Brexit et aéronautique : la nouvelle donne
Quelle est la situation actuelle du secteur aéronautique ?
Malgré une conjoncture économique dégradée et des perspectives incertaines, le secteur aéronautique mondial connaît un certain essor.
Il enregistre une fréquentation passagère historique, ainsi que des volumes de transport de fret et des bénéfices records : pour la 3e année consécutive, le secteur dégage des bénéfices, ce qui n’était pas arrivé depuis plus de 10 ans.
Cette bonne santé du secteur se répercute également sur les entreprises.
Et cela en dépit des incertitudes qui impactent le secteur. Parmi celles-ci, l’évolution à la baisse du prix du fuel aurait pu impacter négativement les livraisons des avions les plus récents (320Neo ou 737Max) : il n’en est rien. 70 % des compagnies interrogées dans notre enquête 2016 ne prévoient pas de changer leur stratégie d’achat même si le prix du fuel devait rester en dessous de 50 $.
Le parc continue à augmenter à un rythme soutenu (plus de 40 % de croissance nette cumulée sur les 10 prochaines années).
Qu’est-ce que le Brexit a modifié ?
Le Brexit apporte un lot supplémentaire d’incertitudes politiques et financières sur les échanges économiques et commerciaux.
En effet, plus de 3 millions de personnes, près de 1 000 milliards d’euros d’échange et d’investissements financiers entre l’Europe et le Royaume-Uni vont potentiellement être impactés par les conséquences du Brexit.
Concrètement, quelles ont été les répercussions sur le transport aérien ?
Suite à l’annonce du Brexit, le cours boursier des compagnies aériennes européennes a connu une baisse moyenne de 20 %.
On estime que le volume du trafic aérien anglais devrait diminuer de 2,9 % suite à la dévaluation de la livre sterling : il y aura donc significativement moins de voyageurs au départ du Royaume- Uni, et cette baisse ne sera pas compensée par un accroissement des entrées au Royaume-Uni.
Les compagnies aériennes très dépendantes des flux au départ et à l’arrivée du Royaume-Uni, comme Easyjet par exemple, vont être impactées directement par cette situation et pourraient perdre jusqu’à 5 % de leur chiffre d’affaires et 25 % de leur marge.
Par ailleurs, le Brexit soulève des questions réglementaires importantes si le Royaume-Uni venait à sortir de l’Espace Aérien Commun Européen (ECAA).
Ces conséquences qui pèsent sur les compagnies aériennes ne seront pas immédiatement compensées par des opportunités comme un impact parfois favorable sur les coûts de maintenance.
Qu’en est-il des constructeurs ?
Le Royaume-Uni est un acteur clef du secteur de l’aérospatial et la défense. Il représente 17 % du marché mondial avec de grands acteurs comme Airbus, Zodiac Aerospace, Bombardier, Boeing, Rolls-Royce, Spirit, GKN entre autres…
Contrairement au cours boursier des compagnies aériennes, le cours bousier des constructeurs et industriels de l’aéronautique civil, mais aussi des industriels de la défense et du spatial, a connu une augmentation moyenne de 4 %.
L’effet des taux de change et la dévalorisation de la livre sterling ont contribué à réduire les coûts de production.
Une mise en garde cependant : il faut prêter une attention particulière aux prochaines étapes du processus du Brexit qui va certainement conduire à un ajustement des politiques commerciale et douanière. Les industriels ne pourront pas tirer le même profit de cette situation sur le long terme.
À surveiller également, l’hypothèse de la sortie du Royaume-Uni de l’EASA. Elle est d’une probabilité faible. Si elle devait cependant se produire, les conséquences seraient multiples sur le plan de la certification des avions ; des opérations de vols ; de l’organisation des programmes et des opérations de maintenance.
Et pour conclure ?
Le Brexit est lourd de conséquences dans le secteur du transport aérien. Les compagnies aériennes ayant un trafic significatif avec le Royaume-Uni vont être directement impactées à la baisse. Inversement, en tout cas pour le court terme, les industriels établis au Royaume-Uni vont y trouver des opportunités.
En tout état de cause, le Brexit nous rappelle l’impérative nécessité de piloter les entreprises dans un monde incertain, et donc d’élaborer – en permanence – différents scénarios pour anticiper des situations potentiellement tous les jours nouvelles.