Les musiques de l’humanité
Les auteurs constatent avec nous tous que la musique envahit notre vie quotidienne. Pour eux il s’agit souvent d’un “ bruit de fond anesthésiant sinon hypnotique ”. Je suis personnellement plus sévère : la seule fois de ma vie où j’ai tenté de fomenter une grève, c’était pour inciter les vendeurs d’un magasin d’alimentation luxueux à exiger la suppression au moins partielle de ce bruit de fond fatigant. Il est significatif que j’ai échoué !
Nos auteurs s’interrogent sur cette banalisation extrême, mais restent persuadés que “ la musique reste un humanisme ”. Essayons de partager leur optimisme.
Leur objectif me paraît d’ailleurs être surtout d’appeler l’attention, par des informations données sous une forme agréable, sur les instruments et les musiques souvent mal connues – et ce non pas par parti pris d’exotisme, mais en raison de la richesse artistique et humaine que dévoile une extrême diversité.
L’ouvrage ne se veut pas une encyclopédie de la musique ; il offre un choix qui réussit fort bien à capter et à retenir notre attention. Aussi serait-il injuste de reprocher aux auteurs la brièveté de certains paragraphes : ce qui est dit, par exemple, sur quelques instruments occidentaux me paraît répondre seulement au désir de faire ressortir succinctement les différences avec des instruments décrits ailleurs plus en détail parce que nous les connaissons en général incomparablement moins bien. Une remarque analogue pourrait être formulée, par exemple sur le jazz.
Le plan et le contenu du livre sont propres à donner une idée d’ensemble de ce que représente aujourd’hui la musique et plus particulièrement en France.
C’est pourquoi, après trois parties consacrées aux instruments, aux différentes musiques du monde et aux genres du discours musical, une dernière partie (Musique et Société) donne sur les métiers de la musique et l’activité économique correspondante des informations intéressantes et utiles, ordres de grandeur à l’appui.
Des annexes de caractère un petit peu plus technique et deux lexiques complètent utilement l’ouvrage.
Lorsque, dans l’annexe “ La science de la musique ”, les auteurs citent le remarquable Traité d’harmonie d’Arnold Schoenberg, peut-être n’insistent- ils pas assez sur le fait que les concepts de tonalité, d’harmonie, de mélodie, de rythme, ainsi que leur importance relative, n’ont à peu près aucun caractère absolu, mais sont étroitement dépendants de la culture musicale dont l’auditeur, le compositeur ou l’exécutant est imprégné.
Et si, en conséquence, la satisfaction éprouvée à l’audition d’une œuvre n’est pas toujours immédiate, l’ouvrage de Michel Malherbe et Amaury Rosa de Poullois a le mérite de nous donner bien des raisons de nous ouvrir à d’autres musiques que celles de notre tradition et de notre culture et de nous aider peut-être à accéder à de nouvelles satisfactions.