finance digi­tale et la fin­tech, créer des syner­gies et mettre en place des pro­jets col­la­bo­ra­tifs entre les dif­fé­rents acteurs de cette inno­va­tion et contri­buer à créer de l’emploi dans ces filières.

“Finance Innovation regroupe une large communauté qui comprend plus de 600 acteurs de l’innovation financière.”

Notre péri­mètre d’action couvre 7 domaines d’activité : assu­rance, banque, finance durable et soli­daire, immo­bi­lier, ges­tions d’actifs, ges­tion et finance d’entreprise, blo­ck­chain, finance décen­tra­li­sée et web3. À tra­vers nos comi­tés de labé­li­sa­tion, nous labé­li­sons les pro­jets inno­vants les plus pro­met­teurs pour la trans­for­ma­tion digi­tale et le futur de l’industrie finan­cière fran­çaise. Depuis 15 ans, nous avons ain­si labé­li­sé plus de 730 pro­jets et contri­bué à lever plus de 2,8 mil­liards d’euros.

Pour aider les entre­prises label­li­sées à trou­ver des finan­ce­ments, nous avons mis en place un comi­té d’investisseurs et de nom­breux par­te­na­riats. Chaque année, nous orga­ni­sons, par ailleurs, plus d’une cen­taine d’événements pour ani­mer cet éco­sys­tème et notre communauté.

Aujourd’hui, comment est structuré l’écosystème des fintechs et des insurtechs en France ?

Avant l’émergence de la Fin­tech telle que nous la connais­sons aujourd’hui, dans le domaine de la finance et de l’assurance, il y avait déjà de nom­breuses entre­prises qui pro­po­saient des logi­ciels B2B. Le sec­teur a com­men­cé à se déve­lop­per dans les années 2010 et sa struc­tu­ra­tion s’est accé­lé­rée à par­tir de 2015 avec les pre­mières levées de fonds et une cer­taine dis­po­ni­bi­li­té des fonds publics.

His­to­ri­que­ment, l’écosystème a tou­jours fait preuve de beau­coup d’innovation et a su tirer pro­fit de toutes les der­nières tech­no­lo­gies. Les années 2007 à 2012 marquent le déve­lop­pe­ment des fin­techs dans le sec­teur du paie­ment et du crowd­fun­ding. Alors que nous avons publié notre pre­mier livre blanc sur l’insurtech en 2010, le sec­teur a connu un essor consi­dé­rable à par­tir de 2019 grâce aux levées de fonds.

Sur les cinq der­nières années, le sec­teur s’est diver­si­fié avec le déve­lop­pe­ment de la finance décen­tra­li­sée, la blo­ck­chain, les cryp­to-actifs, l’accélération de la digi­ta­li­sa­tion des direc­tions finan­cières, et de plus en plus de solu­tions des­ti­nées à amé­lio­rer la ges­tion de la comp­ta­bi­li­té, de la tré­so­re­rie ou encore de la fac­tu­ra­tion. La prop­tech, la Real Estate tech et la reg­tech ont gagné en matu­ri­té et pour­suivent leur développement.

Enfin, aujourd’hui, la fin­tech fran­çaise, c’est 14 licornes : Iva­lua, Datai­ku, You­ni­ted, Led­ger, Lydia, Kyri­ba, Shift Tech­no­lo­gy, Alan, Swile, Qon­to, Pay­fit, Pen­ny­lane, Pig­ment, Spendesk.

On observe depuis un peu plus d’un an un ralentissement des levées de fonds sur les deux dernières années. Qu’en est-il ?

À par­tir de 2015, la baisse des taux par la BCE a inci­té les ins­ti­tu­tion­nels à flé­cher leurs actifs vers les fonds de Pri­vate Equi­ty qui financent notam­ment l’innovation. Avec la remon­tée des taux à par­tir de 2022, ces acteurs se sont détour­nés du Pri­vate Equi­ty pour réal­louer leurs fonds dans des obli­ga­tions d’État, qui ont la carac­té­ris­tique d’être moins risqués.

En paral­lèle, le défi­cit bud­gé­taire actuel rend dif­fi­cile la mise en place de sub­ven­tions pour sou­te­nir l’écosystème des fin­techs. Ce phé­no­mène impacte la crois­sance du sec­teur qui peine à finan­cer son déploie­ment com­mer­cial et sa R&D notamment.

Les nouvelles technologies restent un moteur du développement du secteur alors que l’accélération du développement de l’IA, notamment générative, ouvre de nouvelles perspectives. Qu’en est-il ? Quelles sont les pistes technologiques les plus plébiscitées par le secteur ?

L’IA Géné­ra­tive n’est pas une nou­veau­té dans le sec­teur. De nom­breuses fin­techs y avaient déjà recours depuis le début des années 2010. Elle était, par exemple, uti­li­sée par des assu­rances pour géné­rer de la connais­sance à par­tir des bases de don­nées clients pour déve­lop­per le volet com­mer­cial. On peut notam­ment citer Zel­ros qui tra­vaille avec BPCE Assu­rance, la Macif et qui va pous­ser des recom­man­da­tions à par­tir de l’exploitation de bases de don­nées internes et externes.

On peut aus­si citer le réas­su­reur mon­dial, Part­nerRe, qui tra­vaille avec une insur­tech sur un outil d’IA Géné­ra­tive qui per­met aux sala­riés d’accéder plus rapi­de­ment et faci­le­ment aux don­nées rela­tives aux cou­ver­tures ou à la ges­tion des contrats dans tous les pays où il opère.

Aujourd’hui, les avan­cées tech­no­lo­giques vont per­mettre de fran­chir un nou­veau cap et d’interopérabiliser les dif­fé­rents cor­pus et bases de don­nées afin de créer encore plus de valeur, et aus­si afin d’augmenter la pro­duc­ti­vi­té des équipes en interne.

En paral­lèle, l’écosystème tra­vaille sur toutes les tech­no­lo­gies d’IA, comme le deep lear­ning ou encore le machine lear­ning, ain­si que le data mining afin notam­ment d’optimiser la ges­tion et l’allocation d’actifs… Dans le cadre de ces déve­lop­pe­ments tech­no­lo­giques, il est aus­si essen­tiel de sécu­ri­ser le volet confi­den­tia­li­té et sécu­ri­té des données.

À côté de l’IA, d’autres pistes tech­no­lo­giques sont explo­rées par l’écosystème : la blo­ck­chain qui ouvre des pers­pec­tives très inté­res­santes en termes de tra­ça­bi­li­té et de trans­pa­rence, le cloud com­pu­ting qui booste le phé­no­mène de pla­te­for­mi­sa­tion de la finance, ou encore le quan­tique, dont l’usage reste assez mar­gi­nal à ce jour.

RegTech Day au Palais Brongniart, 5 Septembre 2024.
Reg­Tech Day au Palais Bron­gniart, 5 Sep­tembre 2024.

Pouvez-vous nous en dire plus sur le label Finance Innovation et sur les avantages de cette labélisation pour les start-up et les fintechs ?

Le label « Finance Inno­va­tion » contri­bue à amé­lio­rer leur visi­bi­li­té et leur cré­di­bi­li­té en France et à l’international. Plus de 150 experts sont mobi­li­sés pour sélec­tion­ner les start-up éli­gibles au label qui s’articule autour de deux axes :

  • un label pour les pro­jets indi­vi­duels qui repré­sente 80 % des pro­jets labél­li­sés. Ce label per­met aux entre­prises de gagner en visi­bi­li­té, de trou­ver des clients, des finan­ce­ments pri­vés et des sub­ven­tions publiques, ain­si que des par­te­na­riats pour boos­ter leurs inno­va­tions et accé­lé­rer leur croissance ;
  • un label pour les pro­jets col­la­bo­ra­tifs qui est attri­bué à 20 % d’entreprises que nous aidons à obte­nir des fonds publics ;

“Le label « Finance Innovation » contribue à améliorer leur visibilité et leur crédibilité en France et à l’international.”

En 2023, nous avons label­li­sé une qua­ran­taine de pro­jets, dont Sweep, une pla­te­forme qui faci­lite la ges­tion, la com­pré­hen­sion et la com­mu­ni­ca­tion autour de l’ESG et qui a levé 100 mil­lions d’euros ; Accen­ta, qui sim­pli­fie la décar­bo­na­tion des bâti­ments et qui a éga­le­ment fait une levée de fonds de 100 mil­lions d’euros ; Cita­lid, un spé­cia­liste de l’assurance cyber qui fait par­tie d’un pro­jet col­la­bo­ra­tif ; KLS, une fin­tech issue du start-up stu­dio du Cré­dit Agri­cole ; Hand­some, qui pro­pose le pre­mier compte de paie­ment acces­sible aux défi­cients visuels et aux seniors et qui est déjà uti­li­sé par de nom­breuses comme la Socié­té Géné­rale ou encore BNP Pari­bas ; la reg­tech Belt ou encore Rosa­ly qui faci­lite le paie­ment d’acompte aux sala­riés et qui trans­forme actuel­le­ment son modèle afin de deve­nir une néo-banque.

Ce pro­ces­sus de label­li­sa­tion nous per­met d’avoir une vue d’ensemble et glo­bale sur l’évolution du sec­teur. Au tra­vers de notre comi­té de label­li­sa­tion, nous réa­li­sons, en effet, une veille en temps réel et sui­vons au plus près de l’écosystème les ten­dances qui se des­sinent et se confirment.

Quels sont les projets et chantiers qui vous mobilisent actuellement ?

À l’instar des autres pôles de com­pé­ti­ti­vi­té fran­çais, nous avons été mobi­li­sés par la phase V des pôles qui va s’étendre de 2023 à 2026. Dans cette conti­nui­té, nous allons nous concen­trer sur le déve­lop­pe­ment de la fin­tech dans les régions, l’identification de sources de finan­ce­ment et des inves­tis­se­ments en Europe pour nos fin­techs. Mal­gré la baisse du nombre de levées de fonds, ce qui ralen­tit la crois­sance et le déve­lop­pe­ment du sec­teur, nous res­tons opti­mistes et essayons de favo­ri­ser l’accès aux sub­ven­tions, au CIR (Cré­dit Impôt Recherche), mais aus­si les inter­ac­tions entre les start-up, les inves­tis­seurs et les entre­prises. En mai der­nier, c’est notam­ment tenu notre évé­ne­ment Invest­ment Day pour favo­ri­ser ces échanges et faci­li­ter les inves­tis­se­ments dans les dif­fé­rents seg­ments de la fintech.

À l’échelle euro­péenne, dans le cadre du pro­jet Women Tech EU en sou­tien à l’entrepreneuriat fémi­nin, Finance Inno­va­tion est en charge de l’attribution de sub­ven­tions à des femmes por­teurs de pro­jet (10 à 70 000 euros) sur les deux pro­chaines années. Nous coor­don­nons aus­si FINE, Fin­tech Inves­tor Net­work Eco­sys­tem, qui est un pro­jet de mise en réseau, de for­ma­tion et d’animation des éco­sys­tèmes d’investisseurs dans le sec­teur de la fin­tech en Europe.

On peut éga­le­ment citer l’initiative Train for ESG, un pro­jet Eras­mus autour de la for­ma­tion des acteurs du monde de la finance et des entre­prises aux sujets rela­tifs à l’ESG, la CSRD, les nou­velles régle­men­ta­tion dites Green… Ce pro­gramme a voca­tion à cou­vrir un large champ de thé­ma­tiques et d’enjeux. L’idée est, d’ailleurs, ensuite de tra­duire ces conte­nus afin de les mettre à dis­po­si­tion de nos par­ties pre­nantes fran­co­phones. En paral­lèle, nous éla­bo­rons et met­tons en place une for­ma­tion pour deve­nir admi­nis­tra­teur de fin­tech et qui devrait être dis­po­nible d’ici la fin de l’année 2024.


Le Label Finance Innovation 

  • Plus de 740 pro­jets label­li­sés depuis 2009 
  • 2,8 mil­liards d’euros levés par les labellisés
  • 83 % des label­li­sés sont tou­jours en acti­vi­té 3 ans après leur labellisation 
  • 50 % des label­li­sés trouvent des clients direc­te­ment grâce au Label 
  • Plus de 16 000 emplois directs créés 
  • 150 experts métiers indé­pen­dants pour chal­len­ger, sélec­tion­ner et accom­pa­gner les labellisés 

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