Les Armées au service des jeunes en difficulté
Chaque année 20 000 jeunes en risque de marginalisation
Chaque année 20 000 jeunes en risque de marginalisation
Pour bien comprendre la situation présente, il faut commencer par quelques chiffres qui permettent de se rendre compte de l’ampleur et de la nature du problème des « jeunes en difficulté ». Chaque année ils sont 60 000 jeunes (8 % d’une classe d’âge) qui sortent du système scolaire sans avoir dépassé le niveau du collège ou la première année de CAP ou de BEP. Cette inégalité comporte une dimension sociale très forte : les deux tiers des sans qualifications sont issus de milieux d’ouvriers, de personnels de service et de non-actifs. Au total, il faut savoir que chaque année 20 000 jeunes sont en risque de marginalisation.
Les armées, encore maintenant, dans l’exercice de leurs missions…
Or la suspension du service militaire a laissé un vide : amputation d’un outil remarquable d’observation et de recensement social, fin d’une possibilité incomparable de brassage social et réduction importante d’occasions de formations professionnelles.Sur ce dernier point, il faut noter quand même, que sur les 35 000 recrutements annuels opérés par les armées, 7 000 concernent des jeunes sans qualifications, qui, par différentes filières spécifiques et après quatre à huit années, retrouvent la vie civile, dont les deux tiers avec un emploi. Aussi efficaces qu’elles peuvent l’être, ces initiatives réussies d’insertions pratiquées par les armées, dans l’exercice de leurs missions que l’on peut dire « normales », ne suffisent pas.
Une réussite en outre-mer, depuis 1961
Or, dans les territoires français d’outre-mer existe, depuis 1961, une disposition particulière qui mérite d’être considérée, comme le souligne le rapport d’information du Sénat de 2003 fondé lui-même sur les travaux d’un groupe de travail de la « Commission Armée-Jeunesse » de 2001.
Il s’agit du SMA : Service militaire adapté outre-mer, dont l’objectif est de faire acquérir aux jeunes volontaires, sous statut militaire, une formation professionnelle ou la capacité d’entrer dans un dispositif de formation, en même temps qu’un apprentissage de la vie en société sous discipline militaire. Il s’adresse à 3 000 jeunes d’outre-mer, de 18 à 26 ans, pour une durée de six à vingt-quatre mois. Un succès : pour chaque place ouverte, plus de 2,5 candidats en moyenne.
En métropole, le dispositif « Défense 2e chance » depuis 2005
Une bonne question : pourquoi, et si oui comment, ne pas créer un SMA en métropole, configuré à la dimension du problème hexagonal, sous l’égide des armées qui savent, aussi, faire ce métier de formateur professionnel et social ? À cette question, le Sénat, dans son rapport déjà cité, répondait par l’affirmative. Mais ce n’est pas la formule qui a été finalement décidée et qui se met en place peu à peu depuis l’an dernier.
Le 21 septembre 2005, la ministre de la Défense a lancé le dispositif « Défense 2e chance », pour « offrir une seconde chance à une population fragilisée composée de jeunes adultes ». L’établissement public constitué à cet effet sous la double tutelle des Armées et des Affaires sociales, l’EPIDE (Établissement public d’insertion de la Défense), a quatre missions : recruter, accueillir et héberger les stagiaires, et organiser des formations. Il gère les établissements décentralisés, les EID (Établissements d’insertion de la Défense) qui sont créés ou en voie de création. Le premier a été inauguré le 2 septembre 2005 à Montry (Seine-et-Marne).
Il est prévu que plus de 60 sites seront créés d’ici à 2007 pour accueillir 20 000 jeunes. En fin 2005, ils étaient 450 stagiaires. En fin 2006, 11 centres sont ouverts et ils accueillent actuellement un peu moins de 2 000 jeunes sur les 3 000 prévus.
Les stagiaires des Établissements, jeunes filles et jeunes gens, « en difficultés scolaires, ne possédant pas de diplômes scolaire ou professionnel et sans emploi », sont volontaires. Ils sont incités à poser leurs candidatures aux EID, dans les missions locales, à l’ANPE, dans des réseaux associatifs et aussi via les Bureaux du Service national du ministère de la Défense (qui organisent les journées d’appel et de préparation à la Défense et qui ont un bref contact avec 800 000 jeunes chaque année). Pendant toute la durée du stage qui est généralement d’un an, ils sont logés, nourris, soignés et perçoivent une allocation mensuelle (dont une partie différée pour constituer un pécule). Ils portent une tenue uniforme « pour éliminer toute discrimination sociale », ils sont soumis à un règlement intérieur mais leur statut n’est pas pour autant celui des militaires.
La formation dispensée comporte divers modules : une mise à niveau des fondamentaux scolaires, une formation civique et comportementale, une formation professionnelle (dans les principaux secteurs d’emplois déficitaires : hôtellerie, restauration, transports, logistique, services à la personne ; les entreprises qui ont des implantations à proximité seront sollicitées pour des matériels, des stages, et… des embauches !) ainsi qu’une formation aux premiers secours, des activités physiques et des initiations à l’informatique et pour quelques-uns à la pratique de l’anglais. Enfin, ils participent aux tâches quotidiennes liées à la vie en collectivité, et expérimentent le respect de l’autorité nécessaire à cette vie en communauté.
Un avis autorisé
Il faut espérer que le programme ambitieux, qui n’a pas encore dépassé sa deuxième année, pourra être poursuivi et atteindre les buts fixés. Le succès du SMA outre-mer, si ses enseignements sont utilisés mutatis mutandis pour cette « Deuxième chance », est… une chance qui augure bien de l’avenir.
Nous avons demandé à Guy Hervo son avis sur ces évolutions. Il est membre du Conseil supérieur de la réserve militaire au titre de la CFDT, et fut président du groupe de travail de la Commission « Armées-Jeunesse » qui avait étudié puis proposé l’extension en métropole du SMA (et dont les propositions avaient été reprises en 2003 au Sénat).
Voici sa brève interview.
Mon colonel, vous avez été un ardent partisan de l’extension en métropole du SMA outre-mer. Que pensez-vous du dispositif « Défense 2e chance » ?
Guy Hervo : J’en pense du bien car il s’agit là, enfin, d’un dispositif, spécifique et conséquent, qui s’attaque globalement à l’exclusion d’une partie importante de notre jeunesse.
Alain Peyrefitte relate dans C’était de Gaulle qu’en 1964, ce dernier avait évoqué l’intérêt du SMA.
Le dispositif « Défense 2e chance » peut être un des éléments importants et exemplaires pour une solution à long terme du problème social et éthique de certains jeunes, qui nous fait actuellement et brutalement signe à tant de reprises.
Vous avez dû constater avec satisfaction qu’il s’était inspiré du SMA outre-mer.
GH : Il s’inspire certes du SMA, qui continue à être un succès. Mais il en diffère fortement car il n’est pas militaire. Or, les armées ont prouvé leur efficacité dans ce « métier » très compliqué (qu’elles pratiquent depuis longtemps !) de l’insertion sociale et de formation des jeunes en difficulté.
Nous ne constituons pas en métropole la force permanente d’intervention territoriale qui a fait ses preuves dans les DOM-TOM. Cela prive l’Armée d’active d’un poumon d’alternance entre les affectations et l’Armée de réserve d’une ressource en militaires du rang.
En outre, notre groupe de travail de la Commission Armée-Jeunesse avait proposé, pour la métropole, une phase d’expérimentation puis une montée en puissance progressive.
Êtes-vous, vous-même, impliqué dans le dispositif « Deuxième chance » ?
GH : Absolument. Je suis satisfait de pouvoir participer, à titre personnel, à la mission de l’établissement public qui est en charge de ce programme. Je souhaite vivement que ses résultats soient, tout à la fois, significatifs sur le plan qualitatif et consistants sur le plan quantitatif, pour qu’il soit maintenu ou mieux, amélioré, indépendamment des aléas politiques !
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ado en échec scolaire
Mon fils aura 15 ans en octobre et il se trouve qu’il est en échec scolaire , en 3ème actuellement il est passionné par tout se qui à un rapport avec l’armée. Il est très sportif et à une excellente aptitude physique. Je cherche une école dans laquelle il pourra être recadré tout en apprenant le métier de militaire ou métier de la sécurité. J’espère que vous aurez la gentillesse de m’aider dans cette recherche. Pour info ; nous habitons dans le 93 près de Paris.
Bien cordialement