L’Institut Carnot MERS : des actions concrètes en faveur d’un secteur maritime plus durable et responsable
Jean-Marc Daniel, Directeur de l’Institut Carnot MERS, nous présente cet institut à la croisée de la recherche académique et des industriels. Il revient sur sa structure, son périmètre d’action, ses enjeux et les principaux chantiers qui le mobilisent aujourd’hui. Rencontre.
Présentez-nous l’institut Carnot MERS.
Les océans régulent le climat. Ils sont aussi une source d’emplois, de nourriture, d’énergie et sont également des voies de transport. Partout dans le monde, d’une manière ou d’une autre, nos sociétés adossent leur existence aux océans. Face à ces constats, nos activités économiques doivent être pensées de manière durable et dérisquées aussi bien pour l’Homme que les écosystèmes marins.
Dans cette démarche, la recherche scientifique est indispensable pour relever ce défi. En effet, la recherche et l’innovation ont vocation à nous donner les clés et les moyens pour garantir l’équilibre entre les activités économiques maritimes et la préservation des ressources marines.
L’Institut Carnot MERS, Marine Engineering Research for Smart, Sustainable and Safe Seas, œuvre en ce sens en capitalisant sur son réseau d’excellence de laboratoires et de chercheurs qui collaborent avec les entreprises, de toute taille, de la start-up au grand groupe. L’Institut Carnot MERS s’appuie, en effet, sur un partenariat unique entre l’Ifremer et l’École Centrale de Nantes, soutenu par l’Université Bretagne Ouest (UBO), l’Université Bretagne Sud (UBS) et le CNRS.
Son périmètre d’action s’inscrit dans la continuité de ceux des autres instituts Carnot qui ont vocation à stimuler des interactions entre le monde de la recherche et les entreprises en valorisant ou en bonifiant les travaux de recherche collaborative et contractuelles entre les industriels et le monde académique.
En ce sens, notre objectif est de catalyser l’excellence de la recherche pour accompagner les entreprises de l’industrie maritime dans les grands défis de demain et apporter des solutions aux enjeux sociétaux actuels. Pour y répondre, nous nous appuyons sur 9 unités de recherche présentes sur l’ensemble des façades maritimes françaises.
Quel est le périmètre d’action de votre institut ?
Nous travaillons sur une multitude de sujets, tous reliés au domaine de l’économie bleue, de la compréhension des conditions océaniques à l’optimisation des systèmes énergétiques marins en passant par la pêche et l’aquaculture, ou encore la décarbonation des transports maritimes.
Dans cette démarche, nous avons identifié trois axes prioritaires. Tout d’abord, la durabilité. Nous travaillons notamment sur la résistance des structures en mer, les matériaux innovants, la réduction de l’empreinte environnementale et carbone en mer et dans les océans… Le second axe vise à développer une connaissance approfondie des fonds marins afin de dérisquer les projets marins ou en mer. En effet, le milieu marin reste un environnement agressif et dangereux, qu’il faut bien connaître pour pouvoir développer des activités et en assurer la pérennité. Enfin, le troisième axe tourne autour de la transformation digitale de l’industrie de la mer et de l’économie bleue. Cela passe par la numérisation des infrastructures, la modélisation, la data, le recours à l’IA… Aujourd’hui, l’ambition de notre institut est de regrouper l’ensemble de ses forces, afin d’être en mesure de couvrir l’ensemble de ces sujets et problématiques structurant pour les entreprises.
Dans cette continuité, quels sont les défis que l’Institut Carnot MERS cherche à appréhender au travers de ses recherches et de ses partenariats avec les industriels ?
Nous travaillons bien évidemment sur la réduction de l’impact environnemental des structures marines. Dans une logique de durabilité, nous avons des projets autour du développement de matériaux durables et résistants et la sécurisation des données maritimes. Ces initiatives visent à favoriser une meilleure inclusion de nos sociétés dans les écosystèmes marins, tout en réduisant les coûts et l’empreinte environnementale des activités maritimes.
Au-delà, la connaissance des écosystèmes marins reste un fil conducteur de nos recherches. C’est, en effet, une brique essentielle, qui doit permettre aux industriels de garantir le bon fonctionnement de leurs installations. Pour optimiser le coût de l’observation, nous misons sur le déploiement de robots autonomes en mer, ce qui permet, d’ailleurs, d’éviter d’envoyer des bateaux en mer, réduisant, in fine, notre impact sur les océans et la mer. Les travaux autour de la robotisation sont notamment portés par un laboratoire qui regroupe l’École Centrale de Nantes, le CNRS, l’université de Nantes, ainsi qu’un certain nombre de laboratoires d’Ifremer, dont l’unité Recherche et Développement Technologique.
En parallèle, nous travaillons sur la compréhension et la formulation de nouveaux matériaux à déployer en mer avec un focus sur le béton et les matériaux composites… Dans cette démarche, nous analysons la durabilité des matériaux, leurs caractéristiques mécaniques face aux sollicitations particulières du milieu marin, le vieillissement des matériaux, sous l’effet de la chimie de l’eau de mer et la composition biologique du milieu marin…
En capitalisant sur les compétences d’Ifremer, de l’École Centrale de Nantes et de l’Université de Nantes, nous travaillons aussi sur les énergies marines renouvelables. L’accélération de leur déploiement dans les eaux françaises ouvre de nouvelles pistes de recherche pour notre institut.
Vous avez, par ailleurs, créé le réseau des Carnots pour l’Économie Bleue. Dites-nous en plus.
En miroir de la filière des industriels de la mer, rattachée au ministère de l’Économie, au sein du réseau des Instituts Carnot, nous avons souhaité créer une alliance des Carnot pour l’économie bleue. L’institut Carnot MERS est le chef de file de cette démarche et s’appuie sur d’autres instituts Carnot qui souhaitent gagner en visibilité au niveau de la filière de la mer.
On peut notamment citer l’Institut Carnot ARTS, incluant 23 laboratoires de recherche et d’innovation portés par 22 établissements dont l’ENSTA ou encore l’Université de Bretagne Sud et qui mènent de nombreuses actions en lien avec les défis que j’ai précédemment mentionnés, dont ceux relatifs aux matériaux.
On retrouve aussi le Carnot Énergie du Futur qui travaille notamment sur les énergies marines renouvelables, ainsi que le Carnot Énergie & Système de Propulsion basé dans la région Normandie… Ensemble, nous travaillons sur des sujets relevant de l’industrie de la mer, des activités maritimes, de la décarbonation du secteur… L’idée est aussi d’être identifié comme un point d’accès privilégié pour les industriels de la filière mer en France.
Qu’en est-il de la relabellisation du Carnot MERS et de sa nouvelle offre de service ?
L’idée de cette démarche est de s’assurer que l’offre du Carnot MERS en termes de recherche contractuelle auprès des entreprises est toujours pertinente et en cohérence avec leurs besoins et leurs attentes. Avec le soutien d’un cabinet extérieur, nous avons réévalué nos ambitions définies il y a maintenant 5 ans. Nous avons été confortés dans la pertinence des directions que nous nous étions fixées et avons identifié les sujets qui nécessitent une montée en puissance. Parmi ceux-ci, on retrouve la modélisation numérique de l’océan et l’intelligence artificielle appliquée aux questions de représentation de l’océan et des infrastructures.
Quelles sont vos perspectives ?
Nous sommes un acteur original dans le monde de l’ingénierie. Nous avons la capacité à proposer des projets de recherche contractuelle à la croisée de l’innovation technologique et des notions d’impact, mais aussi à mobiliser les meilleures compétences et équipes. Au sein du réseau des Carnot, nous apportons des compétences complémentaires qui viennent compléter celles des autres instituts, dans une logique de mutualisation et de valorisation vertueuse.
Nous sommes déterminés à rester à l’avant-garde de l’innovation maritime et à relever les défis complexes qui attendent le monde maritime. Grâce à nos partenariats stratégiques et à notre expertise diversifiée, ainsi que nos projets de recherche, nous sommes convaincus de pouvoir contribuer significativement à un secteur maritime plus durable et responsable.