Internet, intranet et la santé

Dossier : InternetMagazine N°524 Avril 1997Par Charles ROZMARYN (63)

En matière de san­té, Inter­net est bien enten­du lar­ge­ment uti­li­sé pour les don­nées scien­ti­fiques avec ses fonc­tions clas­siques. De même des entre­prises phar­ma­ceu­tiques peuvent avoir leur propre site. Mais ces usages ne sont pas spé­ci­fiques au domaine de la santé.

En effet il n’y a pas, aujourd’hui en France, de sys­tème géné­ral de ges­tion de la san­té. Les dif­fé­rents acteurs sont très nom­breux, sans oublier la CNIL, et repré­sentent des inté­rêts assez diver­gents. Ils ne se sont pas enten­dus sur les objec­tifs et les spé­ci­fi­ca­tions d’une infor­ma­tique gérant la san­té en France. Il n’y a qu’une jux­ta­po­si­tion de cou­ver­tures des besoins ciblés de telle ou telle par­tie : ges­tion admi­nis­tra­tive d’un hôpi­tal, rem­bour­se­ment des feuilles de soin pour les caisses mala­dies… Par­mi les méde­cins ayant un ordi­na­teur, une part impor­tante ne l’utilise pas pour le médi­cal mais pour la ges­tion, dans le bureau de la secrétaire.

Dans le cadre du pro­jet Sésame Vitale, qui cor­res­pond aux besoins de la CNAM de gagner en pro­duc­ti­vi­té, les pro­fes­sion­nels de San­té seront équi­pés de micro-ordi­na­teurs pour trans­mettre aux caisses mala­die, via un réseau Intra­net, les fiches de soins. Un appel d’offres est en cours auprès des four­nis­seurs de réseau Intra­net. Le déploie­ment à l’ensemble des pro­fes­sions de San­té est pré­vu en 1998.

L’adoption pour ce réseau des normes Intra­net, plu­tôt que celles d’un réseau pro­prié­taire spé­ci­fique a donc été déci­dée pour pré­ser­ver le plus pos­sible l’avenir, en per­met­tant de réuti­li­ser faci­le­ment les équi­pe­ments et les logi­ciels. Les fonc­tions stan­dard d’Intranet pour­ront ser­vir à d’autres pro­jets de san­té. Mais l’utilisation de ces infor­ma­tions, ou des équi­pe­ments, dans un cadre plus géné­ral de la maî­trise et de la san­té en France n’est pas défi­nie. Il fau­dra, tou­te­fois, arri­ver à réa­li­ser, et spé­ci­fier l’ensemble du sys­tème d’informations et les infor­ma­tions de base (leur forme, leur codi­fi­ca­tion…) que l’on veut faire remon­ter, avec ou sans tran­sit, par les caisses mala­die. Cela néces­site que l’on s’accorde sur les ques­tions que l’on veut trai­ter, par exemple, le noma­disme médi­cal est-il impor­tant et veut-on le suivre ?

On peut s’attendre à ce que la mes­sa­ge­rie soit rapi­de­ment uti­li­sée entre professionnels :
– au sein du sec­teur libé­ral pour envoyer le patient du géné­ra­liste au spé­cia­liste, au radio­logue, et assu­rer le fonc­tion­ne­ment véri­table du réseau inter-per­son­nel des soins liés au malade, rom­pant l’isolement du pra­ti­cien privé,
– pour l’envoi, par le méde­cin qui suit le patient, du dos­sier du malade, lorsqu’il le dirige vers l’hôpital ou un méde­cin hos­pi­ta­lier : on peut en attendre une réduc­tion des exa­mens faits à l’arrivée à l’hôpital alors qu’ils ont été déjà été faits à l’extérieur. Cette pro­cé­dure engen­dre­ra une éco­no­mie finan­cière mais aus­si de temps et de confort psy­cho­lo­gique pour le patient. Tout ceci néces­site des chan­ge­ments cultu­rels, moins dif­fi­ciles si chaque acteur en retire un bénéfice.

Avec la géné­ra­li­sa­tion de microor­di­na­teurs, on devrait obser­ver une plus forte dif­fu­sion de logi­ciels d’aide médi­cale : pres­crip­tion avec détec­tion d’incompatibilité entre médi­ca­ments, sui­vi du coût de l’ordonnance avec pro­po­si­tion de médi­ca­ments alter­na­tifs moins chers, sui­vi du dos­sier médi­cal des patients, consul­ta­tion du Vidal sur écran. Aujourd’hui ces logi­ciels fonc­tionnent de manière auto­nome mais les besoins de rafraî­chis­se­ment sont fré­quents. La dis­po­ni­bi­li­té chez tous les pro­fes­sion­nels de San­té du réseau, avec les normes du mar­ché, per­met­tra de leur dif­fu­ser les mises à jour au moindre coût.

On peut aus­si ima­gi­ner beau­coup d’autres appli­ca­tions. Tou­te­fois, les fonc­tions qui ont sou­vent été mises en avant, par exemple le télé­diag­nos­tic, paraissent assez futu­ristes en France. Il y a très peu de cas où un méde­cin com­pé­tent ne peut rejoindre sur place un patient qui en a besoin. L’expérience mon­tre­ra ce qui est fai­sable et utile.

Le réseau Intra­net est donc un élé­ment impor­tant dans l’état actuel des choses. Il est neutre, non contrô­lé par un acteur unique, faci­li­tant ain­si la mise en com­mun des appli­ca­tions. C’est un élé­ment tech­nique d’ouverture per­met­tant, mais n’assurant pas à lui tout seul, des évo­lu­tions dans le vaste domaine de la santé.

Pro­pos recueillis par Jean-Marc LE CORFEC (77)

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