Polar Pod à la découverte de l’océan austral
Le Polar Pod est un vaisseau de recherche conçu pour dériver en deux ou trois ans tout autour de l’Antarctique, porté par le courant Circumpolaire entre 50° et 55° S, les Cinquantièmes Hurlants.
“ Les missions lointaines sont devenues trop coûteuses ”
L’océan Austral est encore mal connu. Les données recueillies par les satellites, les balises automatiques ou les capteurs posés sur des éléphants de mer ou des albatros ne suffisent pas.
La présence humaine est indispensable pour effectuer des mesures in situ, mais les navires de recherche s’aventurent rarement en ces lieux. Les missions lointaines sont devenues trop coûteuses.
La stabilité verticale du Polar Pod va permettre d’effectuer des mesures très précises sur les échanges entre atmosphère et océan.
REPÈRES
L’océan Austral joue un rôle essentiel pour le climat de la planète. Faisant le tour du continent Antarctique, il brasse les eaux de l’océan Indien, de l’Atlantique et du Pacifique ; c’est un des moteurs de la circulation océanique mondiale. De plus, ses eaux froides sont avides de gaz carbonique : c’est un des puissants « puits de carbone » de la planète : dans quelle proportion ?
Explorer la faune aquatique
Les essais confirment la bonne tenue à la mer.
Les hydrophones fixés à 70 mètres sous la surface écouteront les conversations animales. Chaque espèce ayant sa signature sonore, un inventaire complet sera réalisé, du krill à la baleine bleue.
Troisième domaine d’étude, la validation calibration des mesures satellitaires dans cette région du monde très peu fréquentée. Nous avons reçu de très nombreuses lettres d’intérêt du monde entier pour participer à cette exploration océanographique inédite.
Affronter des conditions extrêmes
Le Polar Pod est inspiré du Flip, un navire vertical construit en 1962 par la marine américaine pour écouter les sous-marins dans le Pacifique.
TROIS QUESTIONS À JEAN-LOUIS ÉTIENNE
Quel parcours vous a amené à cette expédition ?
Docteur en médecine, ancien interne en chirurgie, spécialiste de nutrition et de biologie du sport, j’ai participé à de nombreuses expéditions en Himalaya, au Groenland, en Patagonie et à la course autour du monde sur Pen Duick VI avec Éric Tabarly (1977−1978). En 1986, je fus le premier homme à atteindre le pôle Nord en solitaire, tirant moi-même mon traîneau pendant 63 jours. Puis j’ai réalisé la plus longue traversée de l’Antarctique jamais réalisée en traîneaux à chiens : 6 300 kilomètres. En 1988, j’ai fait construire Antarctica le voilier polaire emblématique aujourd’hui rebaptisé Tara. En avril 2010, il réussit la première traversée de l’océan Arctique en ballon.
Quelles ont été vos contributions scientifiques à la connaissance des océans ?
J’ai surtout mené des projets pédagogiques (scolaires et grand public) à partir des expéditions que j’ai faites. Au début sur Édutel (Minitel de l’Éducation nationale), puis sur Internet. Sur Antarctica nous avons été les premiers à développer l’usage d’Internet à l’école.
Quelles conditions difficiles ou exceptionnelles de navigation avez-vous rencontrées ?
Hormis les navigations difficiles dans les glaces au Spitzberg et en mer de Ross en Antarctique, j’ai rencontré les plus gros états de mer dans le Pacifique Sud au cours de la course autour du monde sur Pen Duick VI avec Éric Tabarly.
Propos recueillis par Dominique de Robillard (74)
Laurent Mermier, du bureau d’ingénierie navale Ship ST à Lorient, lui a donné corps. Alimenté en énergie par quatre éoliennes, isolé par des cloisons sous vide, équipé pour le traitement des déchets, ce labo high-tech pourra accueillir sept personnes avec une « signature » proche de zéro émission.
En décembre 2014, des essais sur une maquette au 1⁄41e ont été réalisés au bassin des carènes Ifremer à Brest, sous la responsabilité de Marc Le Boulluec. Sur des houles de 7 et 11 mètres de creux, le bateau a une remarquable stabilité verticale, avec un faible pilonnement.
On constate cependant un mouvement de tangage dans la zone habitée située entre 10 et 30 mètres au-dessus de la flottaison, provoquant des accélérations entre 0,1 et 0,3 g compatibles avec le confort au travail de l’équipage. Ce tangage peut être corrigé en faisant varier la hauteur du flotteur cylindrique intermédiaire et le volume des tubes du treillis au-dessus de la flottaison.
Une vague de 25 mètres de creux à crête vient affleurer à la partie inférieure de la partie habitable. Dans l’ensemble, ces essais confirment la bonne tenue à la mer dans les Cinquantièmes Sud.
La mise en chantier devrait débuter en septembre 2015 pour une mise à l’eau en mai 2016 et un départ de l’expédition à l’été austral 2017.
Une trantaine de lettres d’intérêt
Cette campagne a suscité beaucoup d’intérêt et nous avons reçu une trentaine de sollicitations.
“ La mise en chantier devrait débuter en septembre 2015 ”
Celles-ci couvrent essentiellement trois domaines d’étude. Tout d’abord, les échanges entre atmosphère et océan. En effet, les eaux froides de l’océan Austral sont un puits de carbone dont on ne connaît pas les performances. En second lieu, les mesures acoustiques.
On connaît aujourd’hui la signature sonore de toutes les espèces ; les hydrophones placés à 75 mètres sous l’eau permettront de faire un inventaire de la faune marine.
Enfin, la validation et l’étalonnage des mesures faites par les satellites dans un secteur où se rendent très peu de navires.