Conseil opérationnel en optimisation de coûts : plaidoyer pour un conseil éthique aux effets mesurables
Un consultant c’est celui qui te demande ta montre, te donne l’heure et te fait payer pour la prestation ! Cette mauvaise blague illustre bien, de manière un peu caricaturale, le fait que le conseil n’a pas toujours été orienté vers les résultats mesurables et vers l’engagement du conseil aux côtés de son client.
Les entreprises et administrations utilisent de plus en plus souvent les services de cabinets de conseil spécialisés pour les aider à réduire leurs coûts de fonctionnement (frais généraux…). Ces cabinets proposent des modes d’intervention non intrusifs et de rémunération très attrayants pour leurs clients. Par construction, ils s’engagent à obtenir des résultats pour leurs clients. Leurs performances sont mesurables et dépassent très largement, dans leurs domaines d’expertise, celles de leurs grands frères généralistes, même les plus prestigieux.
Cet article donne quelques conseils permettant d’établir une relation » gagnant-gagnant » entre l’entreprise et son conseil dans l’identification et l’obtention des économies notamment sur les dépenses de fonctionnement de l’entreprise.
Dilution temporaire de l’image des grands cabinets
Il y a encore quinze ans, le marché du conseil de direction était très clairement segmenté : les directions générales savaient aller chercher un conseil en fonction de leur problématique, avec une bonne appréciation de la valeur ajoutée résultant de leur choix.
Un McKinsey ou BCG pour une mission à caractère stratégique ou organisationnel, un At Kearney ou Booz Allen Hamilton pour l’amélioration de la performance, un Accenture pour les missions liées aux systèmes d’informations.
La pression sur ces cabinets a augmenté fortement dans les quinze dernières années pour deux raisons principales : une pression actionnariale forte pour ceux des cabinets qui avaient ouvert leur capital et la pression grandissante sur le taux d’utilisation des consultants pour ceux dont la taille importante fait passer en second plan la sélection des missions par la valeur ajoutée qu’ils savent pouvoir apporter à leurs clients.
Sous cette double pression, certains sont sortis de leur segment de prédilection perdant une part de leur légitimité dans la manœuvre, et diluant, dans certains cas, leur image voire leurs compétences.
Cette dilution s’illustre par exemple par la folie de l’époque de la bulle Internet au cours de laquelle tous les cabinets sont intervenus sur des missions liées à la définition de la stratégie Internet de leurs clients traditionnels avec la clairvoyance et le succès que l’on connaît aujourd’hui.
Cette dilution aura probablement des effets salutaires : les vainqueurs de demain seront ceux qui sauront identifier leur réelle valeur ajoutée, la communiquer clairement et se concentrer sur ce qui les rend distinctifs aux yeux de leurs clients.
En attendant, cette dilution a rendu les entreprises clientes plus exigeantes vis-à-vis de leurs conseils. Les prestations intellectuelles sont bien souvent achetées par les directions des achats, qui souhaitent légitimement s’assurer que les besoins sont bien définis et que les conseils sélectionnés sont effectivement légitimes par rapport aux problématiques posées.
Émergence de nouveaux acteurs spécialisés dans la réduction de coûts
Cette évolution a permis l’émergence en moins de dix ans d’une famille de nouveaux acteurs spécialisés dans le conseil opérationnel en optimisation de coûts. Au départ des petites » boutiques « , ces cabinets de conseil se sont spécialisés dans l’apport d’une forte valeur ajoutée sur des problématiques pointues : optimisation des dépenses liées aux frais de fonctionnement (télécoms, location longue durée de véhicules…), optimisation des dépenses sociales et fiscales…
Les créateurs de ces cabinets sont de deux types différents :
1) des anciens des grands cabinets susmentionnés qui ont compris que c’est par la spécialisation qu’ils trouveraient une place dans un marché de gros acteurs ;
2) ou des experts, issus de l’industrie ou du service et non pas du conseil mais trouvant leur légitimité dans leur connaissance pointue de leur secteur d’activité d’origine ou de la réglementation.
Les premiers apportent à leur activité une rigueur et une puissance analytique mises au service d’un faible nombre de segments métiers, avec l’efficacité qu’on imagine. Les seconds apportent leur pragmatisme et leur expérience métier vécue sur des situations très nombreuses.
Bien sûr, les performances de ces cabinets sont inégales. Bien sûr, les standards de cette nouvelle profession ne sont pas uniformes, bien qu’elle commence à se structurer et à se doter de standards. Ce secteur croît fortement avec un chiffre d’affaires annuel supérieur à 300 M€ et une croissance d’environ 20 % depuis dix ans, plus forte que celle du conseil traditionnel. Il emploie sans doute plus de 2 000 personnes.
Croissance des cabinets spécialisés rémunérés au succès – une tendance de fond
La croissance du conseil opérationnel en optimisation de coûts s’accélère car elle correspond à une double demande croissante de la part des entreprises : avoir affaire à des spécialistes et rémunérer son conseil en fonction des résultats obtenus.
Demande n° 1 : avoir affaire à des spécialistes
Après des années de recherche d’économies, de mise en place de plans de progrès, de rajeunissement et de professionnalisation des équipes, notamment au niveau des achats, les entreprises se doivent de continuer à trouver des pistes d’économies, si possible sans impact sur les effectifs et les organisations.
L’optimisation des achats est devenue un des axes stratégiques d’amélioration de la performance des moyennes et grandes entreprises et sans aucun doute le principal levier de préservation de leur compétitivité et donc de leur croissance future.
Bien sûr, nombreuses sont les entreprises qui doivent encore mener un grand chantier de mise en place d’une organisation d’achat capable de fonctionner intelligemment avec les différentes business units de l’entreprise.
Plus nombreux encore sont les administrations, les collectivités territoriales et les services de l’État qui doivent mener ces projets de transformation longs et difficiles mais nécessaires.
Néanmoins, beaucoup a déjà été fait et la forte croissante des acteurs du conseil opérationnel en optimisation de coûts traduit simplement le recours grandissant des entreprises à des conseils spécialisés capables d’apporter à l’entreprise une valeur ajoutée additionnelle et une vraie expertise marché. Leur focalisation sectorielle permet à ces conseils d’intervenir dans des conditions d’efficacité compatibles avec une rémunération indexée sur les résultats obtenus.
Demande n° 2 : rémunérer son conseil en fonction des résultats obtenus
La rémunération au succès présente pour l’entreprise l’intérêt de ne rémunérer son conseil que pour la stricte valeur ajoutée qu’il lui a apportée : pas d’économies = pas d’honoraires.
Ce mode de rémunération présente de nombreux intérêts pour l’entreprise :
- . il force le conseil au pragmatisme. Fini le » ya ka, faut qu’on « . Les recommandations doivent être pratiques et si possible, faciles à mettre en œuvre. Sinon, pas de mise en œuvre, pas d’économies, pas de rémunération ;
- il force le conseil à la performance. Plus les économies sont importantes et plus les honoraires sont importants. Ce modèle a priori vertueux implique une plus grande focalisation du conseil sur la culture du résultat pour son client et la recherche de l’ensemble des pistes d’optimisation ;
- il permet à l’entreprise d’externaliser l’optimisation de sujets déjà traités (« passer la deuxième couche ») en faisant intervenir un expert rémunéré sur sa seule valeur ajoutée additionnelle. L’entreprise peut ainsi consacrer ses ressources internes à d’autres sujets non encore abordés ;
- il garantit structurellement un retour sur investissement de la mission connu dès le départ, en général inférieur à six mois et son financement par les économies qu’elle génère.
Il présente aussi des inconvénients :
- mal maîtrisé par son client, le conseil peu éthique (il en existe même si leur pérennité en pâtit) peut être guidé par le court terme plutôt que par le long terme, recherchant l’économie au détriment éventuel du moyen terme ;
- contrairement aux missions classiques rémunérées au temps passé, le coût de la mission n’est pas connu à l’avance. Il peut être nul mais il peut aussi être important. Cela pose parfois des difficultés en termes de budgétisation.
Préconisations pour une relation » gagnant-gagnant » avec son conseil opérationnel en optimisation de coûts
Le recours à un conseil opérationnel en optimisation de coûts doit se faire en toute connaissance de cause.
Des précautions sont à prendre afin d’en tirer le meilleur parti et établir une relation gagnant-gagnant entre l’entreprise et son conseil.
Voici quatre préconisations en ce sens.
Conseil n° 1 : exiger une rémunération à l’efficacité, mais dans un cadre déontologique rigoureux
Les entreprises lient de plus en plus l’efficacité du conseil qu’elles reçoivent à la rémunération qu’elles accordent. Dans l’activité qui consiste à identifier et mettre en œuvre des économies sur les dépenses opérationnelles, la rémunération à l’efficacité a fait ses preuves aux conditions suivantes :
- être attentif à bien définir les demandes, à établir une assiette précise des économies recherchées, à disposer d’un rapport d’audit explicite quel que soit son résultat ;
- veiller à contracter avec un conseil offrant les meilleures garanties de déontologie. Cette déontologie peut aisément être testée par des interviews de clients du conseil pressenti.
Conseil n° 2 : conserver le contrôle des opérations
Même si elle ne paiera que pour les économies réalisées, l’entreprise se doit de conserver la main sur l’ensemble des décisions principales. Son conseil doit rester un conseil et non pas » diriger la manœuvre « . Cela est particulièrement vrai dans le choix des fournisseurs ou des solutions retenus.
Le reproche parfois fait à certains » Cost killers » est de privilégier la baisse des coûts au détriment de la qualité ou de la pérennité des solutions retenues. En conservant en permanence le contrôle des décisions et en s’assurant de la validité des propositions faites, ce grief n’a pas lieu d’être.
Conseil n° 3 : s’assurer de l’indépendance du conseil choisi
Le conseil n’a de sens que s’il est indépendant de tout conflit d’intérêts. À ce titre, il est primordial que l’entreprise s’assure que son conseil s’interdit d’entretenir toute relation commerciale avec les fournisseurs de matériels ou de solutions qu’il pourrait être amené à recommander.
Tous les conseils se déclarent indépendants (même les distributeurs ou les courtiers !). Il convient donc de faire le tri entre le bon grain et l’ivraie.
L’entreprise doit imposer des obligations très claires d’éthique et d’indépendance au conseil qu’elle choisit, obligations incluses dans le contrat, assorties de pénalités dissuasives dans le cas où cette indépendance ne serait pas respectée. Le chiffre d’affaires du conseil doit être issu à 100 % des honoraires reçus de ses clients.
Contacter directement des clients du cabinet est également une bonne manière de se faire une idée sur pièce de cette indépendance.
Conseil n° 4 : garantir le transfert de savoir-faire et la formation des équipes
L’intervention de spécialistes pointus est une occasion à ne pas manquer pour former de manière simple des collaborateurs aux meilleures techniques d’achat ou à des secteurs spécifiques. Ce transfert de savoir-faire et de connaissance peut être inclus dans le contrat de prestation même dans le cas d’une rémunération au succès.