Alexis Hernot (91) mentor pour le programme X‑Up du Drahi X‑Novation Center
Dans le cadre de son programme X‑Up, l’incubateur et accélérateur de start-up de l’École polytechnique propose à chaque start-up de se faire accompagner par un ou plusieurs mentors. Alexis Hernot (91), co-organisateur du groupe X‑Santé Biotech, est mentor auprès de la start-up EpiLAB, spécialisée dans le dépistage de la tuberculose.
Quelles ont été les étapes clés de ton parcours et quelles sont tes expertises ?
Mon père était médecin, dès mes études à l’École polytechnique j’ai voulu travailler dans la santé et la technologie. J’ai fait une formation complémentaire en santé humaine et j’ai fait tous mes stages chez Sanofi en recherche puis en usine. J’ai été le premier élève polytechnicien apprenti de France. Cela m’a montré que je ne voulais pas travailler en usine, l’innovation étant trop lente chez les grands laboratoires pharmaceutiques. Je suis parti dans le conseil pendant quelques années et j’ai préparé mon entrée en MBA à l’Insead. Pendant que j’étais en école d’application, j’ai créé un logiciel pour Sanofi puis je leur ai vendu, ce qui m’a financé mes études.
À l’époque, créer une société n’était pas du tout dans l’air du temps et créer une société à l’X était vu comme un quasi-échec. Je suis allé dans la technologie parce que je suis passionné de technologie, d’abord dans les systèmes de paiement puis dans les systèmes de transport aérien. Je me suis vite aperçu que je manquais de connaissances sur les logiciels. J’ai donc réappris à coder sur mes soirs et week-ends et il me fallait un projet donc j’ai créé un carnet de vaccination en ligne partagé que j’ai breveté, notre société possède ce brevet maintenant.
J’ai d’abord rejoint une start-up, pour voir comment fonctionnait une start-up. J’y suis resté un an et un bout d’un an il était temps pour moi de créer une société, de comprendre le marché. Je me suis associé avec un médecin et en 2013, nous avons créé Calmedica. Nous avons essayé de commercialiser le carnet de vaccination mais cela n’a pas fonctionné : tout le monde était intéressé mais personne n’était prêt à payer. Nous avons pivoté en gardant une fonctionnalité qui était la capacité à dialoguer par SMS pour créer le carnet et ajouter des vaccinations. C’est cette fonctionnalité que nous avons extraite pour en faire un produit, qui est aujourd’hui Memoquest.
J’ai une expérience dans les grands groupes, j’ai créé une société, je suis entrepreneur en résidence à l’Insead. Je voyais les questions que se posaient les étudiants et je voyais ce par quoi moi j’étais passé, de la rédaction d’un contrat d’exclusivité, le recrutement d’un collaborateur ou la décision de lever des fonds. L’intérêt, c’est d’en faire profiter les autres : pas de leur dire quoi faire, mais de leur présenter dans la mesure où ils sont confrontés à une situation, essayer de les rapprocher d’une situation similaire que j’ai vécu et avoir un feedback sur comment se comporter. Je peux partager ce que j’ai déjà expérimenté, sur des sujets très importants comme sur des détails car on est très peu guidés.
L’entrepreneuriat pour toi, ça représente quoi ?
Je viens d’un milieu agricole et mon père était médecin. Dans ces deux professions, les personnes assument leurs risques et leurs bénéfices. J’avais déjà cette capacité à me dire qu’on pouvait décider pour soi et que c’était intéressant, que cette prise de risque comportait des bénéfices et de l’intérêt, c’est une forme de liberté. La principale différence entre travailler en entreprise et être entrepreneur, c’est la possibilité de travailler sur des projets à plus long terme, en ayant une vision de l’avenir un peu plus longue puisque c’est votre projet. Dans un cas, on a l’impression d’investir et dans l’autre uniquement de dépenser. Quand on est entrepreneur, on est prêt à mettre beaucoup plus d’énergie sur des choses qu’on ne ferait pas dans un grand groupe. Le deuxième point, c’est que lorsqu’on est entrepreneur, on détermine les valeurs de la société et on ne les subit pas, ce n’est pas imposé. Chez Calmedica, la valeur principale est la responsabilité : chacun est responsable de ses actes et de la façon dont il organise son travail. Ce n’est pas un ensemble de valeurs désincarnées que l’on aurait dans un grand groupe. On peut déterminer l’ADN de la société lorsque l’on est entrepreneur. On peut choisir ses batailles et décider de ce qui est bien ou pas. On peut faire des choix, même s’ils sont discutables, puisqu’on est les seuls à assumer la responsabilité. On ne sera jamais forcé de prendre une décision que l’on pense ne pas être la bonne.
Quel conseil donnerais-tu aux porteurs de projets ou start-up qui se lancent ?
Tout le monde se focalise sur les vanity metrics : je vais essayer de lever un maximum d’argent et de recruter un maximum de personnes. Cela ne veut rien dire parce que beaucoup ont levé des fonds mais lorsqu’ils ont épuisé ces fonds, la start-up ne fonctionne plus. Quand on lève des fonds, la première focalisation c’est comment bien dépenser l’argent, de manière efficace. Quand on ne lève pas de fonds, on se demande comment gagner de l’argent, trouver des clients, faire quelque chose que des clients vont acheter. Avant de penser à lever des fonds, il faut faire un MVP (Minimum Valuable Product) et voir s’il y a un usage : est ce qu’on est capable d’intéresser quelqu’un et de lui vendre quelque chose ? Se lancer, ce n’est pas lever de l’argent pour créer le produit. Se lancer, c’est comprendre le marché et aborder des clients pour voir s’il y a de l’attraction.
Qu’est ce qui t’a poussé à devenir mentor dans le cadre de X‑Up ?
J’ai été entrepreneur en résidence à l’Insead et j’ai trouvé ça très enrichissant parce que ça me permettait de réfléchir moi-même sur ce que j’avais appris. Je retire quelque chose du fait d’être mentor. C’est une sorte d’ego, de fierté et de plaisir d’aider les autres, de transmettre. On me l’avait proposé à l’Insead donc je l’ai fait et je ne savais pas le plaisir que j’allais en retirer. C’est vraiment une discussion où je devais réfléchir aux réponses aux questions en fonction de mon expérience, c’est une sorte de synthèse de mon expérience. Comme ça m’avait plu à l’Insead, j’ai décidé de le faire à l’X. Dans le cadre de mon rôle d’entrepreneur en résidence, il y a une diversité de questions car une diversité de demandes alors que dans le cas du mentorat, on a une diversité de questions car on suit l’équipe dans le temps.
Que penses-tu de l’innovation en France ?
Les start-up ont beaucoup d’aides mais sont obligées de prendre des cabinets pour détecter et rédiger les dossiers d’aides. Les démarches sont trop compliquées et trop nombreuses. L’innovation regroupe beaucoup d’idées en France et c’est très bien, les Français innovent. En revanche, la règlementation est trop compliquée au niveau social et ressources humaines.
Porteur de projets ou start-up en amorçage à enjeux tech, rejoins le Drahi X‑Novation Center, l’incubateur de l’École polytechnique et suis le programme d’accompagnement personnalisé X‑Up pendant 9 mois avec une dotation à l’entrée de 15 K€.
Tu as jusqu’au 30.01.2022 pour candidater.
Informations et candidatures : bit.ly/3dYVJJs
Domaines couverts : tous, s’ils contiennent des composantes technologiques innovantes.
Des thèmes de prédilection ? Greentech, healthtech️, défense️, NewSpace, industrie 4.0
Liens web
EpiLAB https://www.epilab.io/
Insead https://www.insead.edu/
Calmedica https://www.calmedica.com/