Arianespace : un acteur incontournable de l’espace depuis 65 ans

Dossier : Dossier FFEMagazine N°720 Décembre 2016
Par Stéphane ISRAËL

2016 touche à sa fin. Comment s’est déroulée cette année pour Arianespace ?

2016 appa­raît déjà comme une année remar­quable, grâce à nos trois grands atouts : dis­po­ni­bi­li­té, per­for­mance, fiabilité. 

Avec nos trois sys­tèmes de lan­ce­ment Ariane 5, Soyuz et Vega, nous avons pu cette année encore four­nir à nos clients, à la fois com­mer­ciaux et ins­ti­tu­tion­nels, des ser­vices de lan­ce­ment à l’heure et de qua­li­té, pour tous types de satel­lites vers toutes les orbites. 

Avec 8 lan­ce­ments déjà effec­tués (au 8 novembre 2016), nous devrions être en mesure d’en réa­li­ser 11 d’ici la fin de l’année, comme prévu. 

Notre per­for­mance s’est illus­trée quant à elle à tra­vers deux records consé­cu­tifs de masse d’emport vers l’orbite de trans­fert géo­sta­tion­naire, obte­nus avec Ariane 5 (plus de 10,7 tonnes !). 

Le lan­ceur lourd euro­péen a par ailleurs confir­mé sa fia­bi­li­té excep­tion­nelle, en signant le 5 octobre son 74e suc­cès d’affilée depuis 2003, éga­lant le record éta­bli par Ariane 4. 

En près de 14 ans d’activité, Ariane 5 aura mis en orbite 145 satel­lites cor­res­pon­dant à plus de 623 tonnes ! Si tout se passe bien, nous devrions dépas­ser ce record lors du vol pré­vu le 17 novembre au ser­vice d’une mis­sion emblé­ma­tique pour l’Europe : Galileo. 

Avec Soyuz, en coopé­ra­tion avec l’a­gence russe Ros­cos­mos, nous avons désor­mais réa­li­sé 41 lan­ce­ments. S’agissant de Vega, nous avons confir­mé la grande capa­ci­té du jeune lan­ceur léger, avec 7 mis­sions, toutes réa­li­sées avec succès. 

Ces atouts nous ont per­mis de conser­ver notre lea­der­ship sur le mar­ché com­mer­cial. Nous avons déjà signé 6 nou­veaux contrats de lan­ce­ment de satel­lites avec Ariane 5, dont 4 repré­sen­tant près de 50 % du mar­ché ouvert à la concur­rence cette année, qui n’est pas encore ter­mi­née. À cela s’ajoutent 2 nou­veaux contrats de lan­ce­ment sur Vega et 2 autres sur Soyuz. 

Notre car­net de com­mandes dépasse ain­si les 5 mil­liards d’euros et nous assure une acti­vi­té intense pour les pro­chaines années : 21 Ariane 5, 27 Soyuz (dont 21 pour la constel­la­tion One Web) et 9 Vega. 

Quelles sont les évolutions que vous avez pu observer sur le marché ?

Si cer­tains de nos clients sont sou­mis à des contraintes éco­no­miques, nous voyons déjà appa­raitre de nou­veaux relais de crois­sance, qui devront être confir­més, notam­ment à tra­vers les pro­jets de constel­la­tions, mais aus­si de nou­velles tech­no­lo­gies de satel­lites liées à la pro­pul­sion élec­trique, ou encore aux satel­lites de télé­com­mu­ni­ca­tion haut débit et mul­ti­fais­ceaux, dits “ High Through­put Satellites ”. 

Y sont asso­ciées de nou­velles appli­ca­tions spa­tiales, comme la connec­ti­vi­té glo­bale par satel­lite pro­met­tant de réduire la frac­ture numé­rique, ain­si que toutes les appli­ca­tions liées à la mobi­li­té (inter­net dans les avions ou les bateaux), le Big Data et l’internet des objets. 

De nou­veaux acteurs sou­haitent par ailleurs dis­po­ser de leurs propres satel­lites : ce n’est pas un hasard si cette année, nous avons lan­cé un satel­lite d’observation pour le Pérou, un satel­lite de connec­ti­vi­té glo­bale pour l’Australie, et enfin le pre­mier satel­lite entiè­re­ment dédié à des ser­vices finan­ciers pour une grande banque indonésienne. 

Comment vous y êtes-vous adaptés ?

Avec sa famille de trois lan­ceurs, Aria­nes­pace est en mesure d’accomplir une grande varié­té de mis­sions et de satis­faire les besoins des gou­ver­ne­ments comme des opé­ra­teurs commerciaux. 

AVEC SA FAMILLE DE TROIS LANCEURS, ARIANESPACE EST EN MESURE D’ACCOMPLIR UNE GRANDE VARIÉTÉ DE MISSIONS ET DE SATISFAIRE LES BESOINS DES GOUVERNEMENTS COMME DES OPÉRATEURS COMMERCIAUX. LA CONFIANCE DES OPÉRATEURS DE SATELLITE HISTORIQUES ET DES NOUVEAUX ENTRANTS EST UNE GRANDE FIERTÉ POUR ARIANESPACE.

La confiance des opé­ra­teurs de satel­lite his­to­riques et des nou­veaux entrants est une grande fier­té pour Arianespace. 

Mais nous ne devons pas nous repo­ser sur nos lau­riers. Mal­gré les récentes dif­fi­cul­tés de nos com­pé­ti­teurs, la concur­rence est là, et nous impose une pres­sion sans pré­cé­dent sur les prix, sur tous les seg­ments du marché. 

Une nou­velle géné­ra­tion de lan­ceurs éclo­ra lors de la pro­chaine décen­nie, issue d’entreprises pri­vées amé­ri­caines, mais aus­si de nou­velles puis­sances comme l’Inde.

Notre réponse à ce contexte concur­ren­tiel a deux noms : Ariane 6 et Vega C, plus com­pé­ti­tives et encore mieux adap­tées aux besoins de nos clients. 

À la dif­fé­rence d’Ariane 5, le nou­veau lan­ceur Ariane 6 sera modu­laire, avec une ver­sion lourde « Ariane 64 » pour lan­cer jusqu’à 10,5 tonnes vers l’orbite de trans­fert géo­sta­tion­naire, ain­si qu’une ver­sion moyenne « Ariane 62 », par­ti­cu­liè­re­ment adap­tée aux satel­lites institutionnels. 

Grâce au moteur ral­lu­mable Vin­ci de son étage supé­rieur, Ariane 6 pour­ra « accro­cher » le mar­ché pro­met­teur des méga-constel­la­tions, tout en répon­dant aux oppor­tu­ni­tés offertes par la pro­pul­sion élec­trique des satellites. 

Quant à Vega C, elle sera plus flexible, plus per­for­mante que Vega, et par­fai­te­ment adap­tée au mar­ché des petits satellites. 

À terme, elle se ver­ra par ailleurs dotée d’un sys­tème de lan­ce­ment multiple. 

Où en êtes-vous de ces futurs lanceurs Ariane 6 et Vega C ?

2016 a été une année clé. Le Conseil de l’ESA a don­né le coup d’envoi final du pro­gramme Ariane 6 le 13 sep­tembre lors de la Pro­gram Imple­men­ta­tion Review (« PIR »). Le contrat entre l’ESA et le maître d’œuvre indus­triel ASL a ain­si pu être signé le 9 novembre, avant même la confé­rence minis­té­rielle de Lucerne, pré­vue en décembre. 

Les pla­nètes sont donc ali­gnées pour que nous puis­sions débu­ter la com­mer­cia­li­sa­tion d’Ariane 6 et de Vega C dès la fin de l’année, pour un vol inau­gu­ral d’Ariane 6 en 2020, et de Vega C dès 2019. Je dois rap­pe­ler qu’à ces nou­veaux lan­ceurs est asso­ciée une nou­velle gou­ver­nance, mar­quée par le trans­fert de la com­pé­tence de concep­tion des lan­ceurs des agences vers l’industrie, ain­si que par le rap­pro­che­ment entre Aria­nes­pace et ses deux maîtres d’oeuvre indus­triels, Air­bus Safran Laun­chers s’agissant de la famille Ariane, et Avio-ELV pour Vega. 

Comment vous préparez-vous à l’avenir ?
Quels sont vos enjeux, mais aussi vos perspectives ?

L’évolution de la gou­ver­nance d’Arianespace appa­raît comme un nou­veau départ. Elle pro­met une filière plus inté­grée, assu­rant une meilleure conti­nui­té entre le pro­duit et le mar­ché, per­met­tant de faire preuve de davan­tage d’agilité et de réactivité. 

EN BREF

Pour mettre l’espace au service d’une vie meilleure sur Terre, Arianespace garantit l’accès à des services et solutions de transport spatial pour tout type de satellites, institutionnels et commerciaux, vers toutes les orbites.
Depuis 1980, Arianespace a mis en orbite plus de 540 satellites, grâce à ses 3 lanceurs (Ariane, Soyuz et Vega), depuis l’Amérique du sud en Guyane française et depuis l’Asie centrale à Baïkonour.
La société, dont le siège social se situe à Évry, France, est également implantée à Kourou (avec l’établissement de Guyane au Centre Spatial Guyanais, Port spatial de l’Europe), à Washington D.C., à Tokyo et à Singapour. CA en 2015 : 1,4 milliard d’Euros.

L’enjeu pour Aria­nes­pace est de main­te­nir dans ce contexte les fac­teurs clés qui ont fait son suc­cès depuis plus de 35 ans. L’espace n’a jamais offert autant de pos­si­bi­li­tés et de pro­messes aux citoyens d’améliorer leur vie sur Terre, et l’Europe spa­tiale doit conser­ver une place cen­trale dans cette grande aven­ture humaine. 

À ce titre, l’Union euro­péenne a pré­sen­té, pour la pre­mière fois fin octobre, sa stra­té­gie spa­tiale à long terme, consa­crant l’espace comme un enjeu stra­té­gique pour l’Europe.

Elle a rap­pe­lé la néces­si­té de pour­suivre les pro­grammes ambi­tieux que sont Gali­leo et Coper­ni­cus, mais pas seule­ment, avec des ambi­tions nou­velles au ser­vice de la connec­ti­vi­té glo­bale, de la sur­veillance et de la pro­tec­tion de l’environnement ou encore de la défense et de la sécurité. 

Et dans le pro­lon­ge­ment d’Ariane 6, l’Europe des lan­ceurs réflé­chit déjà à une nou­velle filière de pro­pul­sion à bas coûts. Bref, les pro­jets ne manquent pas, et nous avons à coeur de rele­ver les défis de l’avenir.

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