André Cachin (45) éminent spécialiste de la souveraineté nucléaire française
Parmi nos camarades qui participèrent à la réalisation de la dissuasion nucléaire française et donc à la mise au point du premier engin nucléaire français, André Cachin, décédé le 2 juillet 2021, est celui à qui on doit le dispositif constitué d’explosifs classiques qui forment l’onde de détonation sphérique centripète, onde de choc qui fait passer la matière fissile d’une configuration sous-critique à une configuration surcritique.
Né le 19 janvier 1925 à Tarbes où il a grandi, André Cachin va en hypotaupe au lycée Fermat à Toulouse. Après l’X, il choisit à la sortie le corps des ingénieurs militaires des poudres. À la sortie de l’école d’application, il est affecté au laboratoire de la Commission des substances explosives (CSE) à Sevran sous les ordres de l’ingénieur général Médard qui lui demande de s’intéresser à la focalisation des ondes de choc. La solide formation des anciens taupins en optique géométrique allait beaucoup le servir pour arriver au but. L’indice de réfraction de l’optique devient alors le rapport des vitesses de détonation des explosifs. Valable en première approximation, cette hypothèse le met sur la voie. Avec les moyens rudimentaires de l’époque, du cordeau détonant et des explosifs en poudre déposés sur une plaque de plomb, il vérifie rapidement la validité du procédé qu’il a imaginé.
Un brevet mis au secret
À partir de là fut déposé le premier brevet français qui porte les noms de Cachin, Sartorius et Médard, brevet immédiatement mis au secret. Cachin met au point les compositions moulables dont le principe est toujours utilisé. Il est aidé par son conscrit Jean Viard qui va développer l’emploi de moyens de mesure modernes adaptés à l’échelle des vitesses de détonation, qui s’étendent de 3 000 à 8 000 m/s, caméra ultra-rapide et sonde électronique.
André Cachin avait fait la preuve que l’implosion était faisable. Pour aller plus loin il fallait changer d’échelle et de moyens. Viard décida d’aller informer le chef de cabinet du haut-commissaire du CEA, Piatier, qui était également poudrier. Il comprit immédiatement l’importance des travaux accomplis.
En octobre 1955 la création du Centre d’études de Vaujours (CEV), relevant du CEA, va permettre à Cachin de réaliser l’implosoir qui explosera le 13 février 1960, ce qui lui vaudra d’être nommé chevalier de la Légion d’honneur en 1960 à l’âge de 35 ans. Toutes les compositions explosives qu’il a mises au point sont utilisées pour la fabrication des engins nucléaires expérimentaux qui seront expérimentés par la suite. Dans le service qu’il dirigea, service où l’on malaxait, moulait et usinait des explosifs, il n’y eut aucun accident de personne.
Du CEV au CEA
André Cachin quitte le CEV en 1970 pour le siège du CEA à Paris où il occupe successivement les postes d’assistant au directeur des applications militaires (1969−1970), chef du département explosifs (1971−1977), adjoint au directeur industriel de la direction des applications militaires.
Sa grande compétence en matière d’explosifs lui vaut d’être nommé membre de la CSE avant d’en prendre la présidence. La société de l’Air Liquide en fait son conseiller sécurité en 1984, fonction qu’il a remplie jusqu’en 1990.
Sa curiosité et son inventivité étaient sans cesse en éveil, et cela dans tous les domaines, en particulier pour la détection des mines antipersonnel mais aussi en matière d’applications médicales. Dès 1978 il avait alerté le milieu médical sur l’intérêt de la résonance magnétique nucléaire, dix ans avant que la France ne s’y intéresse. Il était aussi un bibliophile averti qui s’était intéressé aux livres sur la pyrotechnie et sur des relations de voyage. De ses ascendances pyrénéennes, il avait gardé une grande attirance pour la montagne, ski l’hiver, randonnée l’été.