Accenta : la start-up qui décarbone la fonction thermique des bâtiments
Pour accompagner la décarbonation du bâtiment, Accenta s’attaque à la fonction thermique qui représente 70 à 75 % des émissions de CO2 des bâtiments en exploitation. Pierre Trémolières, fondateur et PDG de la start-up, nous en dit plus.
Alors que la décarbonation s’accélère, le secteur du bâtiment, gros émetteur de CO2, doit renforcer ces efforts. Qu’en est-il concrètement ?
En Europe, les stratégies de rénovation globale ont permis de rénover 1,2 % du parc depuis le lancement du bâtiment basse-consommation, il y a près d’une quinzaine d’années. Si nous maintenons ce rythme, nous n’aurons rénové que 3,6 % du parc à horizon 2050 alors que nous visons la neutralité carbone d’ici 2050 !
Plus particulièrement, le bâtiment émet 27 % des émissions de CO₂ en France. Au niveau mondial, cela représente 37 % des émissions. Dans la phase d’exploitation des bâtiments, le chauffage et la climatisation représentent, quant à eux, près de 70 à 75 % des émissions de CO₂.
Dans ce cadre, Accenta, start-up innovante a pour ambition d’accompagner les propriétaires de parcs immobiliers dans cette démarche de décarbonation de leur actif en se concentrant sur la fonction thermique, le chauffage et la climatisation. Qu’en est-il ?
Accenta a vu le jour au sein du campus de l’École polytechnique et de son incubateur. Notre start-up, qui a bénéficié d’investissements réalisés par le fonds d’investissement de l’École, est aussi le fruit d’un programme de recherche de trois années, porté par plusieurs laboratoires dont le BRGM, le CES, le LMD… Dans le cadre de cette phase de R&D, nous avons développé une technologie qui permet d’améliorer de manière significative les rendements thermodynamiques des pompes à chaleur. Leur performance est ainsi augmentée de près de 250 % par rapport à l’état de l’art actuel ce qui contribue ainsi à réduire la consommation énergétique et les émissions de CO2 du réseau.
Comment fonctionne votre technologie ?
Notre solution innovante est adossée à deux technologies qui visent à optimiser la demande en énergie des bâtiments. Premièrement, nous avons recours à l’IA et au Machine Learning pour optimiser le pilotage et la maîtrise de la performance des installations afin de les rendre aussi compétitives que celles alimentées par des énergies fossiles (gaz, fioul).
Deuxièmement, nous mettons en place un stockage thermique inter-saisonnier qui permet de récupérer la chaleur de l’été pour chauffer les bâtiments en hiver, et inversement, de stocker le froid de l’hiver pour les rafraîchir en été. D’un point de vue opérationnel, ce stockage prend la forme de sondes géothermiques que nous installons dans le sous-sol, en-dessous des bâtiments ou à proximité.
Dans ce modèle, nous utilisons la terre sous nos pieds comme une batterie thermique. Les coûts d’investissement sont moins élevés que ceux nécessaires pour déployer une solution de géothermie traditionnelle ce qui permet d’être d’ores et déjà compétitif par rapport aux énergies fossiles !
Grâce à cette solution de décarbonation de la fonction thermique, nous obtenons une baisse de près de 80 % de la consommation du bâtiment et une réduction des émissions de CO₂ de 95 %.
Et aujourd’hui, comment se positionne Accenta ?
Nous avons connu une très forte croissance depuis le début de la commercialisation de notre solution clé-en-main qui couvre tous les aspects relatifs à la décarbonation de la fonction thermique. Nous avons une équipe de près de 150 personnes qui accompagnent des acteurs du résidentiel, du logement collectif, de l’industrie, du tertiaire et du commercial, ainsi que des acteurs du monde de la construction.
Aujourd’hui, Accenta gère plus d’un million de mètres carrés sur le volet optimisation des besoins énergétiques du bâtiment, et autant de mètres carrés sur le volet bas carbone.
Au fil des années, nous avons renforcé la fiabilité et la robustesse de notre solution ce qui nous permet aujourd’hui de signer des contrats de performance énergétique et environnementale sur de longues périodes comprises entre 20 et 25 ans. De plus en plus, nous investissons dans les chaufferies et la climatisation bas carbone de nos clients afin de lisser le coût du verdissement de leurs bâtiments. Dans le cadre de ce modèle, nous leur revendons des mégawattheures de calories et de frigories décarbonés. Cela leur permet de requalifier leurs bâtiments au regard des dernières réglementation dont le Décret Tertiaire ou encore la Loi Climat et Résilience, mais aussi de tenir leurs objectifs en termes de RSE et d’être aussi éligibles aux fonds d’investissement verts.
Au-delà de la solution logicielle qui permet le suivi de la consommation, Accenta intervient aussi sur la conception du système énergétique bas carbone, sa construction, son exploitation et son financement avec à la clé la revente d’énergie thermique décarbonée à nos clients. Nous mettons ainsi à la disposition du monde du bâtiment une solution clé-en-main (technique et financière) en mode EEaaS (Energy Efficency as a Service).
Enfin, nous sommes particulièrement fiers d’avoir été sélectionnés par le gouvernement pour intégrer le programme FrenchTech 2030.
Des exemples de projets que vous avez menés ? Quels sont les résultats que vous avez obtenus ?
Nous sommes intervenus sur le siège social d’Airbus à Toulouse qui est composé de trois bâtiments de 36 000 m2. En équipant ce site de notre technologie, nous avons réduit les émissions de CO2 de 95 % et la consommation énergétique de 80 %.
Nous avons aussi fait partie des acteurs qui ont travaillé sur le premier entrepôt neutre en carbone au monde pour Prologis et son client final, Monoprix à Moissy-Cramayel. Sur ce bâtiment, nous enregistrons une diminution de la consommation énergétique de 60% et une réduction des émissions de CO2 de la fonction thermique de 70 %. Pour atteindre la neutralité carbone, ce bâtiment a été construit avec du ciment bas carbone et bénéficie d’un système de compensation.
Pour la mairie de Roubaix, nous allons équiper 430 bâtiments municipaux de systèmes de conduite continue semi-automatisée avec de l’IA et du Machine Learning afin de réduire la consommation énergétique, mais également les émissions de CO2 de près de 25 %. En Bretagne, pour le bailleur Inolya, nous avons équipé des logements collectifs. Enfin, pour l’opérateur Icade, nous sommes aussi intervenus sur le système de smart grid thermique de l’écoquartier Les Portes de Paris.
Alors que la transition énergétique et environnementale s’accélère, quels sont vos enjeux ?
Nous avons un enjeu du conduite de changement afin que les clients adoptent ces nouvelles technologies. Sur un plan plus opérationnel, nous avons aussi un enjeu industriel pour accompagner une demande en hausse dans un contexte où la France vise la neutralité carbone à horizon 2050. Pour relever l’ensemble de ces défis et accompagner nos clients, nous avons aussi un enjeu humain lié au recrutement : avant la pandémie, nous étions 50 personnes et depuis la fin de la crise sanitaire, nous avons recruté 100 personnes. Nous prévoyons d’en recruter encore 100 sur le court terme.