Quand les arbres deviennent un actif financier tangible au service de la lutte contre le changement climatique
Avec Treesition, Daniel Dos Santos a développé un modèle qui donne la possibilité aux particuliers et aux entreprises de rentabiliser économiquement leur engagement écologique. Dans cet entretien, le CEO de cette jeune pousse française revient sur la genèse de son entreprise, son modèle, son offre et ses perspectives de développement.
La genèse de Treesition s’inscrit dans un constat personnel et la volonté d’apporter des solutions concrètes pour accélérer les transitions actuelles et lutter contre le réchauffement climatique. Qu’en est-il ?
Au cours des dernières années, la lutte contre le changement climatique a essentiellement été appréhendée au travers d’une approche punitive qui incite notamment à réduire ses déplacements en voiture ou à ne plus prendre l’avion pour voyager… Entrepreneur et consultant dans le domaine pharmaceutique, je me déplace beaucoup dans le cadre de ma vie professionnelle. Je suis également très sensible à ces enjeux. Avec Treesition, j’ai ainsi souhaité inverser cette tendance en transformant l’acte écologique en une action rentable et contribuer à mon niveau à la construction d’un monde plus durable !
Concrètement, qu’est-ce que Treesition ?
Au cœur de notre modèle, on retrouve les arbres. Treesition promeut en effet l’agroforesterie qui est largement plébiscitée par le GIEC, car il est prouvé que planter des arbres sur des parcelles agricoles permet de stabiliser les sols, d’améliorer les cycles de l’eau et de fixer le CO₂.
Néanmoins, dans ce domaine, Treesition franchit un cap supplémentaire en transformant ces arbres en produit financier. Concrètement, Treesition s’assure que les arbres arrivent à maturité et valorise leur bois en fin de cycle. À partir de là, une partie des revenus générés par la vente du bois est distribuée au propriétaire de l’arbre et l’agriculteur.
Treesition transforme donc les arbres en un produit financier tangible et donne la possibilité aux épargnants et investisseurs de suivre l’évolution de leur arbre, son impact écologique, son rendement… Cette transparence démontre par ailleurs qu’il ne s’agit pas d’une opération qui pourrait être assimilée à du greenwashing !
En parallèle, en contribuant au développement de l’agroforesterie en France, Treesition apporte aussi une alternative vertueuse afin de réduire les importations nationales de bois. La France important actuellement plus de 50 % de ses besoins en bois de l’étranger.
Enfin, Treesition propose des rendements pouvant atteindre jusqu’à 10 % par an, ainsi qu’une réelle contribution écologique et sociale aux défis que représente la transition écologique, environnementale et climatique.
Vous accordez une attention toute particulière au choix des arbres que vous plantez. Pourquoi ?
Au fil des millénaires, notre planète a traversé des périodes glaciaires, durant lesquelles il a fait plus froid, et interglaciaires, durant lesquelles la planète s’est plutôt réchauffée. Aujourd’hui, nous vivons une période interglaciaire avec un changement climatique irrémédiable. Pour faire face à cet enjeu, nous devons capitaliser sur les capacités de résilience de la planète, et plus particulièrement sur les arbres, qui sont à l’origine de la photosynthèse qui permet de transformer l’énergie du soleil en plantes, en fruits, en feuilles… En Europe, nous avons des arbres qui font une photosynthèse dite de type C3 et qui sont compatibles avec un environnement, où la température ne dépasse pas 25°. La hausse des températures due au changement climatique impacte donc fortement leur fonctionnement. Cette réalité se traduit notamment par une perte moyenne de 10 % des surfaces de nos forêts chaque année.
Fort de ces constats, notre choix, chez Treesition, s’est arrêté sur le Paulownia, un arbre qui fait de la photosynthèse de type C4 et qui peut se développer dans un environnement où la température est comprise entre 25 et 35°. Le Paulownia produit, par ailleurs, du bois de qualité en une décennie, alors que les cycles de l’économie du bois varient de 20 à 25 ans pour des arbres comme les peupliers, de 40 à 45 ans pour des arbres résineux du type Douglas, et s’étendent même sur 100 ans pour les chênes !
Quelles sont les autres caractéristiques du modèle de Treesition ?
Chaque personne qui acquiert un de nos arbres se voit remettre un certificat de propriété. Sur une durée maximale de 10 ans, Treesition prend en charge l’arbre pendant sa croissance. Depuis une plateforme dédiée, les propriétaires vont pouvoir suivre les performances de leur arbre : volume d’oxygène généré et de CO₂ absorbé, volume de bois, valeur sur le marché.… L’objectif est ainsi de rendre leur investissement le plus concret possible. Au-delà, cette approche vient aussi répondre à une demande sociétale forte alors que 76 % des Français veulent investir dans des projets porteurs de sens.
Le bois provenant des arbres est ensuite distribué sur le marché de la construction (planches, poutres…), de l’ameublement, et du bois énergie. Comme précédemment mentionné, les revenus sont répartis entre l’ensemble des parties prenantes. Dans ce schéma, Treesition est rémunéré sur une moyenne de 50 % de la valorisation du bois.
Avec ce système de redistribution de la valeur, Treesition crée une véritable boucle circulaire qui implique les agriculteurs qui vont générer des revenus complémentaires, mais également bénéficier des effets bénéfiques de l’agroforesterie notamment en termes de renforcement de la résilience de leurs terres ; les gestionnaires de patrimoine qui distribuent notre offre et qui vont combiner la dimension financière et RSE ; et, enfin, les entreprises et les Français qui veulent apporter leur pierre à l’édifice en matière de lutte contre le réchauffement climatique et de transition environnementale.
Justement, quels sont les investissements que vous proposez aux épargnants ?
Aujourd’hui, nous proposons trois offres autour du Paulownia :
- Serenitree, est un investissement basé sur la production du bois sur une durée de 10 ans. C’est aussi un investissement plus intéressant que le livret A avec un rendement à 3,4 % et un impact social et environnemental avéré. Cette option offre un juste équilibre entre le risque et le rendement ;
- Libertree est un investissement également basé sur la production de bois sur une durée de 10 ans, mais avec des perspectives de rendement et des risques plus élevés ;
- Treenergy est un investissement basé sur la production du bois énergie avec un rendement d’une durée de 5 ans.
À partir du mois d’octobre, nous lançons le pied de vigne avec un gain annuel lié à la production de raisins. Enfin, nous explorons de nouvelles pistes afin d’étoffer notre offre. Dans ce cadre, nous nous intéressons notamment à des arbres à bois « classiques », comme le peuplier, qui sont moins rentables économiquement, mais nécessaires au maintien de l’équilibre de nos écosystèmes.
Qu’en est-il au niveau des agriculteurs ?
Nous proposons trois offres aux agriculteurs. Ils peuvent mettre à disposition une parcelle agricole inexploitée en contrepartie d’un gain d’environ 20 000 euros par hectare et par décennie. Si en plus, ils assurent la surveillance de la parcelle, ils vont pouvoir générer un revenu de près de 30 000 euros par hectare et par décennie. Enfin, s’ils ont un rôle actif et contribuent au développement de la parcelle, des arbres et de notre modèle, ils peuvent obtenir jusqu’à 70 000 euros par hectare et par décennie.
Aujourd’hui, nous avons notamment un partenariat avec le vignoble Château Labastide Orliac, qui est fortement exposé aux effets du changement climatique et qui grâce à l’agroforesterie développe sa résilience… À date, nous avons une centaine de dossiers de nouveaux agriculteurs en cours d’étude et nous sommes en recherche active de nouveaux partenaires pour étendre les surfaces exploitables. D’ici fin 2025, notre objectif est de planter 150 000 arbres. À ce jour, nous en avons déjà planté 15 000.
Qu’en est-il de la distribution de vos offres ?
Nos solutions sont distribuées par des gestionnaires de patrimoine à qui nous reversons 10 % de l’acquisition. Nous travaillons notamment avec Shansa, Swiss Finance, Maximum Value… D’ici la fin de l’année, notre objectif est de nouer des partenariats avec des acteurs bancaires afin de distribuer nos solutions en marque blanche, notamment.
Aujourd’hui, comment vous projetez-vous sur le marché ?
Il y a une réelle demande pour des solutions d’investissement écologique comme les nôtres. Nous avons d’ores et déjà des partenariats avec de nombreuses entreprises qui souscrivent à nos offres pour compenser leur empreinte carbone, avoir un impact social et/ou développer leur marque employeur. C’est notamment le cas d’Oxygen, qui nous accompagne, par ailleurs, sur le volet relation de presse, ou encore de Promotion Group, un acteur de l’horlogerie de luxe. On peut aussi citer Ironbodyfit, qui propose une solution d’électrostimulation et qui, pour chaque séance d’essai réservée par un nouveau client, s’est engagé à planter 3 arbres !
En parallèle, le secteur bancaire commence à s’intéresser à nos offres. Enfin, au lancement de Treesition, en 2022, nous avions réalisé 10 000 euros de revenus, puis 108 000 euros en 2023. En 2024, nous avons déjà généré 800 000 euros. Notre développement s’inscrit donc dans une courbe d’hyper-croissance. Notre ambition est de maintenir cette dynamique sur ce marché qui va fortement croître sur les prochaines années. Notre principal défi est donc de passer à l’échelle, mais aussi de diversifier notre offre pour gagner en crédibilité et visibilité.