Une visite au siège d’apprentis d’Auteuil
Une visite de cette énorme entreprise dirigée depuis l’année dernière par un de nos camarades. Plus de 5 000 salariès, autant de bénévoles, un chiffre d’affaires de 340 millions €.
Les quatres missions essentielles : Protéger l’enfance, Former, Insérer, Accompagner la parentalité.
Dans le forum social, nous avons à plusieurs reprises évoqué le défi pour la société française de se voir confrontée aux 110 000 jeunes qui, chaque année, quittent leur scolarité sans aucune qualification. On sait que les victimes sont principalement issues des milieux les plus défavorisés.
Nicolas Truelle (80) est directeur d’Apprentis d’Auteuil depuis l’année dernière. © J.-P. POUTEAU / APPRENTIS D’AUTEUIL 2015
LES RELATIONS AVEC LE MONDE DE L’ENTREPRISE
Plus de soixante entreprises soutiennent Apprentis d’Auteuil dans le cadre de projets nationaux ou locaux. Il s’agit de mécénat financier, mais aussi de mécénat en nature (dons de matériels, de produits, mise à disposition de locaux) ou de mécénat de compétences (mise à disposition de salariés sur leur temps de travail).
Treize clubs d’ambassadeurs rassemblent au niveau régional des dirigeants d’entreprises, l’ensemble constituant un réseau national de cent cinquante dirigeants qui mettent leur expertise et leurs carnets d’adresses au service des jeunes.
Malgré le gaspillage économique et les menaces pour la cohésion sociale que signifie l’échec scolaire dans une telle proportion, cela fait quarante ans qu’aucun gouvernement ni de droite, ni de gauche ne s’est donné les moyens d’entreprendre les réformes qui permettraient d’y remédier véritablement.
Nous avons consacré plusieurs articles à des écoles et à des collèges où des enseignants militants s’étaient attaqués au problème au niveau de leur établissement. Nous présentons ici une grande institution, Apprentis d’Auteuil, dont la fonction est d’accueillir tout au long de leur parcours éducatif des jeunes en difficulté et qui, à plus de 80 %, les achemine vers une qualification à la fin de leur scolarité.
Nous avons rencontré son directeur général, Nicolas Truelle, qui est un de nos camarades, de la promotion 1980. Ingénieur en chef au Corps des mines, il a occupé différents emplois dans l’industrie avant de prendre, en 2015, la direction d’Apprentis d’Auteuil.
REPÈRES
La fondation accompagne près de 25 000 jeunes, garçons et filles, majoritairement adolescents. La prise en charge peut s’effectuer depuis la naissance (crèches, centres maternels, etc.) et jusqu’à l’âge adulte dans le cadre de la formation continue.
230 établissements sont gérés en direct, en France métropolitaine et dans les DOM. 60 % des jeunes scolarisés sont accueillis en internat.
L’effectif est de 5 500 salariés, enseignants, éducateurs, puéricultrices, psychologues, personnels administratifs.
5 000 bénévoles apportent leur concours dans différents domaines.
Apprentis d’Auteuil est, de plus, engagé dans 54 pays d’Europe, d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine et du Nord en partenariat avec 195 organismes locaux.
Pour les enfants des rues
L’abbé Roussel a créé, en 1866, l’œuvre de la Première Communion dans le quartier d’Auteuil à Paris, afin de prendre en charge les enfants des rues, les « vagabonds », assurant leur avenir par la formation à un métier et par une éducation religieuse.
Si le vocabulaire a changé, l’institution affiche dès l’origine son projet d’assurer l’épanouissement et l’insertion sociale de jeunes en grande difficulté moyennant des prestations d’accueil, d’éducation et d’accompagnement vers la vie active.
En 1923, le père Brottier, qui avait été aumônier de l’armée durant la guerre de 1914–1918, est nommé directeur de l’œuvre. Tout en maintenant son caractère d’œuvre d’Église, Daniel Brottier décide d’accueillir tous les jeunes en renonçant à tout prosélytisme religieux.
Reconnue d’utilité publique en 1929, la fondation fête cette année son 150e anniversaire. Nicolas Truelle présente les activités de l’entreprise qu’il dirige autour de quatre missions.
Protéger l’enfance
LA GOUVERNANCE ET LES DONNÉES FINANCIÈRES DE LA FONDATION
Le conseil d’administration est composé de douze membres bénévoles, Nicolas Truelle étant le directeur général. Un commissaire du gouvernement désigné par le ministère de l’Intérieur veille au respect des statuts et du caractère d’utilité publique de la fondation.
En 2015, le chiffre d’affaires a été de 340 millions d’euros, les ressources provenant pour moitié de subventions publiques, le reste de la taxe d’apprentissage, du mécénat d’entreprises et de 300 000 donateurs individuels.
La gestion financière de la fondation fait l’objet d’un contrôle interne. L’utilisation des fonds publics est soumise au contrôle de la Cour des comptes. La fondation détient le label IDEAS qui reconnaît la qualité de la gouvernance, de la gestion financière et de l’efficacité des organismes du secteur associatif.
Apprentis d’Auteuil met en œuvre différents dispositifs d’accueil et d’accompagnement pour les jeunes en difficulté. 3 200 enfants et adolescents sont notamment pris en charge au titre de l’aide sociale à l’enfance (ASE), sur décision administrative ou judiciaire.
La plupart des jeunes accueillis au titre de l’ASE le sont plus ou moins longtemps dans l’une des cinquante-sept maisons d’enfants à caractère social (MECS) – deux dans les départements d’outre-mer – dont la fondation assure la gestion. En accord avec l’ASE, ils peuvent aussi être suivis à domicile par un éducateur.
La fondation assure des prestations d’accueil éducatif de jour (AEJ) pour des jeunes en grande difficulté scolaire ou en panne d’insertion sur le marché de l’emploi.
À Toulouse, à Saint- Denis de La Réunion et en Seine-et-Marne, des lieux d’accueil mère-enfant proposent un soutien psychologique et matériel, voire une solution d’hébergement à des jeunes femmes en situation précaire, enceintes ou mères d’enfants de moins de trois ans.
Apprentis d’Auteuil accompagne près de 700 mineurs étrangers isolés, leur offrant un environnement éducatif tout en les aidant à régulariser leur situation administrative.
Former
Les jeunes scolarisés par Apprentis d’Auteuil se répartissent entre quinze écoles primaires et maternelles, vingt-deux collèges et seize lycées (généraux, techniques, professionnels) sous contrat avec le ministère de l’Éducation et huit lycées sous contrat avec le ministère de l’Agriculture. Les niveaux de fin de scolarité vont du CAP aux différents baccalauréats et aux BTS.
En maternelle et en primaire, Apprentis d’Auteuil organise l’acquisition des connaissances et des compétences du socle commun avec des regroupements par niveaux de compétences.
© MARIE TREMOULET / APPRENTIS D’AUTEUIL
En maternelle et en primaire, Apprentis d’Auteuil organise l’acquisition des connaissances et des compétences du socle commun autour de parcours personnalisés avec des regroupements par niveaux de compétences et des projets artistiques, culturels ou sportifs dont le but est de donner du sens tout en mobilisant l’intérêt.
La transition du CM2 à la sixième fait l’objet d’une attention particulière, compte tenu du fait qu’à ce moment, pour beaucoup d’élèves, s’enclenche le processus qui aboutit au décrochage.
Plusieurs établissements ont mis en place des dispositifs de rattrapage des connaissances et des compétences supposées acquises à la fin du primaire.
Au collège comme au lycée, Apprentis d’Auteuil encourage l’internat qui permet à des animateurs et des éducateurs d’accompagner le travail des enseignants.
Insérer
Pour accompagner l’entrée des jeunes dans la vie active, Apprentis d’Auteuil les aide à surmonter les handicaps résultant de leurs déficits scolaires, de l’absence de qualification professionnelle, de leur méconnaissance des codes de la vie en société et du travail en entreprise.
La fondation aide ceux qui se destinent à l’apprentissage à définir leur projet, puis à trouver un centre de formation et un patron pour l’alternance.
© MARIE TREMOULET / APPRENTIS D’AUTEUIL
La fondation aide ceux qui se destinent à l’apprentissage à définir leur projet, puis à trouver un centre de formation et un patron pour l’alternance. Une fois sous contrat d’apprentissage, ces jeunes restent suivis par des équipes éducatives qui assurent le lien entre le jeune, la famille, le CFA et l’employeur.
Au-delà de l’obligation scolaire, elle aide les jeunes à trouver un employeur et aussi à résoudre les problèmes de logement, de mobilité, de régularisation administrative, etc.
La filiale Auteuil Formation continue (AFC) accueille les demandeurs d’emploi dans une quinzaine de centres qui leur dispensent des formations à différents métiers : BTP, mécanique, hôtellerie-restauration, agriculture, etc.
Des programmes collectifs sont notamment organisés en partenariat avec des entreprises pour répondre à un besoin (par exemple la formation de mécaniciens d’entretien d’engins de TP avec Bergerat-Monnoyeur).
Sept entreprises d’insertion emploient des jeunes pendant vingt-quatre mois afin de les familiariser avec la condition de salarié et de les aider à s’orienter. Un service d’orientation et d’insertion réalise des bilans de compétences pour permettre aux jeunes de faire le point sur leur potentiel, leurs motivations et leurs centres d’intérêt.
Une action visant la création d’entreprise est conduite en partenariat avec Planète Finance de Jacques Attali.
Accompagner le parentalité
Un service d’orientation et d’insertion réalise des bilans de compétences pour permettre aux jeunes de faire le point sur leur potentiel.
© MARIE TREMOULET / APPRENTIS D’AUTEUIL
Face à des familles souvent vulnérables et isolées, Apprentis d’Auteuil a fait le choix primordial de les assister et de les renforcer. Il s’agit notamment de prendre avec elles, dès les premières difficultés, les mesures nécessaires pour prévenir l’échec scolaire. Cet accompagnement prend différentes formes.
Auteuil Petite Enfance accueille les zéro-trois ans dans douze établissements qui, fonctionnant avec des horaires élargis, assurent un accompagnement des parents.
Selon un modèle emprunté au Québec, Apprentis d’Auteuil développe un programme de « maisons des familles », lieux de partage entre parents, professionnels et bénévoles. Trois maisons sont déjà opérationnelles et de nouvelles ouvertures sont prévues en 2016.
Des résidences sociales hébergent en appartements individuels de jeunes couples de 18 à 25 ans, en formation, en recherche d’emploi ou salariés à titre précaire. Une équipe éducative les aide à faire face à leurs difficultés, notamment ceux qui ont des enfants en bas âge.
« Écoute Info Familles » est un accueil téléphonique (01 81 89 09 50) assuré par une équipe de cinq professionnels qui répondent aux questions posées par des familles confrontées à des problèmes d’éducation.