Algonomia

Algonomia autonomise les directions fiscales des multinationales

Dossier : TrajectoiresMagazine N°788 Octobre 2023
Par Hervé KABLA (X84)

En 2017, Walid Eljaa­fa­ri (X10) a cofon­dé Algo­no­mia, qui pro­pose une solu­tion clés en main afin de per­mettre aux direc­tions fis­cales de gagner en auto­no­mie dans la col­lecte et l’analyse de leurs don­nées. 

Quelle est l’activité d’Algonomia ? 

Algo­no­mia est la start-up lea­der de la numé­ri­sa­tion des fonc­tions fis­cales, finan­cières et juri­diques des mul­ti­na­tio­nales. Grâce aux solu­tions SaaS que nous four­nis­sons, nous per­met­tons aux équipes des direc­tions de recen­trer leur tra­vail sur le cœur de leur exper­tise et de reprendre le contrôle sur leurs pro­cess internes. Nous créons des algo­rithmes inno­vants, com­bi­nés à des inter­faces ergo­nomiques construites spé­cia­le­ment pour les pro­fes­sion­nels de la fis­ca­li­té. 

Quel est le parcours des fondateurs ? 

J’ai créé Algo­no­mia avec deux asso­ciés pour contri­buer à la trans­for­ma­tion des métiers de la fis­ca­li­té. Après avoir étu­dié les mathé­ma­tiques et le droit, mon expé­rience en cabi­net d’avocats m’a fait réa­li­ser à quel point les sec­teurs du droit et de la fis­ca­li­té béné­fi­cie­raient de nou­velles tech­no­lo­gies s’appuyant sur l’algorithmie et la science des don­nées. Mes asso­ciés et moi-même avons com­men­cé par plu­sieurs années d’intrapreneuriat au sein de PwC France, puis nous avons déci­dé de lan­cer Algo­no­mia, et ain­si de déve­lop­per des offres de ser­vices en ligne des­ti­nées aux pro­fes­sion­nels du droit et de la fis­ca­li­té. 

En 2017, Walid Eljaafari (X10) a cofondé Algonomia

Comment t’est venue l’idée ? 

À l’origine, cela devait prendre la forme d’une thèse sur la ques­tion de la concur­rence fis­cale inter­na­tio­nale. Ce pro­jet a avor­té pour cause de finan­ce­ment insuf­fi­sant, les enjeux n’étant pas encore d’actualité comme c’est le cas aujourd’hui. L’idée est donc née à la suite de ce pro­jet, avec une moti­va­tion prin­ci­pa­le­ment intel­lec­tuelle et une approche mathé­ma­tique. Je sou­hai­tais mettre les mathé­ma­tiques au ser­vice de l’économie. En créant Algo­no­mia, j’ai vou­lu modé­li­ser et trans­for­mer le droit fis­cal en algo­rithme. 

Qui sont les concurrents ? 

Notre envi­ron­ne­ment concur­ren­tiel est dés­équi­li­bré vers la comp­ta­bi­li­té et le décla­ra­tif. Il existe une varié­té d’outils pour gérer les pro­blé­ma­tiques de comp­ta­bi­li­té natio­nale et les décla­ra­tions fis­cales natio­nales. En revanche, on constate un vide appli­ca­tif béant pour ce qui est de la ges­tion des pro­blé­ma­tiques fis­cales inter­na­tio­nales. Nous nous posi­tion­nons exac­te­ment pour cou­vrir ce besoin en modé­li­sa­tion fis­cale et ges­tion de la fis­ca­li­té au niveau « groupe ». Notre pre­mier concur­rent devrait être l’administration fis­cale, car ce serait à elle de publier un code source qui ren­drait les règles fis­cales plus faci­le­ment appli­cables par les entre­prises. Le droit serait en effet mieux ser­vi s’il était expri­mé sous la forme d’algorithmes. 

Quelles ont été les étapes clés depuis la création ? 

Depuis la créa­tion en 2017, nous avons éta­bli un par­te­na­riat de dis­tri­bu­tion avec le cabi­net d’avocats Deloitte en 2018 et fait l’acquisition de notre pre­mier client his­to­rique, le Groupe Renault, puis Alstom en 2019, Schnei­der Elec­tric et plu­sieurs autres grands groupes du CAC 40 qui ont choi­si de nous faire confiance. Nous avons dû faire gran­dir l’équipe pour accom­pa­gner notre crois­sance et une autre étape clé a donc été le recru­te­ment d’une dizaine de nou­veaux col­la­bo­ra­teurs qui nous ont rejoints et ont dou­blé la taille de l’équipe en une année. 

Les directions fiscales sont-elles le parent pauvre de la transformation numérique des entreprises ? 

Cer­taines direc­tions fis­cales peuvent être confron­tées à des obs­tacles lors de la trans­for­ma­tion numé­rique des entre­prises, tels que la résis­tance au chan­ge­ment, le manque de com­pé­tences tech­niques, la com­plexi­té des sys­tèmes exis­tants et les pré­oc­cu­pa­tions liées à la confi­den­tia­li­té et à la sécu­ri­té des don­nées. Cepen­dant, de nom­breuses direc­tions fis­cales recon­naissent l’importance de la trans­formation numé­rique et s’engagent à inves­tir, à for­mer leurs col­la­bo­ra­teurs et à col­la­bo­rer avec les équipes IT. Avec la bonne approche et les investis­sements adé­quats, les direc­tions fis­cales peuvent jouer un rôle essen­tiel dans la trans­for­ma­tion numé­rique et deve­nir des acteurs essen­tiels de l’innovation au sein de l’entreprise. Nous avons mené une étude sur la matu­ri­té numé­rique des direc­tions fis­cales, en par­te­na­riat avec Fidal et l’Edhec, qui montre bien que leur trans­for­ma­tion est en marche : https://alll.legal/resource-item/etude-maturite-digitale-directions-fiscales/ 

Pourtant, tout devrait commencer par un tableau de bord ? 

Certes, la mise en place d’un tableau de bord finan­cier est un élé­ment impor­tant dans la trans­for­ma­tion numé­rique des direc­tions fis­cales. Cepen­dant, cet aspect peut par­fois faire l’objet d’une emphase exces­sive, relé­guant d’autres aspects essen­tiels au second plan. Chez Algo­no­mia, notre véri­table pro­blème est de créer des appli­ca­tions dédiées à la simu­la­tion qui prennent en compte les sub­ti­li­tés de la matière fis­cale. La ges­tion fis­cale est une dis­ci­pline com­plexe qui néces­site une com­pré­hen­sion appro­fon­die des réglementa­tions et des spé­ci­fi­ci­tés de chaque entre­prise. Les tableaux de bord tra­di­tion­nels peuvent offrir une vue d’ensemble, mais ils peuvent man­quer de flexi­bi­li­té pour prendre en compte ces com­plexi­tés. Nous pen­sons qu’ils sont désor­mais une base éta­blie de la trans­for­ma­tion numé­rique. Notre approche consiste donc à déve­lop­per des appli­ca­tions spé­ci­fiques qui per­mettent de simu­ler dif­fé­rents scé­na­rios et de jouer avec les leviers de contrôle. Via des algo­rithmes sophis­ti­qués et des modèles avan­cés, nous pou­vons prendre en compte les variables fis­cales com­plexes et les par­ti­cu­la­ri­tés de chaque entre­prise. 

PME ou grands comptes, qui sont les plus intéressants à transformer ? 

Nos solu­tions répondent à des cas d’usage en fis­ca­li­té inter­na­tio­nale, dont les régu­la­tions s’appliquent en par­ti­cu­lier aux groupes de plus de 750 mil­lions d’euros de chiffre d’affaires. La trans­for­ma­tion numé­rique des grands comptes offre plu­sieurs avan­tages poten­tiels en rai­son de leur échelle, de leur com­plexi­té et de leurs res­sources dis­po­nibles. Les grands comptes peuvent opti­mi­ser leurs opé­ra­tions, amé­lio­rer la col­la­bo­ra­tion entre les dif­fé­rentes busi­ness units, béné­fi­cier d’efficacité opé­ra­tion­nelle accrue et avoir un impact signi­fi­ca­tif grâce à des ini­tia­tives de trans­for­ma­tion numé­rique à grande échelle. Avec des res­sources finan­cières, techno­logi­ques et humaines plus impor­tantes, les grandes entre­prises ont la capa­ci­té de mettre en place des équipes dédiées et d’allouer des bud­gets consé­quents pour une trans­for­ma­tion réus­sie. 

Les start-up s’enorgueillissent souvent de leur technicité (IA, cloud, etc.) ; ne faudrait-il pas avoir une approche plus axée sur les vrais besoins des utilisateurs ? 

La tech­no­lo­gie ne doit pas être une fin en soi, mais un moyen de répondre aux besoins des uti­li­sa­teurs. Une approche cen­trée sur les besoins des uti­li­sa­teurs implique de com­prendre en pro­fon­deur les pro­blèmes, les défis et les dési­rs des uti­li­sa­teurs finaux. Cela demande une écoute active, des recherches appro­fon­dies, des tests uti­li­sa­teurs et des ité­ra­tions pour déve­lop­per des solu­tions qui apportent une réelle valeur et répondent aux attentes des uti­li­sa­teurs. Il est donc essen­tiel pour les start-up de trou­ver un équi­libre entre leur tech­no­lo­gie et les besoins des utilisateurs.

“La technologie ne doit pas être une fin en soi, mais un moyen de répondre aux besoins des utilisateurs.”

Nous avons conscience de l’importance de cette approche cen­trée sur l’utilisateur. Nous misons sur la mul­ti­dis­ci­pli­na­ri­té de notre équipe, qui com­prend des experts métier mais aus­si en déve­lop­pe­ment, en UX (expé­rience uti­li­sa­teur) et en desi­gn. Nous pou­vons ain­si déve­lop­per des pro­duits et des ser­vices qui non seule­ment uti­lisent de puis­sants algo­rithmes, mais sont conçus de manière intui­tive, agréable à uti­li­ser et répon­dant aux besoins réels. 

Algonomia est labellisée French Tech ; ça veut dire quoi en 2023, French Tech ? 

La label­li­sa­tion French Tech témoigne de la valo­ri­sa­tion crois­sante du sec­teur techno­logique fran­çais. Nous béné­fi­cions ain­si de la recon­nais­sance du gou­ver­ne­ment fran­çais pour notre rôle dans l’innovation et la transforma­tion numé­rique. Cette valo­ri­sa­tion contri­bue à ren­for­cer l’image et la répu­ta­tion du sec­teur tech fran­çais, atti­rant ain­si l’attention des inves­tis­seurs natio­naux et inter­na­tio­naux. Dans l’ensemble, cela témoigne de la vita­li­té de l’écosystème tech fran­çais et de la recon­nais­sance de l’innovation et de la tech­ni­ci­té des start-up fran­çaises dans un contexte glo­bal com­pé­ti­tif. 

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