Science et philosophie
Alain Stahl (44, major de sortie) nous offre un ouvrage monumental sous la forme d’une publication des Éditions philosophiques Vrin et d’un ensemble important d’annexes accessibles sur son site Web.
La bizarrerie des structures académiques héritées du passé a conduit A. Stahl à soutenir une thèse scientifique dans un doctorat de “ lettres ”.
Son ouvrage couvre le champ complet de disciplines scientifiques. Il offre une vision encyclopédique de l’état de la Science, mais il apporte ce qui manque généralement aux encyclopédies et aux “ atlas ” : une analyse critique des fondements, des hypothèses et des théories.
Cette dialectique de l’auteur avec son sujet relance en permanence l’intérêt du lecteur qui – c’est mon cas – rentre dans ce jeu et ferraille avec les idées. Cette analyse n’est pertinente que grâce à une assimilation complète de tous les sujets abordés : Stahl a dû acquérir “ tous les savoirs ”, et la condensation de ses exposés suppose chez le lecteur une culture scientifique. Une telle lecture n’est accessible qu’à un public tel que celui de La Jaune et la Rouge. Notons cependant que les textes les plus ardus se trouvent dans les Annexes. Mais l’ouvrage de Vrin est déjà par lui-même une somme imposante. Et pourtant, la simplicité et la clarté de l’écriture, la limpidité de la pensée font que le lecteur trouve le chemin facile et accompagne l’auteur en se jouant… Mais voilà qu’il arrive qu’il se retrouve tout seul, et qu’il constate que son guide a continué la route, mais plus haut, plus haut, et alors il faut faire l’effort. Mais cet effort est toujours récompensé.
Le plus grand bonheur de ce livre est l’expression des attitudes personnelles de l’auteur.
Elles sont affirmées sans aucune jactance. La quête d’une réconciliation de la philosophie et de la science, l’ambition de l’unification de la science sont exposées comme un besoin profond de l’auteur, mais les hypothèses et les thèses qui s’affrontent sont toujours exposées dans la clarté. Que l’on espère une unification future du champ de la connaissance, ou que l’on croie que “ les ” sciences seront, pour longtemps, peut-être pour toujours, réduites à mesurer et à construire le monde à différents niveaux d’échelle, on trouve le même enrichissement dans cette pensée limpide.
Il n’y a pas, à ma connaissance, d’ouvrage ayant abordé de manière aussi globale et, en même temps aussi détaillée, l’état de la science, et ce que peut en dire une “ philosophie de la nature moderne ” (sous-titre de l’auteur).