Jacques Vincent-Carrefour (55)
Jacques prend la responsabilité de l’informatique à Lannion avec deux objectifs : apporter des moyens de calcul scientifique aux chercheurs du centre, et trouver les meilleures solutions pour les fonctions de commande et de gestion informatisées pour le projet Platon (Prototype lannionais d’autocommutateur téléphonique à organisation numérique).
La voie d’avenir
Depuis 1960, Louis-Joseph Libois et André Pinet, responsables du CNET Lannion, savaient que la voie d’avenir, aussi bien pour les télécommunications que pour l’informatique, était celle du numérique binaire avec de la mémoire.
Lors du colloque du Tricentenaire de la mort de Pascal (1962), Jacques Vincent-Carrefour et Jean-Baptiste Jacob assistent à des exposés théoriques, mais aussi plus pratiques sur le calcul électronique. Ce qui frappe les deux ingénieurs est la présentation d’un ordinateur Packard Bell, le PB 250, commercialisé en 1961, un des derniers à utiliser des lignes à retard magnétostrictives comme élément de mémoire.
À leur retour, ils décident de faire d’une pierre deux coups : utiliser les lignes magnétostrictives pour réaliser les fonctions logiques de commande et le PB 250 pour le centre de traitement des informations de Platon. La maquette fonctionne en 1965.
Logiciels spécifiques
Il soude lui-même des composants sur des cartes
La seconde étape est de réaliser un deuxième exemplaire du calculateur expérimental Ramsès en vue de l’affecter au Centre de traitement de l’information (CTI) du réseau Platon. Pressé d’en disposer, Jacques se met parfois à souder lui-même des composants sur des cartes.
La mise en œuvre de ces deux calculateurs nécessite le développement de logiciels spécifiques. La mise au point d’une bibliothèque de calcul scientifique et d’un compilateur Fortran III est ainsi assurée. La gestion informatisée de Platon a permis, à partir de 1972, le déploiement d’un réseau téléphonique entièrement numérisé, une première mondiale.
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Le goût des maths
Jacques Vincent-Carrefour était intéressé par les mathématiques au point d’emporter Les Éléments de mathématiques de Bourbaki pour ses longs voyages par le train entre la Bretagne et Paris.
Affecté en 1975 à la direction des Affaires industrielles et internationales de la direction générale des Télécommunications, Jacques y est chargé de l’orientation des recherches du CNET et du développement industriel en commutation électronique et en informatique.
Puis il retourne à Lannion en 1979 pour diriger le nouveau centre Lannion A, en coordination avec Jean Jerphagnon, nommé directeur du centre Lannion B, deux centres nouvellement créés par le CNET. Leur mission est d’assurer une relance de l’établissement. Il s’agit notamment de réorganiser les activités de recherche et de lancer de nouveaux projets.
Tous ceux qui ont travaillé avec lui ont gardé le souvenir ému d’un patron de haute compétence, passionné et proche de ses collaborateurs.
La bonne impulsion au bon moment
Jacques n’occupe cette fonction que pendant deux ans, mais il a donné la bonne impulsion au bon moment. En 1981, il apporte un concours inestimable à la définition des programmes de tout le CNET. En 1987, il est nommé Délégué interministériel à la sécurité des systèmes d’information.
Au début des années 2000, il est l’un des fondateurs de la toute nouvelle Académie des technologies.
Mais il avait aussi un jardin secret, la botanique, qui tiendra une grande place dans la fin d’une existence trop courte.