La FinTech française : Une croissance qui se poursuit et une excellence qui se confirme !
Malgré la baisse des financements, la fintech française reste extrêmement dynamique avec 14 licornes et de belles perspectives de développement dans tous les domaines. Maximilien Nayaradou, directeur général de Finance Innovation qui suit, accompagne et anime l’écosystème depuis déjà plus de 15 ans, nous en dit plus.
Finance Innovation est le cluster de la finance digitale et de la fintech. Quelques mots pour présenter vos missions et votre périmètre d’action.
Créé en 2007 par l’État, Finance Innovation est l’un des sept pôles de compétitivité mondiaux, sur les 54 pôles de compétitivité labellisés par le CIACT en France.
La mission de Finance Innovation est d’accompagner les fintechs, les insurtechs et les acteurs du secteur financier et de les aider à lever des fonds publics et privés pour accélérer leur croissance. Dans ce cadre, notre rôle consiste à identifier et accélérer les fintechs et leurs projets innovants ; contribuer à la transformation digitale et durable de la finance et de l’économie ; monter des projets de R&D en finance digitale d’envergure nationale et européenne.
Actuellement, Finance Innovation regroupe une large communauté qui comprend plus de 600 acteurs de l’innovation financière, dont des grands groupes, des fintechs, des ETI, des PME, des laboratoires de recherche…
Au sein de cet écosystème, nous nous mobilisons pour promouvoir l’innovation dans la finance digitale et la fintech, créer des synergies et mettre en place des projets collaboratifs entre les différents acteurs de cette innovation et contribuer à créer de l’emploi dans ces filières.
“Finance Innovation regroupe une large communauté qui comprend plus de 600 acteurs de l’innovation financière.”
Notre périmètre d’action couvre 7 domaines d’activité : assurance, banque, finance durable et solidaire, immobilier, gestions d’actifs, gestion et finance d’entreprise, blockchain, finance décentralisée et web3. À travers nos comités de labélisation, nous labélisons les projets innovants les plus prometteurs pour la transformation digitale et le futur de l’industrie financière française. Depuis 15 ans, nous avons ainsi labélisé plus de 730 projets et contribué à lever plus de 2,8 milliards d’euros.
Pour aider les entreprises labellisées à trouver des financements, nous avons mis en place un comité d’investisseurs et de nombreux partenariats. Chaque année, nous organisons, par ailleurs, plus d’une centaine d’événements pour animer cet écosystème et notre communauté.
Aujourd’hui, comment est structuré l’écosystème des fintechs et des insurtechs en France ?
Avant l’émergence de la Fintech telle que nous la connaissons aujourd’hui, dans le domaine de la finance et de l’assurance, il y avait déjà de nombreuses entreprises qui proposaient des logiciels B2B. Le secteur a commencé à se développer dans les années 2010 et sa structuration s’est accélérée à partir de 2015 avec les premières levées de fonds et une certaine disponibilité des fonds publics.
Historiquement, l’écosystème a toujours fait preuve de beaucoup d’innovation et a su tirer profit de toutes les dernières technologies. Les années 2007 à 2012 marquent le développement des fintechs dans le secteur du paiement et du crowdfunding. Alors que nous avons publié notre premier livre blanc sur l’insurtech en 2010, le secteur a connu un essor considérable à partir de 2019 grâce aux levées de fonds.
Sur les cinq dernières années, le secteur s’est diversifié avec le développement de la finance décentralisée, la blockchain, les crypto-actifs, l’accélération de la digitalisation des directions financières, et de plus en plus de solutions destinées à améliorer la gestion de la comptabilité, de la trésorerie ou encore de la facturation. La proptech, la Real Estate tech et la regtech ont gagné en maturité et poursuivent leur développement.
Enfin, aujourd’hui, la fintech française, c’est 14 licornes : Ivalua, Dataiku, Younited, Ledger, Lydia, Kyriba, Shift Technology, Alan, Swile, Qonto, Payfit, Pennylane, Pigment, Spendesk.
On observe depuis un peu plus d’un an un ralentissement des levées de fonds sur les deux dernières années. Qu’en est-il ?
À partir de 2015, la baisse des taux par la BCE a incité les institutionnels à flécher leurs actifs vers les fonds de Private Equity qui financent notamment l’innovation. Avec la remontée des taux à partir de 2022, ces acteurs se sont détournés du Private Equity pour réallouer leurs fonds dans des obligations d’État, qui ont la caractéristique d’être moins risqués.
En parallèle, le déficit budgétaire actuel rend difficile la mise en place de subventions pour soutenir l’écosystème des fintechs. Ce phénomène impacte la croissance du secteur qui peine à financer son déploiement commercial et sa R&D notamment.
Les nouvelles technologies restent un moteur du développement du secteur alors que l’accélération du développement de l’IA, notamment générative, ouvre de nouvelles perspectives. Qu’en est-il ? Quelles sont les pistes technologiques les plus plébiscitées par le secteur ?
L’IA Générative n’est pas une nouveauté dans le secteur. De nombreuses fintechs y avaient déjà recours depuis le début des années 2010. Elle était, par exemple, utilisée par des assurances pour générer de la connaissance à partir des bases de données clients pour développer le volet commercial. On peut notamment citer Zelros qui travaille avec BPCE Assurance, la Macif et qui va pousser des recommandations à partir de l’exploitation de bases de données internes et externes.
On peut aussi citer le réassureur mondial, PartnerRe, qui travaille avec une insurtech sur un outil d’IA Générative qui permet aux salariés d’accéder plus rapidement et facilement aux données relatives aux couvertures ou à la gestion des contrats dans tous les pays où il opère.
Aujourd’hui, les avancées technologiques vont permettre de franchir un nouveau cap et d’interopérabiliser les différents corpus et bases de données afin de créer encore plus de valeur, et aussi afin d’augmenter la productivité des équipes en interne.
En parallèle, l’écosystème travaille sur toutes les technologies d’IA, comme le deep learning ou encore le machine learning, ainsi que le data mining afin notamment d’optimiser la gestion et l’allocation d’actifs… Dans le cadre de ces développements technologiques, il est aussi essentiel de sécuriser le volet confidentialité et sécurité des données.
À côté de l’IA, d’autres pistes technologiques sont explorées par l’écosystème : la blockchain qui ouvre des perspectives très intéressantes en termes de traçabilité et de transparence, le cloud computing qui booste le phénomène de plateformisation de la finance, ou encore le quantique, dont l’usage reste assez marginal à ce jour.
Pouvez-vous nous en dire plus sur le label Finance Innovation et sur les avantages de cette labélisation pour les start-up et les fintechs ?
Le label « Finance Innovation » contribue à améliorer leur visibilité et leur crédibilité en France et à l’international. Plus de 150 experts sont mobilisés pour sélectionner les start-up éligibles au label qui s’articule autour de deux axes :
- un label pour les projets individuels qui représente 80 % des projets labéllisés. Ce label permet aux entreprises de gagner en visibilité, de trouver des clients, des financements privés et des subventions publiques, ainsi que des partenariats pour booster leurs innovations et accélérer leur croissance ;
- un label pour les projets collaboratifs qui est attribué à 20 % d’entreprises que nous aidons à obtenir des fonds publics ;
“Le label « Finance Innovation » contribue à améliorer leur visibilité et leur crédibilité en France et à l’international.”
En 2023, nous avons labellisé une quarantaine de projets, dont Sweep, une plateforme qui facilite la gestion, la compréhension et la communication autour de l’ESG et qui a levé 100 millions d’euros ; Accenta, qui simplifie la décarbonation des bâtiments et qui a également fait une levée de fonds de 100 millions d’euros ; Citalid, un spécialiste de l’assurance cyber qui fait partie d’un projet collaboratif ; KLS, une fintech issue du start-up studio du Crédit Agricole ; Handsome, qui propose le premier compte de paiement accessible aux déficients visuels et aux seniors et qui est déjà utilisé par de nombreuses comme la Société Générale ou encore BNP Paribas ; la regtech Belt ou encore Rosaly qui facilite le paiement d’acompte aux salariés et qui transforme actuellement son modèle afin de devenir une néo-banque.
Ce processus de labellisation nous permet d’avoir une vue d’ensemble et globale sur l’évolution du secteur. Au travers de notre comité de labellisation, nous réalisons, en effet, une veille en temps réel et suivons au plus près de l’écosystème les tendances qui se dessinent et se confirment.
Quels sont les projets et chantiers qui vous mobilisent actuellement ?
À l’instar des autres pôles de compétitivité français, nous avons été mobilisés par la phase V des pôles qui va s’étendre de 2023 à 2026. Dans cette continuité, nous allons nous concentrer sur le développement de la fintech dans les régions, l’identification de sources de financement et des investissements en Europe pour nos fintechs. Malgré la baisse du nombre de levées de fonds, ce qui ralentit la croissance et le développement du secteur, nous restons optimistes et essayons de favoriser l’accès aux subventions, au CIR (Crédit Impôt Recherche), mais aussi les interactions entre les start-up, les investisseurs et les entreprises. En mai dernier, c’est notamment tenu notre événement Investment Day pour favoriser ces échanges et faciliter les investissements dans les différents segments de la fintech.
À l’échelle européenne, dans le cadre du projet Women Tech EU en soutien à l’entrepreneuriat féminin, Finance Innovation est en charge de l’attribution de subventions à des femmes porteurs de projet (10 à 70 000 euros) sur les deux prochaines années. Nous coordonnons aussi FINE, Fintech Investor Network Ecosystem, qui est un projet de mise en réseau, de formation et d’animation des écosystèmes d’investisseurs dans le secteur de la fintech en Europe.
On peut également citer l’initiative Train for ESG, un projet Erasmus autour de la formation des acteurs du monde de la finance et des entreprises aux sujets relatifs à l’ESG, la CSRD, les nouvelles réglementation dites Green… Ce programme a vocation à couvrir un large champ de thématiques et d’enjeux. L’idée est, d’ailleurs, ensuite de traduire ces contenus afin de les mettre à disposition de nos parties prenantes francophones. En parallèle, nous élaborons et mettons en place une formation pour devenir administrateur de fintech et qui devrait être disponible d’ici la fin de l’année 2024.
Le Label Finance Innovation
- Plus de 740 projets labellisés depuis 2009
- 2,8 milliards d’euros levés par les labellisés
- 83 % des labellisés sont toujours en activité 3 ans après leur labellisation
- 50 % des labellisés trouvent des clients directement grâce au Label
- Plus de 16 000 emplois directs créés
- 150 experts métiers indépendants pour challenger, sélectionner et accompagner les labellisés