Télécommunications, électricité et eau
6 milliards d’euros pour France Télécom, 3 milliards d’euros pour EDF, 2,5 milliards d’euros pour Suez : les bénéfices 2005 des acteurs historiques dans les télécoms, l’électricité et l’eau sont confortables, preuve que ces marchés sont très profitables.
Il ne s’agit pas de faire ici le procès des entreprises qui gagnent de l’argent. C’est bien grâce à ses bénéfices que l’entreprise investit pour préparer l’avenir et conserve la confiance des actionnaires, ses propriétaires. Il s’agit d’éclairer un paradoxe.
Les marchés des télécoms, de l’électricité et de l’eau sont des marchés de commodités au sens où le fournisseur ne peut pas valoriser (ou très difficilement) son produit avec des services additionnels. Sauf exception comme Dell qui est parvenu à sortir de la » commoditisation » du marché du PC grâce à un modèle à la fois » Low Cost » et axé sur le service après-vente. Ce modèle est aujourd’hui inégalé.
Il est courant d’observer de fortes baisses de prix sur les marchés de commodités, du fait d’un acte d’achat rendu plus simple par la facilité à comparer les prix des produits. Ainsi, les marges des fournisseurs ne sont, en général, pas aussi confortables que celles évoquées ci-dessus.
Or force est de constater que, sur ces trois marchés, les prix restent à des niveaux confortables (télécoms), voire augmentent fortement (électricité, eau).
Cet article offre un décodage partiel afin d’expliquer ce paradoxe.
Par ailleurs, vos entreprises ont, pour certaines, déjà mené des actions volontaristes afin d’optimiser les dépenses liées aux télécommunications, à l’électricité ou à l’eau.
Cet article propose des recettes additionnelles éprouvées par l’expérience pour aller encore plus loin et payer ces prestations au juste prix.
Les télécoms : des entreprises pénalisées par leur manque d’ambition et de clairvoyance
Le constat : les entreprises ne sont pas assez exigeantes envers leurs opérateurs
La minute de téléphone (ou le réseau de données) fournie par un opérateur est à peu près la même que celle de ses confrères. Bien sûr les moyens mis en œuvre pour servir les clients augmentent avec la taille et les moyens financiers mais globalement le produit de base reste le même. Bien sûr, la qualité du produit diffère selon les technologies employées.
Le grand public a bien compris que les télécoms sont une commodité. Le particulier choisit » X » Télécom pour sa téléphonie, » Y » Télécom pour son accès ADSL ou sa » Box « .
Si les télécoms sont réellement une commodité, alors les opérateurs doivent tenter d’y ajouter du service. Mais le service dans les télécoms pour les entreprises existe-t-il vraiment ?
Dans les nombreuses missions d’optimisation de coûts menées par Cristal Décisions pour ses clients grands comptes, le service réclamé par ses clients se limite dans huit cas sur dix à » un reporting des consommations et une facturation clairs « .
Fournir à son client un reporting de ce qui lui est facturé ! Nous sommes proches de l’âge de pierre du service.
Cet exemple illustre la faible maturité de bon nombre d’entreprises (y compris certaines du CAC 40) pour ce qui concerne leurs achats de services de télécommunications. Cela est vrai pour la téléphonie mais également pour les réseaux de données.
Pourquoi l’entreprise ne serait-elle pas plus exigeante envers son fournisseur quand elle règle des factures de plusieurs centaines de milliers (voire millions) d’euros par an alors que le particulier change de fournisseur d’accès à Internet à la maison pour une différence de 2,99 euros par mois ?
Le diagnostic : la torpeur hypnotique entretenue par les fournisseurs ?
Une grande partie des entreprises est maintenue dans une sorte de torpeur hypnotique qui s’explique notamment par trois éléments clés :
• une tarification très complexe en raison des tarifs multiples, non linéaires, à tiroir, et un marketing des fournisseurs parfaitement au point ;
• la promesse de services futurs innovants (convergence fixe-mobile-data, 3G, voix sur IP) plus souvent commercialisés en mode » push » que pour répondre à de vrais besoins ;
• un marché qui se consolide alors qu’il vient à peine de s’ouvrir, avec la fusion de Neuf Télécom et Cegetel. Le discours des acteurs s’uniformisera bientôt afin de ne pas réveiller l’entreprise qui dort…
Cette » torpeur » se traduit par une ambition insuffisante dans l’acte d’achat et des écarts de prix de parfois 200 % pour un même service (téléphonie ou data) chez le même opérateur selon que l’entreprise met sur le sujet une focale suffisante ou non.
Le remède
Le remède passe par la volonté de se faire déshypnotiser et donc par une démarche volontariste nécessitant de pousser l’analyse des dépenses, des modes de consommation, des besoins et de la démarche achat un cran plus loin que ce qui est fait, même au sein des meilleures directions des achats.
L’entreprise peut pour cela s’entourer de véritables experts qui disposent des connaissances et arguments nécessaires.
L’électricité, une dépense » complexe » dans un marché » structuré « , où les temps sont durs pour les électro-intensifs.
Le constat : des prix en forte hausse dans un marché très structuré
Le cas de l’électricité est similaire aux télécoms, dans le sens où, tant que les limites de capacité de production ne sont pas atteintes, le coût marginal de production d’un électron est faible. Les capacités de production n’étant pas infinies, le jeu consiste donc bien pour un producteur d’électricité à maximiser la valeur qu’il retire de son outil de production en vendant 100 % de sa capacité au mieux sur le marché.
Le marché, ouvert depuis peu de temps, s’est très rapidement structuré autour de grands producteurs et de petits distributeurs. Entre les producteurs et les distributeurs, une » bourse » a été habilement instituée qui permet de fixer un prix de marché de gros.
Qu’observe-t-on ? des marges très confortables pour les producteurs, des marges maigrichonnes pour les distributeurs. Un acteur médiatique dans la catégorie distributeur a récemment annoncé un investissement dans des capacités de production, sans doute pour se procurer des électrons moins chers que sur le marché de gros.
Résultat de l’ouverture du marché : les prix montent. De 30 €/MWh il y a trois ans, les prix sont aujourd’hui aux alentours de 60 €/MWh ! Les coûts de production ont-ils grimpé de 100 % dans l’intervalle ? Certainement pas. Le service s’est-il amélioré ? Oui, mais de manière très marginale : une entreprise de 100 sites peut, depuis peu, recevoir une facture unique pour l’ensemble de ses sites au lieu d’une facture par site. C’est-à-dire, être traitée comme une entreprise et non pas considérée comme un simple particulier.
Âge de pierre, quand tu nous tiens…
Le marché de l’électricité est un exemple fabuleux de marché de commodités dans lequel les prix montent. Un cas d’école d’une ouverture de marché ratée ?
Le remède dépend fortement de la consommation de l’entreprise et de sa situation
Qu’est-il possible de faire pour réduire la facture d’électricité des entreprises ?
Si votre entreprise ou site est un gros consommateur d’électricité qui a fait jouer son éligibilité quand le marché était à 28 €/MWh, les temps sont durs et le resteront. Vous encaisserez une hausse de prix lorsque votre contrat arrivera à échéance. Vous pouvez en revanche vous faire aider par des experts de ces marchés pour limiter les dégâts.
Pour certaines entreprises industrielles pour lesquelles l’électricité constitue une part importante du coût de production, la tentation de la délocalisation est si forte que le sujet est même devenu politique.
Pour un site non » électro-intensif « , ou une entreprise multisites, la hausse des prix n’est pas une fatalité et des économies sur le prix d’achat peuvent être faites, même dans un marché en hausse.
Cela nécessite de monter en compétence sur le sujet si c’est un poste de dépenses important ou d’externaliser l’optimisation auprès de spécialistes si le jeu ne vaut pas l’investissement en interne, ce qui est généralement le cas.
L’eau, un marché où 3 entreprises sur 4 paient à leur insu des factures » surdimensionnées »
Troisième exemple de marché de commodités dans lequel des économies importantes sont réalisables.
Le constat : une totale opacité des prix
Le service associé à l’eau tel qu’il est perçu par l’entreprise utilisatrice se réduit ici encore à sa plus simple expression : l’acheminement d’une eau propre. Les choses sont comme d’habitude un peu plus compliquées. Le renforcement des normes d’assainissement, la nécessité d’investir dans le renouvellement de canalisations vieillissantes constituent de bonnes raisons pour que le prix de l’eau augmente.
Et effectivement, le prix de l’eau ne cesse d’augmenter. De 10 % par an au début des années 90 à 5 % par an au début des années 2000, ce sont des taux de croissance triples de l’inflation, non soumis aux règles du marché.
Le prix de l’eau est constitué de nombreux éléments dont près de 60 % sont liés à des taxes diverses dont il est impossible pour le profane de décoder la signification ni la pertinence. Fixé par la commune ou le groupement de communes concernées, il est différent d’une ville à l’autre, d’une activité à l’autre. Ainsi chez un de nos clients, l’usine de Lyon paie son eau 13 % moins cher que le siège social à la Défense, mais 17 % plus cher que l’usine de Clermont.
Impossible de comparer car les règles sont trop complexes, impossible de négocier car il n’y a qu’un fournisseur !
Pourtant il est possible de réduire le coût de l’eau : en s’assurant que les taxes sont correctement appliquées et en se faisant rembourser les erreurs de facturation.
Le remède : il consiste à identifier et récupérer les erreurs de facturation et s’assurer que l’entreprise bénéficie de toutes les règles fiscales dérogatoires
Fait choquant : des erreurs de facturation (involontaires de la part des fournisseurs) se retrouvent dans 75 % des factures ! Elles s’expliquent sans doute par la complexité des règles qui régissent la tarification de l’eau : assiette d’application des taxes, non prise en compte des fuites, erreurs d’index, doublons… Il semble que, dans certains cas, le fournisseur se perde dans son propre tarif.
Pour réduire sa facture, ou en limiter la hausse, l’entreprise peut également faire appel à des spécialistes de la fiscalité de l’eau, qui pourront vérifier la bonne application des règles fiscales (locales, régionales, nationales) et identifier les éventuelles possibilités offertes pour en optimiser le poids.
Les erreurs ou optimisations sont parfois tout à fait majeures : à titre d’exemple, une clinique s’est vu rembourser l’équivalent de la moitié d’une année de consommation car ses factures étaient erronées depuis quatre ans
En conclusion
Télécoms, Électricité, Eau : trois marchés de commodités aux caractéristiques finalement sensiblement différentes.
Dans ces trois marchés, les dirigeants et directions achats qui le souhaitent peuvent donc aller encore plus loin et faire faire à leur entreprise des économies substantielles.