Vers une mobilité durable, sûre, efficiente et abordable
Trois mutations permises par les technologies numériques vont révolutionner l’usage de l’automobile, l’électrification de la traction, l’automatisation de la conduite et la mobilité à la demande. Cela conduira à une mobilité plus respectueuse de l’environnement et à un abandon de la notion de possession de l’automobile au profit d’un modèle d’usage des véhicules à la demande.
Comme le faisait remarquer mon éminent confrère de Mercedes, Leopold Mikulic, la mobilité n’est pas la conséquence de la prospérité : c’est l’inverse. En ce sens, l’automobile (et plus largement le transport routier) a accéléré la prospérité des pays industrialisés au XXe siècle.
Aujourd’hui, cette accélération s’est finalement transformée en « saturation », avec de nombreux effets négatifs comme la mortalité due aux accidents, les impacts environnementaux (qualité de l’air et effet sur le climat), l’envahissement de l’espace urbain, la congestion, le temps perdu dans les embouteillages…
Nos sociétés aspirent à une mobilité plus respectueuse de l’environnement et de la qualité de vie.
REPÈRES
En France, le « véhicule à pilotage automatique » fait l’objet de l’un des 34 plans de la « nouvelle France industrielle » annoncés en octobre 2013.
En 2017, un appel à projet porté par l’Ademe a été annoncé doté d’un fonds de 200 000 euros. Un programme industriel pour le véhicule connecté doit se doter d’une feuille de route avant mi- 2017, portant notamment sur la cybersécurité, la gestion des données et la normalisation des infrastructures
TROIS MUTATIONS FONDAMENTALES
Une première mutation concerne le secteur de l’énergie et donc la production d’électricité. La part des énergies renouvelables va croître et va entraîner le passage d’une production centralisée à un réseau de productions locales qui intégrera les véhicules électriques dans des smart grids qui vont nécessiter un pilotage intelligent de ce système de systèmes.
Expérimentation de véhicule autonome
avec nuTonomy sur une Zoé.
Ce pilotage intelligent aura aussi des conséquences sur les modèles d’affaires et sur le coût total de possession et d’usage des véhicules électriques. Les acteurs du numérique auront un champ d’applications très vaste depuis la modélisation jusqu’à la facturation en passant par la validation, ou la maintenance préventive, par exemple.
La deuxième, l’automatisation de la conduite, va contribuer à réduire fortement le nombre d’accidents et va aussi rendre possible l’émergence de « robots-taxis ».
Ce thème mobilise l’industrie automobile mais aussi de plus en plus d’acteurs liés au numérique comme les GAFA. Il suscite d’innombrables congrès et rapports : le génie numérique est d’ores et déjà fortement mis à contribution.
En effet, la montée en puissance de l’intelligence artificielle va permettre cette rupture majeure en lien avec une approche système de très haute sécurité et sûreté : il s’agit de maîtriser le risque à « 10-9 » en faisant appel, par exemple, aux méthodes formelles.
Nous aurons également à maîtriser des systèmes de systèmes puisque les véhicules autonomes disposeront d’une grande puissance de traitement embarquée, associée à une connexion avec les infrastructures qui apporteront les compléments de données essentielles pour assurer ce très haut niveau de sûreté.
“ Nos sociétés aspirent à une mobilité plus respectueuse de l’environnement ”
Enfin, les services de mobilité à la demande vont, dans un premier temps, exploiter la connectivité et l’usage des big data pour faciliter le partage des véhicules.
Ensuite, lorsque les « robots-taxis » seront à maturité, ces services vont changer en profondeur l’accès à la mobilité : l’enjeu est de disposer de la flexibilité du taxi à un coût réduit de plus 40 %, donc beaucoup plus accessible et notamment aux personnes à mobilité réduite.
Cette rupture peut permettre une mutation complète de l’usage de l’espace urbain avec une réduction drastique du nombre de véhicules en circulation. Là encore, le génie numérique sera incontournable pour assurer un service très réactif, sûr, optimal en trajets (temps, consommation d’énergie), et très économique.
LA TRANSITION NUMÉRIQUE AU CŒUR DES PROCESSUS DE L’AUTOMOBILE
En plus de cette mutation liée aux usages, la transition numérique impacte en profondeur les processus de l’automobile. Les développements et la validation font appel de plus en plus à la simulation qui réduit drastiquement le nombre de prototypes, compresse les temps de développement et améliore la robustesse et la qualité.
Avec la Conception assistée par ordinateur dès les années 80, les progrès en productivité ont été spectaculaires en entraînant une division par deux du temps de développement, sans compter l’absorption de la montée en complexité des véhicules (normes de choc, de dépollution et prestations client).
“ Assurer un service de mobilité à la demande réactif, sûr, optimal en trajets et économique ”
Avec les trois mutations que nous devons conduire, l’enjeu des outils et méthodes numériques est encore plus fort. La production et la logistique sont également impactées par l’usine 4.0 et le potentiel de maîtrise des processus qu’apporte le numérique.
Enfin, les modèles d’affaires sont également touchés avec la croissance des services liés à la mobilité et au fait que le véhicule automobile devient un objet connecté participant à l’Internet des Objets.
Toutes ces mutations, permises par la transition numérique, vont donc révolutionner les usages où le modèle traditionnel de possession de l’automobile se réduira au profit d’un modèle d’usage des véhicules à la demande, avec les impacts sur la structure de nos ventes.
LE NUMÉRIQUE AU SERVICE DE LA VALIDATION
Pour valider le véhicule autonome, il faudrait accumuler plus de 15 milliards de kilomètres. La simulation pourra éviter cette dépense de temps et d’énergie, en la réduisant à des roulages de confirmation.
Symbioz concept, le futur du véhicule électrique, autonome et connecté.
Elles vont également transformer en profondeur nos métiers et la structure de nos emplois. Les compétences traditionnelles (mécanique, emboutissage, fonderie, électronique, etc.) resteront indispensables, mais nous allons devoir maîtriser en plus tout ce savoir-faire lié au numérique et complètement nouveau pour notre industrie.
Cela va de l’intelligence artificielle, avec sa discipline du deep learning, à la cybersécurité en passant par les logiciels critiques temps réel.
L’industrie automobile va devoir ainsi s’ouvrir aux autres secteurs de l’économie et ne pourra plus se satisfaire de son écosystème traditionnel constitué autour de la chaîne de ses fournisseurs.
Notre enjeu vital est donc de conduire simultanément toutes ces mutations afin d’éliminer les effets négatifs de l’automobile pour faire apparaître une mobilité durable, sûre, abordable et efficiente.
L’apport du numérique sera déterminant pour cette transformation et ainsi, l’automobile pourra continuer à être un moteur de progrès pour nos sociétés.