Aider les jeunes au cours des stages civils

Dossier : ExpressionsMagazine N°638 Octobre 2008
Par Pauline SERRAZ

Les élèves fraî­che­ment inté­grés à l’É­cole poly­tech­nique partent en stage de for­ma­tion humaine dans les armées ou dans des orga­nismes civils. Voi­ci quelques exemples de stages au cours des­quels les élèves se sont frot­tés avec des jeunes issus de milieux sou­vent défavorisés.

» Accepter de ne pas pouvoir tout résoudre »

Guillaume Lachaus­sée et Hicham Amra­ni, X 2007, ont effec­tué leur stage civil de pre­mière année au col­lège du Mou­lin-Joly, à Colombes, dans des classes de la sixième à la troisième.

» Mes acti­vi­tés étaient variées, raconte Guillaume. Je fai­sais du sou­tien sco­laire dans toutes les matières lors des séances d’é­tudes pro­po­sées au col­lège. Cela per­met­tait aux élèves d’a­voir de l’aide pour leurs devoirs et de poser des ques­tions aux­quelles ils ne trouvent pas for­cé­ment la réponse chez eux. Je par­ti­ci­pais à l’é­cole ouverte, le mer­cre­di après-midi. Le fait que les élèves choi­sissent de venir est une forte expli­ca­tion de l’a­mé­lio­ra­tion par­fois spec­ta­cu­laire de leurs résul­tats. Par ailleurs, des acti­vi­tés ponc­tuelles étaient orga­ni­sées avec l’é­quipe péda­go­gique, comme des séances de tra­vaux pra­tiques, des dédou­ble­ments de classe, des exer­cices sur ordi­na­teur, etc. J’in­ter­ve­nais alors en ren­fort du pro­fes­seur sur une séance particulière.

» Le gros écueil en début de stage est l’at­ta­che­ment fort à cer­tains élèves en situa­tion dif­fi­cile. Il faut pour­tant accep­ter de ne pas pou­voir tout résoudre. »

Trem­plin
Fon­dée en 2000 à l’X par quelques étu­diants, cette Asso­cia­tion a pour voca­tion d’ai­der des lycéens de milieux modestes à réus­sir des études longues. Sa prin­ci­pale inter­ven­tion consiste à pro­po­ser des séances de maths et phy­sique de niveau classes pré­pas à des lycéens de pre­mière S et de ter­mi­nale S en lycées sen­sibles, pour les sti­mu­ler et les moti­ver vers des études sélec­tives. Trem­plin s’oc­cupe d’en­vi­ron 200 à 250 jeunes, qu’elle essaye de suivre ensuite après le bac.
L’As­so­cia­tion sou­haite créer un réseau des élèves pour les suivre après leur passage.

Une vision neuve

La nou­veau­té joue un grand rôle dans l’in­té­rêt des élèves. Le seul fait d’a­voir une nou­velle pré­sence dans la classe, avec une vision neuve des choses, les intrigue et les incite à s’im­pli­quer davan­tage. » J’ai par­fois un sen­ti­ment de gâchis, car ils ont une éner­gie folle, sou­vent dif­fi­cile à cana­li­ser, qui mène cer­tains à l’é­chec sco­laire alors qu’ils sont très capables. Ils ne s’en rendent sou­vent pas compte aus­si jeunes. S’il n’y a pas de solu­tion miracle, notre pré­sence repré­sente quelque chose pour les élèves ; leur recon­nais­sance n’est pas tou­jours expri­mée, mais un simple mer­ci signi­fie beau­coup. C’est ce que j’ai appré­cié le plus dans cette expé­rience : être utile, rendre service. »

» Leur faire reprendre confiance en eux »

Steve Guillou et Nabil Aque­dim, X 2007, ont pas­sé leur stage civil de pre­mière année au sein de l’As­so­cia­tion » Tremplin « . 

Un souhait d’études scientifiques

» Nous étions répar­tis dans cinq lycées de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne pour des séances d’une heure trente à deux heures d’ap­pro­fon­dis­se­ment scien­ti­fique avec les élèves.

Il faut évi­ter de se lais­ser débor­der par les dif­fi­cul­tés des élèves et savoir conser­ver une cer­taine distance

Les sujets partent du pro­gramme sco­laire pour s’é­tendre au pro­gramme des classes pré­pa­ra­toires. Les élèves sont tous volon­taires et veulent déjà faire des études scien­ti­fiques, sans bien savoir où, ni com­ment. Deux séances d’es­sai ont eu lieu en début d’an­née puis nous nous sommes retrou­vés avec une soixan­taine d’é­lèves cha­cun, répar­tis en groupes de taille très variable. Nous avons fait avec eux beau­coup de maths et un peu de phy­sique. Mais pas seule­ment. Nous avons aus­si beau­coup évo­qué leur orien­ta­tion afin d’af­fi­ner leurs sou­haits et de les sen­si­bi­li­ser à toutes les filières scientifiques. »

S’entraîner aux concours

» Nous avons aus­si pré­pa­ré 25 élèves pour le concours des écoles à pré­pa inté­grée, lors d’un stage pen­dant les vacances sco­laires. Il leur a per­mis de connaître ce type de concours et de s’en­traî­ner au bac par la même occasion.

Pour les encou­ra­ger à se pré­sen­ter à ces concours, Trem­plin s’est enga­gée à payer la tota­li­té du pre­mier concours et 90 % à par­tir du second.

» En plus de ces acti­vi­tés avec les lycéens, nous nous sommes retrou­vés, entre 3 et 6 étu­diants de l’X et de l’ENS, les same­dis après-midi à l’A­gro, pour un sui­vi des anciens élèves de l’As­so­cia­tion qui font aujourd’­hui des études supé­rieures scien­ti­fiques. Nous aidions ain­si 15 à 20 anciens élèves à com­prendre leurs cours et à faire leurs devoirs. »

Tout le monde n’a pas un accès égal aux études supé­rieures, et ce n’est pas seule­ment une his­toire de niveau sco­laire. Beau­coup d’é­lèves sont peu et mal infor­més ou sont inhi­bés ; ils n’osent pas parce qu’au­cun de leurs copains ne fait ça. Trem­plin leur fait reprendre confiance en eux et se lan­cer. Les ambi­tions changent au cours de l’an­née. Trem­plin les conseille dans leurs choix, selon leurs apti­tudes et leur personnalité.

Trem­plin pro­pose aus­si une dizaine d’é­lèves pour la bourse Suez (3 000 euros par an pen­dant trois ans contre… un stage rému­né­ré chez Suez) et un dis­po­si­tif de par­rai­nage per­met aux jeunes de l’As­so­cia­tion qui viennent de pas­ser leur bac, d’être sui­vis par de jeunes ingénieurs. »

L’action sociale de la Kès

En paral­lèle, et sou­vent en col­la­bo­ra­tion avec d’autres binets, l’ASK – Action sociale de la Kès – regroupe des acti­vi­tés sociales, et pro­pose une ouver­ture sur les autres et sur le monde.

L’ASK est un binet qui dépend de la Kès (bureau des élèves) de l’É­cole. Son ori­gine pro­vient du rôle joué par la Kès dès la fin du xixe siècle, qui était de sou­la­ger les misères dans le quar­tier pauvre de la Mon­tagne Sainte-Gene­viève. Aujourd’­hui, l’ASK regroupe les dif­fé­rentes acti­vi­tés à carac­tère social de l’É­cole, acti­vi­tés régu­lières ou ponc­tuelles. Ces der­nières sont nom­breuses, ce qui per­met d’a­voir tou­jours des volon­taires, même si l’on ne retrouve pas les mêmes élèves d’une fois sur l’autre. De nou­velles acti­vi­tés per­met­tront de » recru­ter » davan­tage par­mi les élèves, mais aus­si par­mi les mas­ters et les doctorants.

Soutien scolaire aux plus démunis

Beau­coup de jeunes sont mal infor­més ou inhi­bés face aux études supérieures

Les acti­vi­tés régu­lières tournent en grande par­tie autour du sou­tien sco­laire, effec­tué par deux asso­cia­tions par­te­naires, pour les élèves de col­lège et de lycée de ZEP. » Pour aider les plus dému­nis, pré­cise Marie Strauss, pré­si­dente de l’ASK, nous tra­vaillons avec le centre de la Chor­ba, où des X dis­tri­buent de la soupe et du café, ou bien effec­tuent des maraudes. Par ailleurs, l’AS­LIVE (Asso­cia­tion de sport et loi­sirs pour les inadap­tés de Ver­sailles et des envi­rons) emmène des han­di­ca­pés men­taux, un week-end par mois et deux semaines l’é­té, dans une mai­son de cam­pagne, tan­dis qu’un par­te­na­riat avec ALIS (Asso­cia­tion du locked-in syn­drom) est en créa­tion, afin de rendre visite aux per­sonnes atteintes de ce han­di­cap et leur chan­ger les idées. »

Collectes et promesse de dons

Oui, nous sommes à l’i­ni­tia­tive de col­lectes d’argent ponc­tuelles dans les bars d’é­tage pour la banque ali­men­taire, de col­lectes de vête­ments pour Emmaüs, de récoltes de pro­messes de dons de pla­quettes lors de la semaine du défi pla­quettes, et nous sub­ven­tion­nons, en par­te­na­riat avec l’A­mi­cale des anciens élèves de l’X, les stages huma­ni­taires effec­tués au titre de stage de contact humain par les élèves poly­tech­ni­ciens entre leur deuxième et leur troi­sième année. Nous ser­vons éga­le­ment de relais d’in­for­ma­tion sur les acti­vi­tés pra­ti­quées par les autres écoles.

Poster un commentaire