Les entreprises d’origine française à l’épreuve du développement international
Le développement international des entreprises implique un double processus d’intégration transversale et transnationale des compétences de leurs collaborateurs. Les disparités culturelles ont un impact beaucoup plus large qu’imaginé au départ. Il ne s’agit plus seulement de tenir compte des us et les coutumes des consommateurs locaux ou de préparer les expatriés et leurs familles à leur futur contexte de vie. Il s’agit aussi de mobiliser de nouveaux partenaires qu’il convient d’apprendre à connaître et à comprendre si l’on entend établir avec eux une coopération durable et fructueuse. La capacité à tisser des rapports de confiance et à mobiliser localement les énergies influence directement la performance globale obtenue par l’entreprise.
On se propose ici d’attirer l’attention sur l’importance de ces articulations entre faits de culture et faits de gestion dans l’entreprise. On empruntera à un ensemble de travaux menés au sein d’entreprises françaises pour montrer le caractère généralisé des phénomènes en cause, la profondeur de leur ancrage mais aussi la capacité de « faire avec », dès lors qu’au lieu de chercher à faire marcher tout le monde au même pas et sur la même musique, on aura su prendre la mesure du phénomène. Le développement de nouvelles compétences de décodage interculturel1 sera requis à l’avenir pour permettre aux acteurs impliqués dans le développement international de leur entreprise de s’adapter à cette nouvelle donne.
Trois coopérations ordinaires à l’international
Le débordement aux interfaces
« La notion de débordement aux interfaces n’est pas intégrée dans le contexte malais ». Ce n’est pas un entraîneur de rugby qui parle mais bien le responsable pays d’un grand groupe industriel français implanté en Malaisie ! Ces propos ne sont pas une boutade lancée à la fin d’un repas bien arrosé ; ils sont consignés noir sur blanc dans le commentaire détaillé d’un rapport d’étude qui lui a été remis, analysant les modes de fonctionnement des usines relevant du périmètre géographique sur lequel s’exerce son autorité. Ils prennent, on l’imagine, racine dans une éthique professionnelle prête à ériger en « notion » non pas un éclair isolé de bravoure mais une exigence continue rattachée à un exercice vraiment professionnel de ses responsabilités. Faire réellement (tout) son travail inclut donc pour ce dirigeant confirmé de ne pas hésiter à « monter au créneau », « remuer la fourmilière » et faire fi d’une conception purement défensive du découpage des frontières de ses responsabilités.
Cet idéal est très largement partagé en France par tous ceux qui disposent d’un statut suffisamment bien ancré pour être en mesure de le mettre en pratique. Il conduit ceux qui, dans des contextes culturels éloignés s’y réfèrent, à dénoncer un manque d’esprit d’initiative des salariés locaux. Ceux-là sont regardés comme acceptant, avec une forme coupable de complaisance, une dépendance excessive vis-à-vis des consignes reçues de leur hiérarchie et des frontières de compétences définissant leur périmètre de responsabilité.
Bien d’autres enquêtes, menées dans les cinq continents au sein des filiales étrangères de groupes français, ont alimenté les mêmes remarques émanant d’expatriés français autour de la question de l’autonomie attendue (en vain) de la part des locaux. Nos compatriotes éprouvent bien des difficultés à saisir que l’autonomie qu’ils recherchent n’est en réalité qu’un produit culturel issu du terroir dont eux-mêmes sont issus. Cette autonomie-là a peu de chance de pousser spontanément sous d’autres cieux et il n’est même pas sûr qu’on puisse l’y cultiver. Il existe, en revanche, des formes locales d’initiative qui pour se développer ont besoin de réunir un ensemble de conditions qu’il serait bien utile à ces managers français de connaître. Il leur faudra d’abord, pour les découvrir, commencer par se départir des lunettes françaises chaussées sur leur nez.
Maintenant, ils sont au courant !
Prenons un second exemple. Celui-ci se passe à un tout autre niveau de la hiérarchie et sur un autre continent. Nous voilà dans une usine nord américaine. Un technicien français de maintenance nous fait faire le tour de l’usine. Parvenu dans un coin reculé de celle-ci, son attention est attirée par le bruit anormal d’un broyeur dont il estime aussitôt l’intégrité sérieusement menacée. Avisant alors un employé local de fabrication travaillant dans la zone, il l’interpelle pour savoir ce qu’il entend faire à ce propos. Ce dernier lui répond qu’il a bien averti le département de maintenance concerné et même réitéré le jour même sa demande devant l’absence de réaction de celui-ci. Il estime ce faisant avoir fait ce qu’il avait à faire, la responsabilité étant à ses yeux transférée au service compétent. Notre technicien prend alors l’initiative de débrancher l’appareil, sachant que cette interruption ne manquera pas, en interrompant l’alimentation aval du process, d’alerter le poste central qui pilote la fabrication, l’obligeant à prendre des mesures correctives en urgence. « Maintenant, ils sont au courant ! », lance-t-il à son interlocuteur local médusé, en s’éloignant sans même se retourner.
Une logique de fidélité
Convaincre ou agir
Au-delà des oppositions classiques entre le niveau local et le siège, une vraie différence culturelle se manifeste ici. En revenant de façon récurrente sur la logique interne des actions qu’il demande à ses troupes de mettre en oeuvre, le responsable est, dans un contexte français, parfaitement dans le rôle attendu par ses équipes qui demandent à être rationnellement convaincues avant de s’engager. Les Français font part de leur étonnement à voir leurs collègues américains discuter aussi peu souvent les consignes qu’ils reçoivent de leur chef ou les demandes exprimées par leurs clients. Leurs compatriotes sont habitués au minimum à demander aux uns et aux autres des explications en sorte d’être pleinement convaincus avant d’agir. Ils n’hésitent pas non plus à avancer leurs arguments visant à « éduquer » le client ou à « convaincre le chef ». Cette mise en perspective est, en revanche, mal comprise hors de France. Elle pourra même passer pour de l’arrogance ou pour le résidu indécrottable d’une ancienne culture de monopole public. Les deux parties qui dialoguent à distance de part et d’autre de l’Atlantique mesurent mal à quel point chacune peut, sans s’en rendre compte, frustrer l’autre partie. Les Français, toujours à l’affût d’éléments nouveaux, propres disent-ils à « lever un lièvre » et donc à les rendre « plus intelligents » restent désespérément sur leur faim. Les Américains aspirent simplement à voir leur coordinateur lever les obstacles qui limitent leur action immédiate. Ils se sentent entravés dans leur capacité à « gérer eux-mêmes » les affaires qui les concernent.
Revenons sur ces deux exemples en nous interrogeant du point de vue des locaux, confrontés à cette étrangeté française3. La dépendance dans laquelle s’installent les personnels malais vis-à-vis des instructions reçues de la part de leur supérieur n’est pas seulement, comme le croient les expatriés français, liée à leur inexpérience industrielle. Elle s’inscrit dans une logique de fidélité et de protection dont il serait très insécurisant de sortir. Leur initiative risque de rester sans lendemain, aussi longtemps en tout cas qu’elle n’aura pas été relayée par le chef lui-même. Il serait, aux yeux des employés malais, beaucoup plus grave de causer tort par une initiative malvenue à l’honneur de son groupe et à la réputation de son chef que de ne répondre qu’imparfaitement aux incitations émanant d’un expatrié français.
L’employé local nord américain n’est pas non plus, on le sait bien, dénué d’esprit d’initiative. Mais celle-ci sera nécessairement mobilisée dans le cadre de la représentation qu’il se fait de sa responsabilité. Celle-ci est structurée par l’engagement pris avec son supérieur direct de l’aider à accomplir les objectifs que ce dernier a lui-même reçu du niveau au-dessus. Tenir cet engagement, dans lequel il voit la raison d’être du job qui lui a été confié, est essentiel. Disposé à alerter la maintenance, comme le prévoit d’ailleurs sa fiche de poste, il n’entend pas pour autant faire du zèle au-delà. Il l’entend d’autant moins qu’en agissant ainsi il pénaliserait ses propres objectifs de production. Sans doute serait-il disposé à le faire pour un autre motif, par exemple la mise en danger d’un de ses camarades de travail, mais il ne le fera pas pour la mise en danger d’un équipement relevant d’un autre département. La construction de l’identité professionnelle du technicien français donne au contraire à son geste une valeur noble d’assistance à un broyeur en difficulté. Ne rien faire, à l’inverse, serait assimilé à une forme de lâcheté coupable, quand bien même personne dans l’usine ne pourrait avoir à en connaître. On comprend mieux ainsi pourquoi l’un s’enflamme et l’autre pas.
Convaincre en débattant
Quittons maintenant les rudesses de l’univers industriel et transportons-nous dans celui plus douillet d’une conference call tenue entre les représentants locaux de plusieurs pays associés à la mise en œuvre d’un contrat de fourniture de services de télécommunications. Tous travaillent de concert pour gérer l’ensemble des consommations d’un gros client professionnel lui aussi déployé internationalement. Le responsable français de ce programme sollicite chaque semaine ses partenaires locaux et leur demande de bien vouloir remonter et partager les problèmes du moment. Il en profite pour rappeler à nouveau l’esprit du programme, insistant sur les vertus d’un partage aussi large que possible des difficultés rencontrées localement dans les relations avec les filiales locales du client. Silence radio.
Gérés selon une logique qui les incite à concentrer leurs efforts sur la partie de leur activité générant des revenus (dont dépendent aussi bien une partie de leur rémunération que la suite de leur parcours dans l’organisation), les partenaires anglo-saxons du projet ont probablement moins de temps et surtout moins de goût pour la mise en perspective et le débat visant à améliorer la compréhension par chacun des enjeux communs. Dans leur vision du monde, c’est le rôle du manager ou du leader de définir le chemin à suivre et de formaliser ses attentes en une succession d’étapes et d’objectifs précis. Plutôt que de l’entendre disserter sur l’esprit du programme et les leçons pouvant être tirées de ses débuts, ils aimeraient l’entendre répondre aux questions prosaïques qu’ils posent à leur état-major.
Mieux comprendre et se faire mieux comprendre
Une performance nuancée
Ces exigences que les Français se fixent à eux-mêmes sont-elles vraiment les garantes d’une performance supérieure ? Beaucoup chez nos partenaires étrangers en doutent, qui ne font que mesurer l’écart entre ces pratiques et convictions originales et une orthodoxie anglosaxonne posée en dogme. La réponse à la question semble à tout le moins mériter nuances. S’agissant des décisions, notre manière de faire est sans doute plus fructueuse pour les « grandes décisions » que pour les petites où notre goût de la discussion peut engendrer des délais ou des raffinements inutiles. De même, notre souci de « conseiller le client » est mieux reçu et plus légitime quand il s’agit de biens ou de services particulièrement élaborés tandis que sur des produits standardisés ce zèle peut s’avérer inutile et malvenu.
Que nous apprennent ces anecdotes et quel parti peut-on en tirer ? On peut admettre que notre responsable pays de Malaisie, notre technicien expatrié aux États-Unis et notre chef de projet basé en France s’efforcent chacun d’exercer leur métier du mieux qu’ils peuvent. Il est clair également qu’ils fondent leurs pratiques sur des convictions profondes avec lesquelles ils ne sont pas prêts à transiger. Il n’en reste pas moins qu’ils éprouvent chacun bien des difficultés à se faire comprendre et, plus préoccupant pour leur entreprise, que leur comportement s’expose à être regardé localement au mieux comme « étrange » et au pire comme scandaleux. Que manque-t-il donc aux Français de nos trois histoires pour mieux comprendre leurs partenaires étrangers et, surtout, se faire mieux comprendre d’eux ? Quels sont les risques attenants à cette méconnaissance de leur singularité culturelle et quels moyens faudrait-il mettre en œuvre pour les contenir ?
Des spécificités très étendues
Ces singularités françaises s’observent dans bien d’autres facettes du fonctionnement des entreprises. Un manager français, pour qui la référence au métier est centrale, aimera à considérer que ses subordonnés sont de « grands garçons » qui n’ont pas besoin d’être « pris par la main ». Si tel est bien le cas, il entourera ses pratiques de délégation et de contrôle d’un caractère beaucoup plus informel (mais non moins exigeant) que ne le prescrit l’orthodoxie managériale.
La prise de décision4, qui sous d’autres cieux constitue un processus très fortement ritualisé en sorte de pouvoir s’appuyer ensuite dans sa mise en œuvre sur un consensus officialisé en réunion, est construite dans la tradition française comme l’aboutissement d’un processus de débat contradictoire au cours duquel la « vérité » émerge progressivement grâce à la prise en compte des objections successivement apportées par des protagonistes pugnaces. L’arbitrage finalement arrêté par une autorité tranchant « au-dessus de la mêlée » pourra être facilement révisé, toujours au nom d’une rationalité argumentée, contrairement à d’autres contextes où sa remise en cause serait interprétée comme un abus de pouvoir et un camouflet infligé à tous ceux ayant su sagement se ranger à la décision commune.
Le rapport au client est pensé davantage en termes de partenariat, encourageant le fournisseur à travailler la demande du client pour l’améliorer si possible et ce faisant mieux le servir, qu’en termes de diligence et d’efficacité dans la livraison de ce qui a été spontanément demandé. L’exigence d’être convaincu pour bien agir et la satisfaction d’avoir pu faire valoir ses compétences pour enrichir la demande adressée s’expriment de la même manière à l’égard du supérieur hiérarchique ou du client.
Une conscience limitée de notre singularité
Les salariés français n’ont en général qu’une conscience limitée de l’originalité de leur façon d’agir et de son impact sur le déroulement des coopérations internationales. L’imbrication évidente des facteurs organisationnels et culturels ouvre, en effet, bien d’autres pistes, toutes valides, pour rendre compte de ces difficultés. L’universalisme français est plus à l’aise dans l’application à ces nouvelles situations de travail de grilles de lecture « classiques » et « éprouvées » que dans leur interprétation en termes d’habitus culturel ancré dans une longue histoire que notre modernité n’a manifestement pas effacée.
Il serait excessif d’affirmer que les différences culturelles nationales sont ignorées mais elles tendent à être fortement relativisées. Il arrive fréquemment qu’elles soient hâtivement assimilées à d’autres différences, telles celles qui séparent les différents métiers ou les différentes filiales d’un groupe, dont les effets, déjà expérimentés par ailleurs, sont regardés comme maîtrisables. La différence culturelle est d’abord assimilée à sa dimension identitaire (se représenter soi-même comme Français et être perçu par les autres comme tel), susceptible d’évoluer au contact des autres, et, secondairement, à des manières de faire, elles aussi susceptibles d’être transformées.
Cette représentation tendra à accorder un statut résiduel aux explications proprement « culturelles » des difficultés rencontrées dans les coopérations internationales. Des managers sceptiques à l’égard du poids des cultures nationales préféreront concentrer leurs efforts sur ce qu’ils regardent comme les données « objectives » de la situation. Former les acteurs au bon usage des langues, établir des glossaires, clarifier les organigrammes et actualiser les bases de données permettant aux équipes internationales d’identifier plus vite les contextes de travail de leurs collègues étrangers, deviennent alors des priorités regardées comme plus urgentes que s’engager dans une sensibilisation des membres de ces équipes internationales de travail à une dimension culturelle perçue comme difficile à cerner.
Bien des cadres internationaux, qui déclarent se sentir plus « proches » de leurs homologues étrangers que de leurs compatriotes exerçant un autre métier dans une autre filiale, font bon marché des repères communs qu’ils mobilisent, de concert avec ces compatriotes dont ils se déclarent éloignés, pour « gérer » leurs différences, dissiper leurs malentendus et réguler leurs conflits.
L’exposition à de nouveaux risques
Le développement international des entreprises mobilise aujourd’hui une fraction de plus en plus importante des salariés aussi bien parmi la maison mère qu’au sein des filiales. C’est l’ensemble de l’entreprise qui est concerné par un double processus d’intégration transversale et transnationale des compétences de ses agents. La séparation usuelle entre la dimension « technique et organisationnelle » (comment coordonner les efforts des parties prenantes) et la dimension « gestion des ressources humaines » (comment les inciter à coopérer ensemble) ne peut être conservée plus longtemps.
À ne pas le faire, les entreprises internationales s’exposent à des risques d’autant plus pernicieux qu’il existe généralement peu de signaux avant-coureurs des ruptures de confiance qui se manifestent entre la culture dominante, héritée généralement de la maison mère, et les autres cultures auxquelles continuent à se référer les collaborateurs recrutés sur d’autres continents.
L’écueil le plus redoutable qui menace désormais ces coopérations ordinaires n’est pas, comme on pourrait l’imaginer, le conflit (qui aurait au moins le mérite d’alerter les responsables) mais bien le retrait. La plupart des acteurs impliqués dans ces coopérations hésitent à se plaindre ouvertement, craignant qu’une telle attitude (dont ils ignorent comment elle serait comprise et accueillie) n’empire la situation. Dans le même temps, l’éloignement géographique accorde une étonnante impunité à tous ceux qui ne souhaitent pas s’impliquer dans ces fonctionnements transversaux au-delà de ce qu’ils souhaitent. Les démissions surprises de certains collaborateurs ne sont pas seulement dues, comme certains voudraient le croire, à l’attraction exercée par quelques dollars de plus mais bien souvent au sentiment de ceux qui s’en vont de ne pas avoir pu exercer leur responsabilité en accord avec leurs convictions.
Pour une sensibilisation renforcée
La tentation est grande pour les entreprises d’origine française d’afficher leur stature internationale en accordant l’ensemble de leurs faits et gestes aux standards « internationaux ». Bien des données objectives de leur situation les y engagent, à commencer par les analystes financiers ou les fabricants de progiciel de gestion. Elles sont, dans une telle perspective, faiblement incitées à s’interroger sur ce qui, dans les attitudes et les comportements de leurs collaborateurs, est susceptible de déconcerter ou parfois de scandaliser leurs partenaires étrangers.
Pourquoi, au fond, ne pas faire sienne l’idée, qu’à l’image de l’anglais qui sert aujourd’hui de langue de communication entre les équipes de travail du monde entier, les règles, les mœurs et les usages anglo-saxons pourraient demain tenir lieu de mode de coordination et de système d’incitation qui s’étendraient à la planète entière ? Ne voit-on pas déjà les nouvelles élites du continent asiatique se former massivement au management à l’anglo-saxonne et emboîter le pas aux élites européennes déjà largement converties ? À supposer qu’elle parvienne à pénétrer les esprits et les cœurs, cette convergence en devenir aurait tôt fait d’aligner les repères. Les exemples qu’on a fournis montrent qu’il y a encore loin de la coupe aux lèvres.
La distance qui sépare la réalité des apparences n’est pas moindre aux quatre coins du globe où partout les spécificités culturelles doivent être prises en compte pour réellement saisir les leviers et les contraintes pesant sur la mobilisation des énergies locales et leur coordination. Est-on bien sûr que ces nouveaux managers des pays émergents, parlant anglais et utilisant un vocabulaire managérial standardisé, aient fondamentalement modifié leurs manières de gérer leurs propres équipes5 ? Afficher sa volonté de respecter l’identité culturelle de ses partenaires locaux est une noble posture.
Encore convient-il de s’en donner réellement les moyens. Un effort considérable de recherche et de développement est requis, à l’image de celui engagé il y a bien longtemps pour développer des connaissances sur les comportements étranges des consommateurs des pays où les entreprises internationales ont cherché à s’implanter. Certaines grandes entreprises françaises l’ont bien compris qui se sont engagées de façon pionnière dans une telle voie.
1. Sylvie CHEVRIER, Le management des équipes interculturelles, PUF, 2000.
3. Philippe d’Iribarne, L’étrangeté française, Seuil, 2006.
4. Philippe d’Iribarne, « Comment s’accorder : une rencontre franco-suédoise » in Philippe d’Iribarne, Alain Henry, Jean-Pierre Segal, Sylvie Chevrier, Tatjana Globokar, Cultures et Mondialisation, Points Seuil, 2002.
5. Jean-Pierre Segal, « Cultures et management : la nouvelle donne de la mondialisation » in Revue Économique et Sociale, Lausanne, septembre 2005.