Chercheur au quotidien
Sébastien Balibar vient de nous offrir un petit ouvrage qui donne à goûter toute la saveur du métier de chercheur en physique fondamentale.
Tous, en passant à l’École, et certains d’entre nous dans nos métiers dans l’industrie, nous avons pu sentir la puissance de la science du XXe siècle, l’enracinement des technologies modernes dans la science la plus avancée.
Je tiens personnellement pour évidente l’absolue nécessité, pour rester parmi ceux qui vont construire l’avenir et qui ne se contentent pas d’espérer le vendre, que la science demeure la pièce maîtresse de l’enseignement à l’X. Prétendre qu’il faut arrêter de faire de la science à l’X parce que l’on a appris à calculer en taupe me semble aussi intelligent que de décider qu’on sait bien assez de musique une fois qu’on sait faire des gammes et que de pratiquer les exercices de Charles-Louis Hanon dispense de jouer Beethoven.
Pourtant, il ne s’agit pas dans ce livre de nécessité, mais de plaisir. Sébastien Balibar nous donne à sentir la joie de « la manip », l’inquiétude au frémissement des pompes à vide, l’attention presque affectueuse portée au « frigo », etc. Et ce qu’il dit sur sa quête pour comprendre le comportement de ce solide exotique qu’est l’hélium à très basse température résonne chez tout chercheur, que son objet soit de pure connaissance ou de technologie.
Chez Sébastien, c’est de passer du fer à souder à la perplexité devant la plasticité géante de ses cristaux, c’est de confronter l’expérience méticuleuse aux interprétations théoriques, c’est de discuter encore et toujours en petit comité de ce qui reste incompris, paradoxal, surprenant…
Chez d’autres ce sera les très grands projets où des équipes de centaines de personnes traquent les briques élémentaires de l’univers. Chez d’autres encore, ce sera le verrou technologique à faire sauter, etc.
Dans sa réflexion sur la science, Sébastien n’en exclut aucune forme pourvu que la rationalité scientifique, la remise en cause constante et constructive qui va avec soient au centre de la démarche. C’est cette jubilation de participer à la patiente construction du savoir que tous les chercheurs reconnaîtront dans ce petit livre.
lors, que vous soyez chercheur, ou que vous n’ayez plus qu’un vague souvenir de vos études scientifiques, lisez ce livre : ce n’est jamais sans profit qu’on prend le temps d’écouter une passion intelligente.