CD Valses de CHOPIN par emmanuelle Swiercz-Lamoure

Magie du piano

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°732 Février 2018Rédacteur : Jean SALMONA (56)

De tous les ins­tru­ments de musique, le pia­no est le seul qui soit à la fois poly­pho­nique et inti­miste. L’orgue est trop mar­qué par son rôle litur­gique, le cla­ve­cin peine à se défaire de son ancrage dans les temps anciens. 

Mais aus­si, au-delà de ces consi­dé­ra­tions tech­niques, le pia­no pos­sède, pour l’auditeur comme pour celui qui en joue, une infi­nie palette de pos­si­bi­li­tés, de l’évocation nos­tal­gique (Cho­pin, Men­dels­sohn, Fau­ré) à la vir­tuo­si­té trans­cen­dante (Liszt, Bala­ki­rev) en pas­sant par la dure­té per­cu­tante (Bar­tok) sans oublier les cou­leurs sub­tiles (Ravel, Debus­sy) et les infi­nies efflo­res­cences du jazz (Art Tatum, Bill Evans). 

Et puis, sur­tout, le pia­no se suf­fit à lui-même. 

LES VALSES DE CHOPIN PAR EMMANUELLE SWIERCZ-LAMOURE

Nous pos­sé­dons tous au moins un sou­ve­nir lié à une Valse de Cho­pin : une audi­tion chez notre pro­fes­seur de pia­no où, la gorge sèche et les mains déses­pé­ré­ment moites, nous nous apprê­tons, ter­ri­fiés, à nous pro­duire devant nos petit(e)s cama­rades et leurs parents ; un amour de vacances à la longue natte brune qui joue, sur le pia­no mal accor­dé de l’hôtel, dans le salon désert, la Valse « de l’Adieu » la veille de son départ – et que l’on ne rever­ra jamais. 

C’est que, nos­tal­giques ou brillantes, ces Valses ont un pou­voir évo­ca­teur à peu près unique et elles sont d’autant plus dif­fi­ciles à inter­pré­ter, faus­se­ment simples, entre déta­che­ment de salon et miè­vre­rie d’un ruba­to excessif. 

Émo­tion, forte émo­tion au pre­mier degré : c’est ce que l’on éprouve en écou­tant cette inté­grale des Valses que vient d’enregistrer Emma­nuelle Swiercz-Lamoure1.

Plu­sieurs des disques pré­cé­dents (Rach­ma­ni­nov, Schu­mann, Cho­pin) de cette pia­niste ont été ana­ly­sés dans ces colonnes au fil du temps. Ce qui la dis­tingue de ses homo­logues contem­po­rains, c’est un mélange qua­si ines­pé­ré de tech­nique trans­cen­dante et d’infinie déli­ca­tesse, cette fra­gi­li­té et ce charme ado­les­cents que l’on a connus chez Menu­hin jeune. 

Par­mi les vingt Valses du disque figurent plu­sieurs pièces qui nous étaient incon­nues dont une déli­cieuse Valse mélan­co­lique. Un très beau disque. 

POUR LA MAIN GAUCHE

CD Œuvres pour la main gauche volume 1 par Maxime ZecchiniCD Œuvres pour la main gauche volume 2 par Maxime ZecchiniCD Œuvres pour la main gauche volume 3 par Maxime Zecchini
CD Œuvres pour la main gauche volume 4 par Maxime ZecchiniCD Œuvres pour la main gauche volume 5 par Maxime ZecchiniCD Œuvres pour la main gauche volume 6 par Maxime Zecchini

Il existe deux caté­go­ries de pièces pour la main gauche : les unes ori­gi­nales, écrites notam­ment pour des pia­nistes comme Paul Witt­gen­stein, bles­sé au cours de la Pre­mière Guerre mon­diale ; les autres qui sont des transcriptions. 

Ad Vitam publie une antho­lo­gie de ces œuvres, en hom­mage pré­ci­sé­ment à Witt­gen­stein, par le pia­niste fran­çais Maxime Zecchini. 

Le volume 12 com­prend en par­ti­cu­lier deux jolies pièces ori­gi­nales de Scria­bine, Pré­lude et Noc­turne, post­ro­man­tiques, les trans­crip­tions de deux Études de Cho­pin par Godows­ki dont l’une incroya­ble­ment vir­tuose et de la Cha­conne de la 2e Par­ti­ta pour vio­lon seul de Bach par Brahms ; et last but not least, trois Études pour la main gauche de Saint-Saëns, d’une stu­pé­fiante modernité. 

Dans le volume 43, Zec­chi­ni joue, accom­pa­gné par l’Orchestre phil­har­mo­nique du Cap, les concer­tos com­man­dés par Witt­gen­stein à Pro­ko­fiev (son 4e Concer­to), à Brit­ten (sous le titre Diver­sions) et à Ravel, ce Concer­to pour la main gauche, pièce sombre, vio­lente, jaz­zique, unique dans l’ensemble de son œuvre. Trois pièces fortes et dures, que l’on dirait mar­quées par la guerre. 

Il faut évi­dem­ment admi­rer la vir­tuo­si­té et la pré­ci­sion de Zec­chi­ni. Mais au-delà, ce qui est le plus inté­res­sant, c’est le timbre propre aux pièces ori­gi­nales : la main gauche a un jeu spé­ci­fique, per­cu­tant, et la même pièce jouée par la main droite serait tota­le­ment dif­fé­rente. À découvrir. 

FRANÇOIS DE LARRARD (JAZZ DE CHAMBRE)

CD Bronxtet par François de LARRARD Notre cama­rade pia­niste Fran­çois de Lar­rard (78) publie4 12 de ses com­po­si­tions jouées avec les trois musi­ciens – saxos, basse, bat­te­rie – qui consti­tuent avec lui son Bron­x­tet et, avec cette for­ma­tion, il se renou­velle entièrement. 

Il s’agit de pièces ato­nales (c’est-à-dire dont on n’identifie pas la tona­li­té) très tra­vaillées qui, aux impro­vi­sa­tions et au rythme près, relèvent plus de la musique de chambre que du jazz et que Bar­tok et Stra­vins­ki n’auraient pas désa­vouées, et Webern non plus, peut-être. 

Rigueur, pré­ci­sion, ordre, mise en place par­faite, thèmes ori­gi­naux et com­plexes font de ce recueil un modèle de ce que peut être le jazz contem­po­rain lorsqu’il tourne le dos à la tradition. 

Il faut se rap­pe­ler que Fran­çois de Lar­rard joue avec la même rigueur Cou­pe­rin au cla­ve­cin. En résu­mé, Fran­çois est un grand musi­cien fran­çais et… polytechnicien. 

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1. 1 CD LA MUSIC
2. 1 CD AD VITAM
3. 1 CD AD VITAM
4. 1 CD www.bronxtet.fr

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