Étymologie :
À propos des X et de la start-up Nation
Une start-up nation ? Est-ce une nation jeune et dynamique comme une start-up, ou une nation tournée vers les nouvelles technologies et les start-up ? Dans les deux cas, le mot-clef, c’est start-up, qui, encore une fois, est un anglicisme : pour désigner une jeune entité à son commencement, il paraît logique de partir du verbe to start, dont le sens usuel est « commencer », mais le sens originel de ce verbe est plus spécifique, comme on va le voir.
Dans start-up, la notion d’élan initial
Le verbe to start signifiait en vieil anglais « bondir, faire un mouvement soudain et impulsif… », un sens qui se perçoit toujours dans des expressions comme to wake with a start « se réveiller en sursaut ». Ce sens ancien se continue bien dans le starting-block, sur lequel l’athlète s’appuie pour bondir et s’élancer dans la compétition.
Ainsi dans start-up, il y a non seulement la notion de commencement et la volonté de croissance (up), mais plus spécifiquement celle d’un élan initial, d’une impulsion forte donnée au départ de l’entreprise.
Il faut reconnaître que l’expression jeune pousse, recommandée en français par le Journal officiel, ne fait pas du tout le même effet que l’anglais : une plantule naissante évoque un commencement lent, qui certes peut mener loin, mais n’est pas jaillissement.
D’ailleurs, l’expression jeune pousse ne fait pas florès et elle est loin de détrôner le franglais start-up, comme, par exemple, ordinateur l’a emporté sur computer.
Quand la start-up devient licorne
Une autre image vient à l’esprit : celle de la starting-gate, qui s’ouvre pour libérer les chevaux prêts à se lancer sur la piste.
Est-ce en comparant les start-up à des chevaux de course qu’Aileen Lee, fondatrice de Cowboy Ventures et très en vue dans le monde des start-up et du venture capital, a qualifié de licorne (unicorn en anglais), dans un article de 2013 sur TechCrunch, toute start-up ayant atteint une valorisation de plus d’un milliard de dollars ?
Des start-up ayant donc connu un succès exceptionnel, sinon fabuleux, aussi fabuleux que ce cheval blanc muni d’une corne torsadée, la licorne.
Il existe moins de 200 licornes dans le monde, dont par exemple la française BlaBlaCar et l’israélienne IronSource.
L’origine de la licorne remonte à l’Antiquité. Le grec monokeros, puis le latin unicornis ont qualifié des animaux à une corne, réels ou plus souvent imaginaires.
D’où en ancien français l’adjectif unicorne et l’animal fabuleux, l’unicorne, avec un seul mot pour l’adjectif et l’animal, comme en anglais unicorn ou en italien unicorno, mais pas en français moderne, car le nom de l’animal fabuleux devient licorne à partir du XIVe siècle.
POURQUOI LICORNE EN FRANÇAIS ?
On peut penser à une confusion dans les articles : unicorne compris comme une icorne, d’où l’icorne et finalement la licorne. L’influence de l’ancien italien alicorno, variante de unicorno, et invoquée par certains auteurs, mais elle reste hypothétique.
Il y a du mystère autour de la licorne, y compris dans l’étymologie de son nom en français !
Épilogue
Le succès du terme licorne, avec son allure médiévale, voire surannée, est un peu étonnant dans ce monde ultra-moderne des start-up, où l’on se risque même à parler de décacornes et de superlicornes !
Les X aussi associent la modernité et les symboles, comme celui du bicorne qui leur est remis cérémonieusement par leurs anciens. Et quand on a porté le bicorne, rien n’empêche de se tourner vers les licornes…