Du bois-énergie pour les pays du Sud
La difficile équation du développement durable
Il est prévu que la population mondiale, qui comptait six milliards d’habitants en l’an 2000, augmentera de 50 % pour atteindre les neuf milliards d’habitants en 2050, l’ampleur d’une telle augmentation étant sans précédent dans l’histoire de l’humanité. En outre, 90 % de cette augmentation devrait être localisée dans les pays du Sud, où les problèmes de développement sont les plus prégnants, avec de surcroît un phénomène de concentration des populations dans les grandes villes.
Les disparités de développement ont donc de grandes chances de subsister, de même que l’accès inégal des habitants de la planète à l’énergie. Ainsi, alors que la consommation de carbone fossile d’un habitant des États-Unis d’Amérique est actuellement de l’ordre de 5 tonnes par an, toutes énergies confondues, elle n’est en moyenne que de 0,5 t/an, soit dix fois moins, dans un ensemble regroupant la Chine et l’Inde et qui est presque dix fois plus important en nombre d’habitants. La plupart des experts s’accordent cependant à penser que la consommation énergétique des pays du Sud devrait croître de façon considérable au cours des 50 prochaines années, l’irruption rapide et toute récente de la Chine sur le marché pétrolier mondial n’en étant que l’exemple le plus frappant.
Pour leur part, les diverses pressions (déforestation, surexploitation…) qui s’exercent sur les ressources forestières des pays du Sud et provoquent l’inquiétude des opinions publiques des pays développés, comme d’ailleurs de la plupart des grandes instances internationales (Nations Unies, Banque Mondiale…), devraient se maintenir voire même s’amplifier tout au long du XXIe siècle.
N’oublions pas cependant que la » crise du bois de feu « , annoncée1 à la Conférence des Nations Unies sur les sources d’énergie nouvelles et renouvelables (Nairobi, 1981) et prévoyant des ruptures ou de graves problèmes d’approvisionnement, n’est finalement jamais arrivée. En effet, au-delà du bois de feu provenant des prélèvements effectués directement en forêt, la grande diversité des origines des combustibles ligneux (bois morts, rémanents, arbres de parcs agroforestiers, boisements villageois, résidus d’exploitation forestière et de transformation du bois, sous-produits des activités de conversion des terres…) explique vraisemblablement cette situation.
Le bois-énergie, une ressource vitale pour les pays du Sud
Rappelons tout d’abord, non seulement que l’énergie consommée dans le monde provient pour 80 % des combustibles fossiles, contre un peu plus de 10 % de la biomasse, mais aussi que la part du pétrole devrait diminuer très sensiblement à l’horizon 2050.
Dans un tel contexte et dans ce compte énergétique à rebours, les populations rurales des pays tropicaux ont toujours insuffisamment accès à l’électricité ou à la force motrice nécessaires au développement de leurs activités, une grande proportion de l’énergie qu’elles utilisent, à savoir essentiellement du bois de feu, étant destinée à des usages domestiques et notamment à la cuisson des aliments. De plus, l’importance des flux migratoires, entre le monde rural et les villes, de même que la forte croissance démographique des pays du Sud, notamment celle de leurs populations urbaines, exacerbent les déséquilibres entre l’offre et la demande en ressources énergétiques.
Certes, le migrant se déplace dans un premier temps avec ses coutumes, mais les exigences de la vie urbaine et les besoins de modernité font rapidement basculer de nombreuses villes du Sud du bois de feu au charbon de bois, seule la faiblesse des revenus des ménages freinant le passage à des combustibles tels que le gaz butane2 ou le pétrole lampant. La demande des populations urbaines en bois-énergie, en tant que combustible domestique de base, peut donc être considérée comme incompressible. D’ores et déjà, les combustibles issus de la biomasse, dont le bois de feu et le charbon de bois, représentent jusqu’à 90 % des besoins énergétiques des ménages en Afrique subsaharienne, 70 % dans la Chine rurale et entre 30 et 90 % de ces besoins en Amérique latine.
Il est d’ailleurs vraisemblable qu’une grande partie des 2,8 milliards de personnes qui gagnent moins de 2 $US par jour et qui, de ce fait, sont soit à l’écart de l’économie, soit n’y participent que faiblement, dépende largement de l’emploi de la biomasse comme source d’énergie. C’est bien sûr le cas en ce qui concerne les consommations de proximité en bois de feu, cette activité étant très largement sous-tendue, en milieu rural, par les femmes qui passent plusieurs heures par jour à la corvée de bois. C’est également le cas des filières bois-énergie, qui incluent la carbonisation, le transport et la vente3 de charbon de bois, et qui procurent, dans un cadre plus ou moins informel, des revenus directs significatifs, tant dans les villes (commerces) que dans les campagnes (bûcherons4, charbonniers).
Le bois-énergie dans la production de bois : une grande diversité géographique de situations
À l’échelle mondiale, il est intéressant de noter que c’est un peu plus de la moitié de la production de bois qui sert à produire de l’énergie, la différence étant essentiellement destinée aux utilisations de bois d’œuvre et de bois de trituration. La répartition entre ces différents usages apparaît toutefois très contrastée d’un pays à l’autre, voire d’un continent à l’autre, comme le montre la figure ci-dessus.
Ainsi, excepté l’Afrique du Sud, la majorité des pays africains se caractérise par la prédominance de l’utilisation à des fins énergétiques des bois. Il en est de même du continent asiatique, à l’exception toutefois du Japon et, dans une moindre mesure, de la Chine, d’une part, de l’Amérique centrale, d’autre part. L’Amérique du Sud oscille, quant à elle, entre un modèle de type » pays développé « , à l’image du Chili, et un modèle de type » pays en développement « , à l’image de la Bolivie et du Pérou, le Brésil, pays – continent aux multiples facettes, combinant pour sa part ces différents modèles.
Le bois-énergie représente donc encore près des trois quarts de la consommation totale des bois dans les pays en développement, ce qui constitue une caractéristique majeure d’un grand nombre de pays tropicaux. En revanche, dans les pays développés, la part du bois-énergie ne représente que moins du quart de la consommation totale des bois. Dans certains pays industrialisés toutefois, cette part a tendance à croître de nouveau, à l’instar des pays scandinaves qui ont mis en place des politiques énergétiques volontaristes de promotion de leur biomasse.
L’émergence de solutions locales prônant une gestion viable des ressources forestières à des fins énergétiques
Le principal écueil à éviter est celui de l’exploitation prédatrice des ressources, non organisée dans l’espace et dans le temps, ne prenant pas en compte l’autoécologie et la résilience naturelle des espèces forestières exploitées, s’affranchissant des modes d’organisation des communautés locales et ignorant le cadre juridique réglant ce type d’activités. Cette image n’a malheureusement rien de théorique puisqu’elle correspond à un type de comportement bien connu, notamment dans certains pays du Sud où le foncier public prédomine et où l’accès aux ressources forestières se fait de manière incontrôlée.
Il est donc fondamental de mettre en place des systèmes viables de gestion des ressources forestières qui intègrent la pluralité des acteurs et des attentes, de même que les caractéristiques et principaux paramètres de pilotage des écosystèmes forestiers, mais qui sachent également orienter, dans l’espace et dans le temps, les dynamiques d’exploitation des ressources ligneuses. De tels systèmes doivent donc non seulement assurer durablement et au moindre coût économique et social l’approvisionnement des consommateurs urbains en bois-énergie, mais aussi mettre effectivement en place, en zone rurale, des modes de gestion durable des ressources forestières ainsi exploitées.
Divers pays du Sud mettent par exemple en place des systèmes de gestion de leurs ressources forestières qui se veulent écologiquement durables, socialement équitables et économiquement viables.
Ainsi, en zone sahélienne, sur la base des travaux menés par le Cirad et ses partenaires, la politique adoptée dans ce domaine par le Niger mérite une attention particulière. Rappelons que ce pays comptait 2 millions d’habitants en 1950, en compte actuellement 11 millions et devrait atteindre 50 millions d’habitants à l’horizon 2050. Dès 1989, c’est-à-dire depuis maintenant quinze ans, le Niger s’est engagé dans une politique de développement forestier, baptisée Stratégie énergie domestique, qui agit tout d’abord sur l’offre et la demande de combustibles domestiques, sur les économies d’énergie, les énergies de substitution et la diversification énergétique, ainsi que sur les améliorations à apporter aux divers procédés. Elle combine ensuite et met en cohérence ses interventions à différents niveaux spatiaux, à savoir celui du bassin d’approvisionnement d’une grande ville, à l’image du Schéma directeur d’approvisionnement (SDA) de la capitale, Niamey, et celui de la gestion locale des ressources forestières en milieu rural, avec la mise en place, au niveau des communautés villageoises et en accord avec l’administration forestière, de forêts villageoises et de » marchés ruraux » de bois-énergie. Elle agit enfin, grâce à divers outils réglementaires et incitations économiques, notamment par le biais de la fiscalité forestière, sur la diversité des acteurs économiques concernés.
Dans ce processus à pas de temps long, qui a pu accumuler et intégrer, positivement et progressivement, les diverses décisions et améliorations qui lui ont été apportées, il est intéressant de relever les réalisations ainsi accomplies :
- les communautés locales ont été reconnues comme interlocuteurs légitimes de l’administration nigérienne ;
- un contrat type de transfert de gestion des ressources forestières aux communautés locales a été élaboré ;
- les droits exclusifs de chaque communauté concernée sur les ressources de leur terroir ont été reconnus ;
- un cadre législatif et fiscal incitatif pour les communautés locales et les autres opérateurs économiques (bûcherons, transporteurs…) a été mis en place ;
- 250 marchés ruraux de bois-énergie ont pu être mis en place, correspondant à une surface totale de forêts sous aménagement simplifié de 700 000 ha ;
- les besoins en bois-énergie de la ville de Niamey ont pu être couverts à hauteur de 20 %, en 2002, par l’approvisionnement provenant des marchés ruraux, le solde étant le fait du système d’exploitation incontrôlée.
L’exemple nigérien est déjà en cours de transposition au Mali et il n’est pas invraisemblable qu’il finisse par provoquer l’intérêt des administrations forestières et environnementales du Tchad et du Burkina Faso.
De même, dans l’océan Indien, le cas de l’approvisionnement énergétique de Madagascar en bois-énergie mérite d’être cité. La majorité des villes de Madagascar, dont Antananarivo, Fianarantsoa et Antsirabé, pour ne citer que les plus importantes, sont en effet approvisionnées à plus de 90 % en charbon de bois provenant de plantations forestières. Il s’agit en l’occurrence et pour l’essentiel de plantations forestières paysannes qui se développent dans la Grande Île depuis plus d’un siècle, sans incitation administrative, ni projet, ni bailleurs de fonds. Un souci de sécurisation foncière ainsi que l’incitation économique apportée au marché du bois-énergie ont suffi à initier et à conforter un tel système d’exploitation, qui est non seulement en vigueur aujourd’hui mais qui continue également sa phase d’expansion spatiale. Ce sont ainsi près de 150 000 ha de plantations d’eucalyptus, gérées avec des rotations très courtes, comprises généralement entre deux et cinq ans, qui sont directement gérés par des paysans malgaches et exploités en vue de la production de charbon de bois. Dès lors, les paysans malgaches, souvent abusivement accusés de déforestation dans la Grande Île, ne pourraient-ils pas plutôt être présentés comme » des paysans de l’arbre » ?
Enfin, l’exemple très différent du Brésil, compte tenu de son positionnement, très original et très volontariste, dans l’utilisation énergétique de la biomasse, mérite également d’être mentionné. Ce pays émergent est en effet très engagé dans la production et la consommation de biocarburants, de même que dans l’utilisation du charbon de bois, dans le secteur de la sidérurgie, comme réducteur et en substitution au coke.
L’expérience brésilienne en matière de biocarburants, sans être exempte de défaut, est exceptionnelle à bien des titres. Ainsi, le plan » Pro-alcool « , créé en 1975, a rendu obligatoire l’incorporation de 12 % d’alcool éthylique anhydre dans l’essence, cette proportion ayant depuis été portée à 25 %. Le développement de moteurs fonctionnant avec 100 % d’alcool, suite au second choc pétrolier de 1979, fut un tel succès qu’à la fin des années quatre-vingt les voitures fonctionnant à l’alcool représentaient 90 % de la flotte du pays. Toutefois, après une diminution amorcée en 1993 des subventions correspondantes, ce sont des véhicules bicombustibles, c’est-à-dire susceptibles de fonctionner indifféremment à l’essence, à l’alcool ou au mélange de ces deux constituants, qui se sont substitués progressivement aux véhicules fonctionnant à l’alcool.
Dans le secteur brésilien de la sidérurgie également, après une large dépendance de ses approvisionnements en charbon de bois à partir des ressources tirées des forêts naturelles, ce sont actuellement des millions d’hectares de plantations d’eucalyptus qui y sont cultivés à des fins énergétiques, ce phénomène étant unique au monde.
Véritable précurseur, le Brésil explore donc très activement les stratégies possibles de production et de conversion thermochimique de sa biomasse, itinéraires technico-économiques qui pourraient faire école dans bien d’autres pays du Sud au cours du XXIe siècle.
D’une énergie domestique traditionnelle à une énergie rurale moderne
La protection de l’environnement et le développement économique en Afrique passent assez largement par l’intensification de l’agriculture. Dès lors, l’accès à un approvisionnement énergétique fiable et compétitif devient l’élément incontournable du développement d’activités agricoles et artisanales pour la mise en marché des produits. Il est donc indispensable, en sus des efforts qui seront inévitablement accomplis pour assurer l’approvisionnement énergétique de leurs grandes villes, de bien identifier et de promouvoir les technologies les plus mûres et les mieux adaptées à la production décentralisée d’énergie en milieu rural. Les sources d’approvisionnement correspondantes peuvent alors provenir soit de plantations forestières à croissance rapide installées à cet effet, soit de déchets et de sous-produits des filières forestières ou agricoles déjà en place.
À titre d’exemple, en zone tropicale, c’est une proportion pouvant atteindre 75 % du volume de bois sur pied des arbres exploités qui se retrouve d’une part en forêt, sous la forme de déchets d’exploitation, d’autre part dans les usines de première et deuxième transformation, sous la forme de sous-produits. Ce pourcentage de déchets est d’ailleurs d’autant plus élevé que le tissu industriel est faible et que le secteur de la seconde transformation est peu développé. De plus, le manque d’informations sur la disponibilité, sur l’existence et sur l’efficacité des technologies correspondantes constitue le principal frein à la dissémination des solutions de production d’énergie à base de déchets, qu’il s’agisse de l’utilisation de la cogénération par combustion, de turbines ou de moteurs à vapeur, de production de vapeur en aval d’une turbine ou d’un moteur, voire encore de production de climatisation à partir d’un excédent de vapeur5.
De telles approches sont d’ailleurs en cours de mise en place par des sociétés forestières situées dans des zones enclavées du bassin du Congo. Elles mériteraient d’être testées dans des bourgs ruraux, afin d’utiliser comme vecteur du développement en milieu rural l’électricité produite grâce à un procédé de cogénération. Cela suppose le développement de nombreux partenariats, entre le secteur public et le secteur privé, entre les pays du Nord, détenteurs de technologies, et les pays du Sud, détenteurs d’importants gisements de biomasse, qu’ils soient actuels ou potentiels, à l’image des initiatives de partenariat » public-privé » prônées lors du récent Sommet mondial pour le développement durable de Johannesburg (2002).
Une contribution attendue à la réduction des émissions des gaz à effet de serre
La mise en place progressive des marchés de droit d’émissions et surtout celle potentielle du Mécanisme de développement propre (MDP), en vue de lutter contre les émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement climatique, sont à même de sensiblement infléchir bien des stratégies énergétiques des pays du Sud mais aussi l’intérêt des bailleurs de fonds et des grandes compagnies privées pour ces pays.
Certes, face au renchérissement progressif des ressources fossiles, par nature épuisables, et au défi planétaire que constitue l’effet de serre, la maîtrise des consommations énergétiques devrait représenter le levier d’action le plus significatif. L’installation de nouvelles plantations forestières est aussi à même d’augmenter la séquestration nette de carbone, à condition qu’elles soient gérées durablement, les écosystèmes forestiers ayant en effet une capacité limitée à stocker le carbone atmosphérique. De manière complémentaire, l’utilisation accrue du bois à des fins énergétiques contribuera à réduire les dépendances à l’égard des combustibles fossiles et les émissions qui en découlent. On estime à ce propos que les émissions nettes de carbone dérivant d’une unité d’électricité produite à partir de la bioénergie, dont le bois, sont de 10 à 20 fois inférieures à celles dérivant de l’électricité produite à partir de combustibles fossiles. C’est dire toute l’importance qu’il convient d’accorder aux technologies permettant le remplacement des énergies fossiles par des sources énergétiques à caractère renouvelable.
Pour l’heure, l’adoption du protocole de Kyoto défini en 1997 et, par voie de conséquence, l’implication des pays du Sud dans le mécanisme de développement propre qu’il instaurera dès sa mise en œuvre sont suspendus à la signature de la Russie. Toujours est-il que l’Union européenne, sans attendre les progrès de la diplomatie internationale, s’est d’ores et déjà engagée, dès 2004, dans une politique volontariste en la matière, en adressant des signaux clairs à son industrie, pays par pays, et en mettant en place un marché de permis d’émissions, instrument qui devrait de facto contribuer à la limitation des gaz à effet de serre.
De l’utilisation énergétique rationnelle des ressources forestières au développement durable
Les produits forestiers constituent un élément important du développement des pays du Sud. Leur exploitation rationnelle contribue en effet à la lutte contre la pauvreté et à l’amélioration des conditions de vie des populations, notamment des femmes. Toutefois, la tendance habituelle du développement est, sur le plan énergétique, à la diminution progressive des usages traditionnels de la biomasse, au profit de combustibles fossiles. Or, une telle évolution prive le milieu rural de revenus, augmente les déséquilibres sociaux et économiques entre les villes et les campagnes, diminue enfin la valeur patrimoniale des espaces forestiers et accroît de ce fait le risque de voir les populations se désintéresser de leur gestion durable, lui préférant des solutions plus radicales comme la conversion des terres concernées à des fins agricoles. Il convient donc d’encourager et de promouvoir l’exploitation et la gestion rationnelles des forêts, d’accroître la valeur du bois sur pied et d’assurer une transition maîtrisée au profit des usages modernes de la biomasse.
Au-delà donc des nombreux débats, tant nationaux qu’internationaux, qui traitent de la lutte contre la pauvreté, de l’insuffisance de l’aide publique au développement, de la marginalisation économique et sociale du continent africain, des relations tendues entre démographie, développement et environnement, il apparaît nécessaire que les pays du Sud saisissent le caractère stratégique de leurs ressources forestières, qu’il s’agisse de les valoriser sous forme de matériau (bois d’œuvre, bois d’industrie, bois de service…), d’en tirer des produits diversifiés (fruits, condiments, gommes, molécules, substances naturelles…), que ce soit pour la santé ou pour l’alimentation, mais aussi de les utiliser de manière rationnelle et durable à des fins énergétiques. Il en va de l’intérêt même des pays concernés, assez rarement détenteurs de combustibles fossiles mais possédant plus généralement d’assez importantes ressources naturelles renouvelables. C’est également une occasion privilégiée de renforcer les partenariats Nord-Sud, à la fois dans le cadre de la lutte contre la pauvreté et des objectifs du millénaire définis par les Nations Unies, et dans celui de la lutte contre le réchauffement climatique.
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1. Voir notamment :
– Eckholm E., 1976 ; La terre sans arbres, la destruction des sols à l’échelle mondiale ; Robert Laffont, 329 p. ; Paris.
– Eckholm E., Foley G., Barnard G., Timberlake L., 1984 ; Fuelwood : the energy crisis that won’t go away ; Earthcan Publications ; 107 p. ; London.
2. Certains pays, à l’image du Maroc, accordent des incitations pour développer l’utilisation du gaz butane, ce qui constitue un réel effet d’aubaine pour les classes moyennes.
3. Au profit essentiellement des populations urbaines et périurbaines.
4. Au Mali, deux tiers des bûcherons et des charbonniers sont des femmes.
5. Dans des conditions économiques diversifiées, la production d’électricité à partir de plantations privées a d’ores et déjà démontré sa faisabilité, tant technique qu’économique, à l’image des exemples suivants :
1) 5 000 ha de plantations d’eucalyptus au Nicaragua permettant d’alimenter une centrale mixte » bagasse-bois » de 15 MWe, avec revente des surplus sur le réseau ;
2) installation en Malaisie (État du Sabah) de 10 MWe, alimentée en partie à partir de plantations d’acacias pour l’autoproduction d’électricité dans un complexe d’industries du bois.
Jacques VALEIX (73),
directeur du département Forêts du Cirad,
Alain BERTRAND,
socioéconomiste de l’unité propre de recherche “ Usages locaux
des ressources forestières et politiques publiques ” du Cirad,
Philippe GIRARD,
chef de l’unité propre de recherche “ Biomasse-énergie ” du Cirad