Ponts et chaussées : l’innovation dans la continuité
Quelle était la valeur ajoutée de l’école des Ponts et Chaussées par rapport à l’école Polytechnique et l’université américaine ?
Il y a trente ans, l’école des Ponts et Chaussées était un excellent « pont » entre la formation conceptuelle suivie à l’X et les universités américaines plus pragmatiques dans leur enseignement.
Elle mariait intelligemment un excellent niveau théorique avec un apprentissage pratique de notre métier d’ingénieur.
À l’heure du tricentenaire du corps des Ponts et Chaussées, quel regard portez-vous sur l’évolution de votre ancienne école ?
L’innovation dans la continuité ! Pourquoi ? Parce que les disciplines fondamentales de l’ingénieur sont toujours enseignées à haut niveau, tout en préparant les élèves aux métiers du futur. Il y a une trentaine d’années, c’était, à ma connaissance, la seule Grande École à avoir noué des relations avec des universités américaines prestigieuses (M.I.T, Harvard, Berkeley, Stanford,…).
L’excellence du cursus des Ponts et Chaussées était reconnue par ces universités, ce qui était, à l’époque, une vraie gageure pour une Grande École Française !
Qu’est-ce qui caractérise selon vous la formation des Ponts et Chaussées ?
Citons déjà la multi-disciplinarité, à travers toutes les filières/options offertes aux étudiants (aménagement, finance, génie industriel,…). Mais en ceci les Ponts et Chaussées ne sont pas uniques.
“ IL FAUT S’AFFRANCHIR DU FORMATAGE DES CONCOURS : LA COMPLEXITE N’EST PAS DANS LA RECHERCHE DE SOLUTIONS MAIS DANS LA FORMULATION DES BONNES QUESTIONS ”, ASSÈNE HERVÉ HILLION.
Peut-être plus caractéristique est le savant équilibre qui existe et perdure entre la formation fondamentale aux sciences de l’ingénieur, les stages en entreprise, la proximité avec des laboratoires de recherche de premier plan, les doubles cursus avec des universités internationales.
Il y a en même temps une grande liberté pour forger son propre parcours d’étudiant, avec pour seule exigence la recherche de l’excellence : exactement ce que l’on exige en priorité dans la vie professionnelle !
Elle doit aussi son succès à sa modernité…
En effet, c’est le cas par exemple pour la discipline fondatrice des Ponts et Chaussées : l’École reste une référence internationale avec un leadership incontesté sur la construction, l’aménagement du territoire, les ouvrages d’art, le développement des « smart cities »…
Mais cela est aussi vrai dans d’autres domaines où les Ponts ont été véritablement précurseurs : les mathématiques financières par exemple, domaine où les ingénieurs des Ponts sont excellents depuis deux décennies, le « design thinking » qui s’impose aujourd’hui un peu partout, la « Supply Chain » pour citer un domaine qui m’est cher ! Et je suis loin d’être exhaustif.
Comment un ingénieur des Ponts et Chaussées a‑t-il pu s’intéresser à la Supply Chain ?
Il y a trente ans, la Supply Chain n’existait pas en tant que telle, nous parlions « d’optimisation des flux ». En ce qui me concernait, j’avais déjà le goût de l’industrie et du « manufacturing » d’une part, et je m’intéressais également aux outils et techniques dites de « Recherche Opérationnelle » d’autre part.
J’avais choisi la filière « Génie Industriel » (laquelle s’est pérennisée depuis) qui m’avait convaincu de l’intérêt de ce domaine d’optimisation des flux appliquée à l’industrie.
Vous avez décidé de créer votre propre activité de conseil en Supply Chain pratiquement dès la sortie des Ponts.
Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer ?
Dans ce domaine tout à fait innovant où je voulais me spécialiser, je n’ai pas eu beaucoup d’échos auprès des cabinets de conseil de l’époque, souvent parce qu’ils trouvaient la discipline trop opérationnelle ou trop technique, avec des enjeux limités pour les entreprises. On sait ce qu’il en advint avec l’explosion de la Supply Chain dès la fin des années 90…
En tout état de cause et comme je n’avais pas l’intention de renoncer, j’ai décidé de créer ma propre structure PEA Consulting à l’époque.
Cela correspondait peut-être aussi à votre état d’esprit…
Il est vrai que j’ai toujours eu le goût d’entreprendre qui va de pair avec une certaine forme de liberté. Je n’ai donc pas eu à me forcer pour me dire qu’il fallait que je crée ma propre boîte !
Il est amusant de constater 25 ans après combien de jeunes diplômés sont attirés vers le monde des « start-ups », ce qui est une excellente chose. Au début des années 90, je faisais figure d’OVNI en sortant d’une Grande École d’ingénieur…
Votre formation à l’école des Ponts et Chaussées est-elle adaptée à votre activité de conseil ?
Oui et non. Oui dans la mesure où le métier de conseil nécessite de l’agilité intellectuelle, de la profondeur d’analyse et de la capacité à gérer la complexité. Insuffisamment du point de vue de l’apprentissage des disciplines « soft », c’est-à-dire la gestion des relations humaines dans l’entreprise et plus généralement les problématiques de conduite du changement.
J’ajoute qu’il est impératif de sortir du syndrome « concours » ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas dans le conseil : car la complexité n’est pas dans la solution, mais dans la formulation des bonnes questions !
Le métier de conseil implique donc d’aller plus loin qu’une question d’ingénierie…
Absolument, le consultant doit certes s’assurer de la pertinence « technique » de ses recommandations et éviter toute erreur de raisonnement.
Mais cela ne suffit pas : il faut savoir appréhender les ressorts cachés des acteurs de l’entreprise, comprendre les dimensions managériales, politiques, culturelles, qui fondent les décisions. Que valent nos recommandations si elles restent « lettre morte », en dépit de leur pertinence technique ?
Qu’est-ce qui vous différencie par rapport à d’autres cabinets de conseil spécialisés dans la Supply Chain ?
Tout d’abord le fait que nous innovons en permanence, la façon dont nous abordons la Supply Chain aujourd’hui n’a rien à voir avec ce qui ce faisait il y a seulement une dizaine d’années.
C’est le cas par exemple de la « Supply Chain Digitale » où nous avons développé une plateforme de smart data, mais aussi de la « Supply Chain Finance », où nous sommes les seuls aujourd’hui à disposer d’une offre intégrant les opérations, la finance et la gestion des risques de la Supply Chain.
J’ajoute par ailleurs que nous travaillons dans un esprit et une culture « start-up » avec des associés qui restent en permanence « sur le terrain », au contact direct avec les clients aussi bien qu’avec les jeunes consultants.
Quelle est votre touche et dans quels grands secteurs d’activités intervenez-vous ?
Nous avons un cœur d’expertise, des méthodologies et des outils qui nous sont propres, mais nous ne délivrons pas de « prêt-à-penser ».
Au contraire, nous cherchons toujours le « sur-mesure » en matière de recommandations en Supply Chain, et évitons en particulier l’écueil des soi-disant « meilleures pratiques » applicables à tous. C’est cette manière de faire qui, je crois, est appréciée de nos clients et des consultants qui travaillent avec moi.
S’agissant des secteurs d’activité, nous intervenons dans de nombreuses filières industrielles : Automobile, Aéronautique, Luxe, Énergie, Distribution, Grande Consommation. Nous sommes également présents dans certains secteurs du service.
Comment voyez-vous l’avenir des Ponts et Chaussées ?
EN BREF
Say Partners est un cabinet de conseil spécialisé en “ Supply Chain Management ”, avec des offres innovantes en matière de “ Digital Supply Chain ”, “ Supply Chain Finance ” et “ Supply Chain Risk Management ”.
Say Partners intervient pour les grandes et moyennes entreprises de tous secteurs : industrie, distribution, énergie & utilities, services.
Les Ponts et Chaussées est l’une des plus anciennes Écoles d’Ingénieur à ma connaissance (Tricentenaire !), donc je crois qu’elle a fait la preuve de sa capacité à évoluer en permanence pour préparer aux mieux les ingénieurs aux défis du futur !
Cette capacité d’adaptation est pour moi plus importante que la trajectoire elle-même, surtout dans un monde où le futur est de moins en moins prévisible.
À cet égard, je ne crois pas qu’il faille craindre la « concurrence » des très grandes universités internationales et la mondialisation : je suis certain que l’École des Ponts et Chaussées continuera d’avoir toute sa place à l’échelle globale, si elle sait préserver son identité, son niveau d’excellence et son « ADN », ce dont je ne doute pas.