Attirer, former et gérer les talents
À l’école, au collège ou au lycée, l’objectif est que les talents nationaux s’épanouissent grâce à une culture des sciences développée dès le commencement de l’éducation.
À l’école primaire, Michel Godet souligne le rôle clé du savoir-être et de l’apprentissage des fondamentaux, même si « aujourd’hui, 40 % des élèves quittent l’école avec des bases trop fragiles et parmi ces derniers 15 à 20 % sont quasiment illettrés et le resteront ».
Cependant, l’action « La main à la pâte », lancée en 1996 à l’initiative de Georges Charpak, prix Nobel de physique, avec le soutien de l’Académie des sciences, contribue à améliorer la qualité de l’enseignement de la science et de la technologie à l’école primaire et au collège, école du socle commun où se joue l’égalité des chances.
REPÈRES
L’Académie des technologies, dans son rapport de 2014 « La renaissance de l’industrie », déplore que le système de formation initial n’accorde pas une considération ni une place suffisante aux savoirs pratiques et aux diverses formes d’alternance. Il n’encourage pas assez l’initiative, l’exploration, le travail en groupe et en mode projet, il ne développe pas suffisamment la confiance en soi.
Si les entreprises offraient plus d’opportunités d’évolution au personnel d’exécution, les carrières seraient plus attractives, ainsi que les filières d’enseignement qui y préparent.
Des expérimentations limitées
Au collège, l’enseignement intégré de science et technologie (EIST) en sixième et en cinquième permet de mettre en œuvre la démarche d’investigation caractéristique des pratiques scientifiques et technologiques et favorise le décloisonnement entre disciplines.
L’EIST vise plusieurs objectifs : stimuler la curiosité et développer le goût des sciences des élèves ; faciliter la transition entre l’école élémentaire et le collège ; donner une cohérence entre les disciplines scientifiques et technologiques ; pratiquer la démarche d’investigation telle qu’elle est inscrite dans les nouveaux programmes de sciences.
Les expérimentations à l’école ne concernent toutefois qu’un nombre trop restreint d’établissements (quelques centaines sur huit mille).
COMPLÉTER LA RÉFORME DE 2010
En janvier 2015, l’UPS, l’UdPPC et la SFP ont énoncé trois principes concernant l’enseignement des sciences physiques suite à la réforme des lycées :
mettre tout en œuvre pour que, quel que soit son choix d’études supérieures, un élève de filière S ait des acquis durables et universels dans des éléments de formation aux démarches scientifiques (modélisation, confrontation entre modèle et réalité) ;
guider toute réflexion en gardant la conviction que la compréhension des démarches scientifiques est une construction lente, qui ne saurait attendre la terminale S ou l’arrivée dans l’enseignement supérieur, mais qui doit au contraire commencer dès le collège ;
enfin, consolider l’outil mathématique, auquel l’enseignement et l’essence même de la physique et de la chimie sont fortement liés, par une pratique concrète des mathématiques.
De bac moins trois à bac plus trois
L’attirance vers les sciences de l’ingénieur et la formation des futurs cadres techniciens et ingénieurs se joue dans le créneau qui va de bac – 3 à bac + 3, et la réforme du lycée de 2010, qui prévoit explicitement un enseignement de technologie au programme des classes d’enseignement général, se présente comme une suite à l’EIST.
Cependant, cette réforme est à approfondir et à poursuivre pour créer une dynamique pérenne à haute visibilité autour d’une culture technologique au lycée, assurer une diffusion de la culture technologique à la hauteur des enjeux, mettre en place un processus adapté d’accompagnement et de recrutement des enseignants.
À cet égard, depuis 2014, l’initiative de l’académie de Rouen d’organiser son territoire en neuf réseaux professionnels est un prototype de nature à redonner de l’ambition dans ces parcours de formation.
Un bac inadapté
À la rentrée 2013, les étudiants inscrits dans l’enseignement supérieur étaient au nombre de 2 429 900. Parmi ceux-ci, ceux qui suivaient des études de techniciens ou d’ingénieurs étaient 76 500 (estimation) en sections de techniciens supérieurs de production, 93 500 en classes préparatoires aux grandes écoles et prépas intégrées des écoles d’ingénieurs, 115 800 de préparation en DUT et 137 300 en formations d’ingénieurs, y compris en partenariat.
Or, le problème rencontré en 2013, trois ans après la mise en œuvre de la réforme 2010 du lycée, est celui qui est exposé dans le message d’alerte émis par l’UPS (Union des professeurs de classes préparatoires scientifiques aux grandes écoles), l’UdPPC (Union des professeurs de physique et de chimie) et la SFP (Société française de physique) : depuis 2013, le bac S est inadapté aux études supérieures de physique et de chimie.
Le succès des BTS
Les sections de techniciens supérieurs (STS) relèvent de l’enseignement supérieur court professionnalisant.
NEUF RÉSEAUX À ROUEN
L’académie de Rouen a organisé son territoire en neuf réseaux académiques de lycées professionnels :
« Maintenance et conduite des systèmes »,
« Construction-travaux publics et éco-conception »,
« Propulsion et systèmes embarqués »,
« Commerce et services aux entreprises et aux personnes »,
« Systèmes numériques et informatique industrielle »,
« Métiers d’art »,
« Matière et procédés de transformation »,
« Tourisme-hébergement »,
« Énergies ».
Ces sections, aux effectifs en hausse depuis 2006, recrutent après le baccalauréat et proposent deux années de formation en vue d’obtenir le brevet de technicien supérieur (BTS). Les spécialités technico-professionnelles de production les plus suivies sont celles des technologies industrielles fondamentales et de commandes des transformations industrielles, et celles de mécanique-électricité-électronique.
Le BTS se prépare, au choix, par la voie scolaire classique, par alternance de périodes de formation en centre de formation et d’activité salariée dans l’entreprise, par la voie de la formation continue avec possibilité de bénéficier de la VAE – validation des acquis de l’expérience – pour tout ou partie des épreuves de l’examen associé au diplôme, ou par la voie de la formation à distance par l’intermédiaire d’un organisme de formation par correspondance.
Le contenu de la formation de chaque spécialité est élaboré par une commission consultative paritaire qui réunit employeurs, salariés et pouvoirs publics.
Cent treize IUT
Pour ce qui concerne la formation des cadres techniciens, depuis plus de quarante ans, les 113 instituts universitaires de technologie répartis sur tout le territoire assurent une formation préparant leurs étudiants à la fois à une insertion professionnelle immédiate, à bac + 2 ou à bac + 3, et à la poursuite d’études longues, en France ou à l’étranger.
Les diplômes, construits à la fois par des universitaires et des professionnels, dotent les étudiants de connaissances pluridisciplinaires solides et de compétences professionnelles précises pour réussir dans l’enseignement supérieur et répondre aux besoins des entreprises.
Accréditer les formations d’ingénieurs
LE PROCESSUS DE BOLOGNE
En Europe, la création d’un cadre de référence pour l’enseignement supérieur a conduit, en 1999, à l’instauration du « processus de Bologne » organisé autour de six actions :
un système de grades académiques facilement reconnaissables et comparables qui inclut l’introduction d’un supplément au diplôme commun afin d’améliorer la transparence ;
un système fondé essentiellement sur deux cycles (un premier cycle utile pour le marché du travail d’une durée d’au moins trois ans et un deuxième cycle – maîtrise – qui exige l’achèvement du premier cycle) ;
un système d’accumulation et de transfert de crédits du type de l’ECTS – European Credits Transfer System –, utilisé dans le cadre des échanges Erasmus ;
la mobilité des étudiants, des enseignants et des chercheurs impliquant la suppression de tous les obstacles à la liberté de circulation ;
la coopération en matière d’assurance de la qualité ;
la dimension européenne dans l’enseignement supérieur en augmentant le nombre de modules, de matières d’enseignement et de filières dont le contenu, l’orientation ou l’organisation présentent une dimension européenne.
La Commission des titres d’ingénieur (CTI) est responsable, depuis la loi de 1934, de l’évaluation et de l’accréditation des formations d’ingénieurs. L’habilitation à délivrer un titre d’ingénieur diplômé est ensuite donnée par le ou les ministères concernés.
La CTI comprend 32 membres schématiquement répartis en quatre collèges : huit choisis dans le personnel des institutions publiques ou privées délivrant le titre d’ingénieur diplômé, huit choisis en raison de leur compétence scientifique et technique, huit choisis par les organisations d’employeurs les plus représentatives, et enfin huit choisis par les associations et les organisations professionnelles d’ingénieurs les plus représentatives.
Son principe de fonctionnement est donc paritaire entre enseignement supérieur et entreprise.
Un triple défi
Trois défis importants sont à gagner : la reconnaissance du French engineer dans le cadre européen, la création des COMUE (Communautés d’universités et d’établissements) ; la création de valeur au sein des pôles de compétitivité.
Les formations supérieures aux grades master et docteur étant désormais l’objet d’un marché mondial, le développement des échanges académiques d’élèves et de professeurs exige un cadre de référence qui permette de gérer les équivalences entre les systèmes nationaux.
Certifier les diplômes au niveau européen
Désormais, le débat est centré sur la mise en place d’un Cadre européen des certifications (European Qualifications Framework, EQF). Pour la France, cela implique d’y transposer le Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP), et notamment pour les écoles d’ingénieurs dans le niveau EQF le plus élevé.
Il s’agit du niveau 7 : savoirs hautement spécialisés, dont certains sont à l’avant-garde du savoir dans un domaine de travail ou d’études, comme base d’une pensée originale ou de la recherche. Conscience critique des savoirs dans un domaine et à l’interface de plusieurs domaines.
Et du niveau 8 : savoirs à la frontière la plus avancée d’un domaine de travail ou d’études et à l’interface de plusieurs domaines.
Sachant que le diplôme d’ingénieur est positionné au niveau master et que le grade de PhD est internationalement le plus élevé, la reconnaissance du French engineer au sein de l’EQF est encore à gagner.
S’adapter au contexte mondial
Depuis le début de la révolution industrielle, la valeur ajoutée des ingénieurs a toujours été d’innover, on pourrait donc avancer que le sujet n’est pas nouveau. En fait, l’innovation dans un contexte mondialisé devient un défi pour deux raisons.
La première est que la concurrence exige que les cycles soient de plus en plus rapides, et il n’est plus question d’enchaîner séquentiellement des phases (recherche fondamentale, recherche appliquée, recherche technologique, transfert de technologie, industrialisation).
“ Obtenir la reconnaissance du French engineer ”
Tout le génie est au contraire de savoir piloter ces phases le plus possible en parallèle. Aussi les chercheurs doivent-ils « connaître » l’industrie.
La seconde est que la R&D des entreprises fonctionne de plus en plus en partenariat avec des laboratoires académiques et que le dialogue dans le sens entreprise-recherche doit lui aussi fonctionner en cycle court.
Les ingénieurs doivent être aptes à choisir de bons partenaires de recherche en même temps qu’à formuler scientifiquement les verrous à lever.
Dans le vivier mondial de PhD, docteurs et French engineers, il importe de mettre en valeur le savoir-faire français du pilotage paritaire entre enseignement supérieur et entreprise des formations des cadres pour l’industrie.
C’est dans cet esprit que la Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (CDEFI) a créé en 2013, en accord avec le MENESR, un parcours doctoral « Compétences pour l’entreprise ».
Course à la taille
Si la mondialisation impose aux campus ou désormais aux Communautés d’universités et d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche (COMUE) de se mettre à la « maille », il convient de raison garder et de ne pas considérer que la taille minimale doit être pour tous de n dizaines de milliers étudiants et d’élèves.
L’Université Paris-Saclay en est un cas d’application : elle associe 19 établissements de nature diverse et complémentaire, avec 60 000 étudiants et élèves, et 10 500 chercheurs et enseignants-chercheurs.
Son projet a naturellement donné la priorité aux décisions qui jouent en faveur de son attractivité : créer un collège doctoral unique du plus haut niveau, rationaliser et rendre plus lisible une offre foisonnante de masters, améliorer la vie des étudiants et élèves, être moteur dans l’écosystème d’innovation du territoire.
Il n’y a aucun doute qu’« Ingénierie, sciences et technologies de l’information, systèmes » en sont un des fleurons.
Attractivité et qualité de vie
Deux aphorismes empruntés à Michel Godet : « la qualité de vie, facteur d’attractivité » et « les pôles de compétitivité seront des pôles de qualité de vie ou ne seront pas » expriment enfin que la présence et donc la formation de cadres nécessaires au développement des entreprises grandes, moyennes et jeunes occupent une place clé sur la feuille de route de chacun de ces écosystèmes propices à l’innovation et à l’entrepreneuriat.
Dans la renaissance industrielle en France, la disponibilité de cadres en nombre et en compétences appropriées est indispensable. La formation des techniciens et ingénieurs y est d’autant plus critique qu’elle exige cohérence et constance sur le temps long.
L’Université de Paris-Saclay associe 19 établissements. © ÉCOLE POLYTECHNIQUE
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