Cérémonial d’installation par le ministre camerounais de l’Énergie, M. Gaston Eloundou Essomba.

Vers un avenir énergétique plus durable au Cameroun avec KHPC

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°803 Mars 2025
Par Christophe AVOGNON

Kikot-Mbebe Hydro Power Com­pa­ny (KHPC) est un acteur clé de la tran­si­tion éner­gé­tique au Came­roun. Grâce à son pro­jet ambi­tieux de cen­trale hydro­élec­trique de Kikot-Mbebe sur le fleuve Sana­ga, KHPC s’engage à répondre aux défis éner­gé­tiques du pays et de la sous-région. Chris­tophe Avo­gnon, Direc­teur Géné­ral de l’entreprise, nous par­tage sa vision.

Vous avez récemment été désigné à la tête de KHPC, avez-vous déjà pris vos marques ?

Depuis ma prise de fonc­tion en juin 2024, j’ai plei­ne­ment sai­si la dimen­sion de ce pro­jet ambi­tieux, lan­cé en 2019, ain­si que l’ampleur du tra­vail entre­pris par l’ensemble des équipes impli­quées. Le pro­jet Kikot-Mbebe est une ini­tia­tive majeure qui doit répondre aux besoins crois­sants du pays en éner­gie. Notre prio­ri­té, c’est la mise en ser­vice au plus tôt de cette nou­velle cen­trale hydro­élec­trique, tout en res­pec­tant des normes strictes de sécu­ri­té et de dura­bi­li­té. Pour cela, le pro­jet mobi­lise une équipe d’une cen­taine de per­sonnes en charge du déve­lop­pe­ment, dont une équipe d’ingénierie por­tée par EDF avec une assis­tance sur les volets tech­nique, juri­dique, finan­cier et contrac­tuel, ain­si que la par­ti­ci­pa­tion d’institutions gou­ver­ne­men­tales camerounaises.

“Notre priorité, c’est la mise en service au plus tôt de cette nouvelle centrale hydroélectrique, tout en respectant des normes strictes de sécurité et de durabilité.”

Pouvez-vous nous décrire votre parcours et en quoi consiste votre métier ?

Mon par­cours est plu­tôt varié. J’ai d’abord com­men­cé comme ensei­gnant en mathé­ma­tiques, phy­sique et tech­no­lo­gie avant d’intégrer EDF en 1992. Depuis, j’ai occu­pé divers postes allant des acti­vi­tés opé­ra­tion­nelles à l’ingénierie, de même que des fonc­tions stra­té­giques au sein du Groupe EDF. Mon exper­tise couvre notam­ment l’hydrologie, l’estimation des coûts de pro­jets, le déve­lop­pe­ment d’aménagements hydro­élec­triques, la ges­tion opé­ra­tion­nelle d’usines hydro­élec­triques et la pla­ni­fi­ca­tion éner­gé­tique. Aujourd’hui, en tant que Direc­teur Géné­ral de KHPC, mon rôle est de super­vi­ser toutes les étapes du pro­jet Kikot-Mbebe, notam­ment la coor­di­na­tion des équipes, la ges­tion des par­ties pre­nantes et la pré­pa­ra­tion des finan­ce­ments. Je dois garan­tir que le pro­jet res­pec­te­ra les délais, les bud­gets et les normes de qua­li­té attendues.

Pouvez-vous nous parler du projet Kikot-Mbebe, votre grand projet hydroélectrique en cours sur le fleuve Sanaga au Cameroun ?

Le pro­jet Kikot-Mbebe vise à déve­lop­per un amé­na­ge­ment hydro­élec­trique de 500 MW sur le fleuve Sana­ga, ce qui en fera l’usine la plus puis­sante du Came­roun. La mise en ser­vice est pré­vue au début des années 2030. L’ouvrage sera exploi­té pen­dant 35 ans avant d’être res­ti­tué à l’État came­rou­nais, mais il est conçu afin de pou­voir deve­nir cen­te­naire, voire plus. Nous avons déjà enta­mé des études envi­ron­ne­men­tales et sociales, ain­si que l’avant-projet tech­nique détaillé. Dans le même temps, nous pré­pa­rons les appels d’offres inter­na­tio­naux pour la construc­tion. Ce pro­jet s’appuie sur un trans­fert de com­pé­tences impor­tant, le Came­roun dis­po­sant déjà d’une solide expé­rience dans la ges­tion d’infrastructures hydroélectriques.

Quels sont les grands enjeux dans le domaine de l’hydroélectricité au Cameroun ?

Le prin­ci­pal enjeu, c’est de répondre à une demande éner­gé­tique en constante aug­men­ta­tion, tout en rédui­sant la dépen­dance aux com­bus­tibles fos­siles. Cela implique de ren­for­cer non seule­ment la pro­duc­tion, mais aus­si les sys­tèmes de trans­port et de dis­tri­bu­tion. Le gou­ver­ne­ment came­rou­nais a mis en place une stra­té­gie ambi­tieuse pour atteindre un mix à plus de 85 % d’énergie renou­ve­lable, prin­ci­pa­le­ment grâce à l’hydroélectricité. L’autre défi, c’est d’assurer une ges­tion coor­don­née des infra­struc­tures hydro­élec­triques exis­tantes sur la Sana­ga, afin d’en maxi­mi­ser l’efficacité et d’optimiser leur apport glo­bal au sys­tème énergétique.

Comment KHPC entend-elle contribuer au développement de l’hydroélectricité à l’échelle sous-régionale ?

KHPC joue un rôle cru­cial en déve­lop­pant un pro­jet comme Kikot-Mbebe, qui non seule­ment aug­mente la capa­ci­té éner­gé­tique du Came­roun, mais ren­force aus­si le posi­tion­ne­ment du pays comme acteur clé dans la sous-région. Ce pro­jet ser­vi­ra de modèle à d’autres chan­tiers en Afrique cen­trale, en démon­trant com­ment des par­te­na­riats public-pri­vé peuvent cata­ly­ser des ini­tia­tives d’infrastructure d’envergure. Nous pré­voyons aus­si d’utiliser les com­pé­tences acquises dans le cadre de ce pro­jet pour explo­rer d’autres pistes dans le domaine hydro­élec­trique au Came­roun, peut-être même aus­si dans la sous-région.

Visite des activités sur le site du projet.
Visite des acti­vi­tés sur le site du projet.

Quels sont les grands défis à relever pour KHPC ?

Comme tous les grands pro­jets de cette dimen­sion, le res­pect des délais et des bud­gets est un défi majeur, de même que la garan­tie de stan­dards éle­vés de qua­li­té et de sécu­ri­té. La com­plexi­té tech­nique et finan­cière du pro­jet, en par­ti­cu­lier les appels d’offres inter­na­tio­naux et le bou­clage finan­cier, demande une ges­tion rigou­reuse dans sa réa­li­sa­tion. Nous devons éga­le­ment main­te­nir l’adhésion des com­mu­nau­tés locales et des par­ties pre­nantes, en adop­tant une approche trans­pa­rente et inclu­sive dès les pre­mières phases du pro­jet. Cela implique de prendre en compte les enjeux sociaux et envi­ron­ne­men­taux pour assu­rer une accep­ta­bi­li­té durable.

Quelles sont les principales innovations technologiques qui permettent d’améliorer la production et l’efficacité des centrales hydroélectriques ?

Bien que l’hydroélectricité soit une tech­no­lo­gie mature, elle béné­fi­cie de nom­breuses avan­cées dans les domaines du numé­rique et de l’informatique embar­quée (cap­teurs, IoT, etc.). Nous pour­rons dans une cer­taine mesure uti­li­ser par exemple des outils de télé­sur­veillance et de télé-exploi­ta­tion, qui opti­misent la main­te­nance et la ges­tion proac­tive des infra­struc­tures. Nous inté­grons éga­le­ment les retours d’expérience d’autres pro­jets, comme le bar­rage de Nach­ti­gal, dans l’optique d’améliorer la concep­tion et réduire les coûts. Les entre­prises de construc­tion sont invi­tées à pro­po­ser des inno­va­tions lors des appels d’offres pour ren­for­cer l’efficacité éner­gé­tique et réduire les délais et les coûts de construction.

Voyez-vous l’hydroélectricité comme un complément aux énergies renouvelables intermittentes (solaire, éolien) ou comme un pilier central ?

L’hydroélectricité est sans aucun doute le pilier cen­tral de la stra­té­gie éner­gé­tique du Came­roun, avec une ambi­tion de 85 % d’hydroélectricité dans le mix éner­gé­tique. Elle est com­plé­tée par d’autres éner­gies renou­ve­lables, notam­ment le solaire. L’éolien reste limi­té en rai­son du régime des vents moins favo­rable qu’ailleurs, et un com­plé­ment ther­mique sera tou­jours néces­saire pour gérer les fluc­tua­tions de l’équilibre entre l’offre et la demande. L’objectif est de mini­mi­ser l’usage des com­bus­tibles fos­siles afin de maxi­mi­ser l’utilisation des res­sources renouvelables. 

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