Information et consentement en médecine
De la qualité de l’information dépend la validité du consentement du patient. Obligation déontologique et légale (loi dite de démocratie sanitaire du 4 mars 2002) fondée sur le principe de la dignité et de l’autonomie de la personne, l’information loyale, claire et appropriée est une exigence fondamentale du contrat de soins et de sécurité » toute personne prend, avec le personnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, des décisions concernant sa santé » art. 111–4. Plus simplement Hippocrate disait : » Le malade doit s’opposer à la maladie avec le médecin. »
Qui doit informer ? tout prescripteur et tout exécutant d’un acte médical ou chirurgical en sachant que l’information est illimitée dans le temps, variable dans sa formulation, répétitive.
Qui doit être informé ? toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé, sauf deux exceptions : l’urgence peut dispenser de l’information mais toute personne peut désigner une » personne de confiance » (parent, proche) et le droit de ne pas être informé et de refuser les soins doit être respecté, mais si la vie est menacée le devoir du médecin est de convaincre d’accepter les soins » et si l’acte est indispensable à la survie » (Conseil d’État août 2002) prescrire les soins appropriés, l’obligation de porter secours prédominant sur celle du consentement.
Caractères de l’information : délivrée au cours d’un entretien individuel, loyale, faisant mention des incertitudes, claire, intelligible, appropriée au malade dans son contexte familial, socioprofessionnel, culturel, spirituel, à sa maladie, bénigne ou maligne, évolutive ou non, au traitement, ses modifications, aux circonstances, malade anxieux, confiant ou agressif, au moment propice, savoir se taire, il y a des mots qui tuent, savoir attendre le pronostic, connu, soupçonné, ou non, favorable, ou non.
Nature de l’information : elle dépend de la qualité humaine de l’informateur, de son écoute vigilante, le droit de savoir de la part du malade suppose une certaine autonomie, ce qui n’est pas le cas d’une personne vulnérable, traumatisée, atteinte de » surdité émotionnelle « , suivant son affectivité, ses convictions religieuses, culturelles, conditionnant que l’accès à l’information n’est pas de ce fait équitable. Elle exige des dispositions déontologiques et humanistes concernant la confidentialité et l’intimité de la personne malade et des proches, cela sous la responsabilité du thérapeute, sans oublier que » le risque est au cœur de la médecine » (Pr G. David) et que la gestion de l’information n’échappe pas à la gestion de l’incertitude en médecine.
Le secret professionnel partagé : il est officialisé par la loi qui mentionne que » le secret couvre l’ensemble des informations réputées confiées par le malade à l’ensemble de l’équipe » ce qui ne définit ni quelles informations, ni quels membres de l’équipe. Enfin, l’échange d’informations suppose un accord acquis de la part du patient ? et ce partage devrait être limité à ce qui est » permanent, nécessaire et non excessif » conformément aux garanties prévues à l’article 8 de la Convention européenne sur la confidentialité des données à caractère personnel relatives à la santé. Il est toutefois mentionné que « La confidentialité des informations médicales, leur conservation et leur transmission sont soumises aux règles définies par décret en Conseil d’État motivé par la CNIL. »
» Le secret médical ne fait pas obstacle à ce que les proches reçoivent en cas de pronostic grave les informations nécessaires, destinées à apporter un soutien direct à la personne malade sauf opposition de sa part. » Quelles sont les appréciations de l’ordre de la » gravité » laissées aux soignants les autorisant à révéler à des tiers des informations médicales, au mépris des dispositions du Code pénal (cf. art 226–13) ?
Les preuves de l’information : elles peuvent être faites par tous moyens y compris par présomptions : » L’ensemble des faits, des circonstances et des événements connus et facilement contrôlables, graves, précis et concordants mais aléatoires » (Cour de cassation 1997). Figer l’information par un écrit est un non-sens humain et médical (Sargos) mais constitue la preuve d’un dialogue et la signature est de nature à nuire à la relation de confiance dans la relation médecin malade. La preuve par témoignage est sujette à caution, la preuve écrite dans le dossier n’est pas admise, le médecin ne pouvant se constituer une preuve à lui même. Le refus d’information est une disposition délicate, le médecin doit prouver par tous moyens qu’il a attiré l’attention du patient sur les conséquences de son refus et dans ce cas il serait sage de faire consigner ce refus par écrit en conservant un double.
L’information est une obligation contractuelle : condition indispensable à un » consentement éclairé » qui peut être retiré à tout moment (art. 1111–4 du Code de la santé).
Cet impératif est sensible lorsque la personne est » hors d’état de s’exprimer » capable juridiquement mais incompétente à consentir (coma, choc) il faut alors obtenir une délégation de consentement par une » personne de confiance « .
Le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle est donné par le représentant légal ; en cas de refus de ce dernier le médecin doit passer outre en avisant le procureur de la République.
La personne mineure peut s’opposer expressément à la consultation du titulaire de l’autorité parentale afin de garder le secret sur son état de santé, ce qui oblige à s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur et en cas de refus, le mineur doit être accompagné d’une personne majeure de son choix dont on peut se passer de connaître son identité (l’opposition du mineur est consignée sur le carnet de santé). Situation particulière de la personne majeure dont on ignore l’identité, autorisée à partager le secret médical et sans qu’on connaisse quel est le choix du mineur, en détresse, en conflit familial ? situation au risque d’être victime d’une secte.
En matière psychiatrique : l’information permet d’aboutir à une alliance thérapeutique, base d’une compréhension du traitement, ce qui n’empêche pas de s’interroger sur la nature de l’information à délivrer et sur la capacité à consentir.
En hospitalisation, le droit à l’information est reconnu légalement, l’autonomie de décision du patient doit être respectée, le médecin n’étant que le dépositaire de confidences et d’informations propres au patient qui est le seul à pouvoir en disposer.
Le recueil et la conservation des informations détenues par les professionnels de santé dans le dossier médical constituent un élément de la qualité des soins dans les meilleures conditions de sécurité, de consultation et de transmission dans l’intérêt des malades.
La finalité de l’information : permettre au patient d’exprimer sa volonté, c’est-à-dire de » consentir » au schéma thérapeutique, et cette information doit être globale : percevoir les grandes étapes du traitement, les bénéfices attendus en fonction de l’état physique et psychique du patient, des alternatives éventuelles aux soins, de la nature des bénéfices mais aussi des risques possibles, prédictifs, aléatoires… aux risques médicamenteux, la durée de l’hospitalisation, les modalités de prise en charge…
Informer, c’est partager avec son patient dans un contexte tant imprévisible que scientifique et technique une exigence déontologique qui s’impose dans son intérêt mais avec le risque de le mettre dans un état tel qu’il soit obligé de refuser un acte bénéfique dont l’indication est formelle.
Informer, c’est convaincre dans un climat où l’information la plus exhaustive devient le plus souvent anxiogène : il faut savoir ce que représente un refus de soins, défi, lassitude, résignation, négociation, peur, acceptation ou souhait de mourir… ou perte du gouvernement de son esprit ?
Peut-on alors parler avec certitude d’autonomie du patient et de consentement éclairé ? Tout laisse à penser que l’information d’un sujet à un autre n’est jamais ressentie de manière identique ; à la limite, l’obsessionnel ne sera jamais satisfait des explications.
Informer, c’est laisser le temps de la réflexion, solliciter un autre avis, savoir à quel rythme il faut informer, savoir qu’il faut dire la vérité, mais parfois… » pas tout, tout de suite » (Pr J. Bernard).
Informer, c’est convaincre, persuader, rassurer.