Étymologie :
À propos des biotechnologies
Les biotechnologies sont des technologies faisant intervenir des êtres vivants. Elles nécessitent des connaissances en biologie, relevant souvent du génie génétique. Si biotechnologie est un néologisme récent, apparu dans le Petit Larousse 1982, les termes technologie et biologie sont beaucoup plus anciens, et leur histoire mérite d’être contée. On reconnaît ici trois éléments d’origine grecque : bio-, du grec bios « vie », techno-, du grec tekhnê « art, technique » et –logie, calqué sur le grec –logia « traité, discours », dérivé de logos « parole, raison ».
La technologie chez les anciens et les modernes
Le grec tekhnê désignait d’abord l’art, l’habileté manuelle. Son dérivé tekhnikos a abouti en français à une technique, ou à la technique en général.
Le terme tekhnologia apparaît en grec tardif pour le discours sur la technique, et c’est le premier sens de technologie en français, et de technology en anglais, surtout à propos de l’enseignement technologique, des IUT ou de l’UTC en France, du MIT ou du Caltech aux États-Unis.
Toutefois, depuis les années 1960, technology, et à sa suite technologie en français, s’emploient aussi, sinon plus souvent, pour désigner un ensemble de techniques ou une technique particulièrement complexe, faisant appel aux dernières découvertes scientifiques.
On évoque alors les nouvelles technologies, dont les biotechnologies, la haute technologie, de l’anglais high-technology, d’où high-tech, entré dans le Petit Larousse 1989 !
D’ailleurs, on parle aussi de biotech, en lieu et place de biotechnologie, ou de biotechnique qui existe aussi.
La biologie, une science récente
Certes, on trouve en grec tardif le verbe biologein, mais il est trompeur : il signifie « raconter la vie de quelqu’un », à partir du grec bios dans le sens particulier de « récit de la vie », sens qui subsiste dans biographie.
En fait, le terme biologie n’a pas d’équivalent en grec ancien, ni en latin. Et pour cause, c’est un néologisme qui n’apparaît qu’en 1802 dans l’ouvrage du naturaliste allemand Treviranus : Biologie oder Philosophie der lebenden Natur, c’est-à-dire Biologie ou Philosophie de la nature vivante.
Son confrère Lamarck l’adopte immédiatement en français, biologie, plus pertinent pour désigner la science de la vie, que l’expression sciences naturelles, plus large car elle comporte aussi la géologie. Le mot est aussi adopté rapidement en anglais, biology.
Et en définitive, dans biotechnologie (en anglais biotechnology, attesté en 1921), le préfixe bio– indique un rapport avec la vie, mais en même temps une intervention de la biologie.
Épilogue
L’importance grandissante des questions de santé et d’écologie se voit dans le vocabulaire : on observe une multiplication assez étonnante du préfixe bio- dans les mots. Ainsi, dans le Petit Larousse 2017, de bio à biovigilance en passant par biographie, biologie et biotechnologie, on ne compte pas moins de 70 mots (et même 90 en comptant leurs dérivés, comme biologique) commençant par bio-, y compris biotique et biotope, mais pas biotite, qui désigne un mica noir ainsi nommé en l’honneur du physicien Jean-Baptiste Biot (X 1794).
D’autre part, l’adjectif biologique a pris un sens particulier avec l’agriculture biologique, qui fournit des produits biologiques, dits bio.
On ne confondra pas le bio, dans l’alimentation, la bio, dans l’enseignement et la recherche, et une bio, qui raconte une vie !
En illustration : À partir de biomasse, de matière biodégradable, de biodéchet ou de biopétrole, par bioconversion ou biosynthèse, une bioraffinerie pourra produire un biogaz comme le biométhane, un biocarburant comme le bioéthanol, un biodiésel, un biocombustible, ou encore de la bioénergie. Cette biotechnologie, qui fait appel aux biosciences que sont la biologie, la biochimie et la biophysique, est à la base de toute une bio-industrie.
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