Éditorial
Une manière classique de présenter l’activité dans le domaine des armements terrestres aurait consisté à rappeler l’organisation et les missions de l’armée de terre face aux nouvelles menaces, à énumérer les matériels et systèmes d’armes en cours de livraison, en soulignant leurs performances clés, à brosser le panorama industriel qui, aussi bien au niveau national qu’européen, permet de garantir la disponibilité et la qualité des équipements développés ou accessibles sur le marché.
Une telle présentation n’aurait pas permis de rendre compte de la dynamique actuelle de ce domaine. Les différents conflits à travers le monde confirment chaque jour le caractère varié et imprévisible de la menace ; les progrès technologiques, en particulier dans le domaine de l’information et des communications, conduisent à revoir profondément le processus d’élaboration des systèmes d’armes ; les mouvements industriels remettent en cause les schémas d’approvisionnement les plus éprouvés.
Mais au-delà de l’intérêt que peut susciter chacun de ces événements – aussi important soit-il -, c’est bien la concordance, l’interdépendance de ces mutations importantes qui apparaît de nature à remettre en cause aussi bien les principes de préparations des systèmes d’armes que les concepts opérationnels ou la doctrine d’emploi des forces.
Ainsi, l’émergence du concept de combat infovalorisé, illustré par les études concernant la bulle opérationnelle aéroterrestre, conduit à faire évoluer durablement la relation entre les armées (qui expriment leurs besoins), la Délégation générale pour l’armement (qui traduit ces besoins opérationnels en systèmes d’armes et pilote leur développement) et l’industrie qui les réalise. L’émergence de ruptures technologiques prometteuses telles que la miniaturisation des composants ou la protection active permet d’envisager le développement de munitions dites « intelligentes », c’est-à-dire qui s’affranchissent de plus en plus de la simple balistique et des effets résultant de la seule énergie cinétique, et nécessite de revoir fondamentalement l’architecture des véhicules aussi bien en ce qui concerne leur protection que la conduite de tir des armements qu’ils mettent en œuvre.
Ces changements importants en matière d’organisation et de relations entre les différents acteurs, ainsi que l’intégration de technologies de plus en plus pointues vont profondément modifier le paysage industriel du domaine. Pour autant, le développement des systèmes électroniques et leur fusionnement avec les techniques plus traditionnelles nécessitent de maîtriser pleinement l’aspect système : un enjeu majeur notamment pour garantir l’interopérabilité avec les forces alliées et qui de ce fait ne peut se limiter aux seules frontières nationales.