Au plus près des territoires
Manuel Reman (97) est Président de MHCS, l’entité qui regroupe les activités « Champagne » de LVMH. Il nous en dit plus sur l’ancrage territorial, l’engagement en termes de RSE, de développement durable et les ambitions portées par les Maisons de Champagne dans un contexte où la crise actuelle pousse les entreprises ainsi que les territoires à revoir leurs organisations et leurs priorités.
Le groupe LVMH et ses Maisons de Champagne se sont engagées dans une démarche environnementale et sociétale depuis plusieurs années. Qu’en est-il ?
Les engagements environnementaux et sociétaux sont depuis toujours ancrés au cœur des actions de LVMH. Nous agissons de manière concrète en travaillant des produits avec de meilleures performances environnementales, notamment sur la réduction d’émissions de CO2, en améliorant l’impact environnemental de nos sites et de nos points de vente. Le Groupe est également engagé à faire de l’excellence un levier de l’insertion sociale et professionnelle, en solidarité avec les territoires sur lesquels nous sommes implantés, avec la volonté de démultiplier l’impact social positif de nos activités.
Il en est de même au sein des Maisons de Champagne. Le développement durable nous a toujours préoccupé. En tant qu’entreprise, il est de notre responsabilité d’œuvrer pour une société plus propre, plus juste, plus solidaire. Nous avons d’ailleurs un devoir d’exemplarité en tant que leader de la catégorie Champagne et premier employeur privé de la région. Parce que notre impact économique et sociétal sur le territoire est majeur, nous nous efforçons de jouer notre rôle tout en étant solidaire avec de nombreuses initiatives pour améliorer l’employabilité, l’insertion professionnelle, la formation et favoriser ainsi le tissu local. Dans cette continuité, par exemple, la Maison Krug a créé le « Fonds K pour la musique », un fonds qui investit dans des projets philanthropiques autour de la musique. J’encourage les nombreux lecteurs mélomanes à aller visiter leur site !
Quelles sont les actions que vous déployez dans ce cadre et en lien avec les territoires ?
Notre vignoble est le plus grand de la Champagne, en cumulant les 6 marques du Groupe : Dom Pérignon, Krug, Mercier, Moët & Chandon, Ruinart et Veuve Clicquot. Nos vignobles ont été enherbés parmi les premiers dans la région et nous n’utilisons plus d’herbicide. Ceci nous oblige à adapter nos méthodes culturales. C’est un défi excitant, c’est à l’Homme – nos vignerons et œnologues – de s’adapter à ce que nous donne la Nature, tout en garantissant à nos consommateurs « Une seule qualité, la toute première », comme disait Madame Clicquot. Nos vignobles sont certifiés Viticulture Durable depuis 2014 et nous incitons les vignerons qui nous vendent leurs raisins à faire de même : primes à la certification, aide administrative, conseil technique…
Depuis 2015, nous avons réduit nos consommations d’eau d’un tiers. Nous expédions nos bouteilles par transport fluvial ou par camions au gaz.
La majeure partie des émissions de CO2 proviennent de la fabrication de la bouteille en verre. Nous avons contribué à alléger cette partie en adoptant une démarche d’éco-conception pour les emballages : le meilleur exemple est l’étui 100 % recyclé et recyclable de Ruinart Blanc de Blancs « Seconde Peau » en fibre de cellulose. Cet étui n’a pas été breveté pour permettre à nos concurrents d’utiliser cette technologie, car c’est l’ensemble de la Champagne qui doit progresser.
Sur le plan sociétal, le rôle de nos Maisons est crucial dans la région. Premier employeur privé avec plus de 2 000 salariés, nous injectons près de 800 M€ par an dans l’économie locale. Les travaux d’investissements dans nos vignobles, cuveries et ateliers sont majoritairement confiés à des entreprises locales, plus à même de comprendre les contraintes et enjeux spécifiques du Champagne. Nous signons régulièrement des partenariats avec des entités locales : l’ONF, l’Agence de l’Eau, l’Université de Reims-Champagne-Ardenne, NEOMA Business School, le Lycée Viticole d’Avize, une classe ULIS (Unités localisées pour l’inclusion scolaire)…
En 2015, LVMH a créé l’IME (Institut des Métiers d’Excellence) pour offrir à des jeunes des programmes de formation professionnelle pour la transmission du savoir-faire, tout en valorisant les filières de l’artisanat. Nous avons aussi créé une entreprise adaptée pour permettre aux personnes atteintes d’un handicap de reprendre une activité en intégrant une de nos Maisons. Près de 100 personnes en ont déjà bénéficié.
Cette année, la crise de la Covid-19 a renforcé cet enjeu de RSE et de développement durable pour les entreprises. Comment avez-vous vécu cette période ?
Cette période éprouvante s’avère être aussi un test pour les organisations : capacité à mettre en sécurité ses salariés, à innover pour trouver de nouvelles opportunités commerciales, à gagner en agilité, à travailler en équipe, à aller à l’essentiel. En termes de RSE et de développement durable, elle n’a fait qu’accélérer un mouvement déjà enclenché : plus propre, plus responsable, plus transparent, plus authentique. Nous avons soutenu les structures médicales locales : distribution de gel et de masques ; élaboration des paniers-repas pour les soignants par nos chefs ; mise à disposition de logements pour le personnel médical ; soutien à la recherche de nouveaux traitements…
Je suis également persuadé que cette crise va redessiner les territoires. Sur les derniers mois, de nombreuses entreprises ont déménagé à Reims, une ville située à moins de 45 minutes de Paris, et à 1 heure des aéroports. Avec des loyers 7 fois moins élevés qu’à Paris, dotée de très bonnes écoles de la maternelle au supérieur et d’un vivier de talents (45 000 étudiants : Sciences Po, NEOMA Business School, chaires de biotech de CentraleSupélec et d’innovation d’AgroParisTech…), Reims est une ville dynamique, verte et où le trajet moyen domicile-travail est de 12 minutes. 2020 a accéléré la tendance des dernières années.
Actuellement, quels sont les sujets et les enjeux qui vous mobilisent ?
Nous avons investi 20 m€ dans un nouveau centre de R&D pour aller plus loin et plus vite sur ces nouveaux enjeux de développement durable : quels sont les pratiques culturales ou les cépages les plus adaptés au réchauffement climatique ? Intégrer davantage de biodiversité dans nos vignobles peut-il être une voie pour éliminer totalement les traitements ? Comment élaborer des produits encore plus qualitatifs et répondant aux nouvelles attentes des consommateurs : moins de sucre, moins d’alcool ? Comment réduire notre empreinte carbone en captant le CO2 de la fermentation alcoolique ? Ce centre, que nous inaugurerons en milieu d’année 2021, travaillera pour l’ensemble des Maisons de Moët Hennessy. Cela nous permettra de conserver ce « petit quart d’heure d’avance », pour reprendre la devise de la Maison Moët & Chandon.
« Carrières » chez LVMH
Parlez-nous de votre carrière chez LVMH.
Après avoir démarré ma carrière dans le conseil en stratégie, j’ai rejoint LVMH et plus particulièrement la Maison Moët & Chandon en 2004, comme chef de cabinet du PDG. J’ai ainsi pu découvrir toutes les facettes d’une Maison de Champagne, les pieds ancrés dans la craie et les caves et les yeux tournés vers les consommateurs du monde entier.
Après ce rôle transversal et initiatique, j’ai pris la responsabilité des équipes de contrôle de gestion. J’ai également été directeur de production de Moët & Chandon, où j’ai pris conscience des enjeux humains : sécurité, motivation et développement d’une équipe de 400 personnes travaillant sur 5 sites différents, interactions avec les syndicats, projection de l’évolution des métiers de l’entreprise…
J’ai ensuite eu la chance en 2016 de bénéficier d’une mobilité internationale pour prendre la direction de la filiale de distribution Ibérique afin de renforcer la désirabilité de nos marques sur ces marchés et pour ouvrir une filiale au Portugal. En vente, vos actions ont un effet immédiat ce qui ne fait que renforcer l’adrénaline liée à ce type de postes. De retour en France, j’ai pris la direction générale des activités « Champagne » : définition et suivi des stratégies industrielles et d’approvisionnement, M&A, fonctions support aux différentes Maisons, représentation du Groupe auprès de l’Interprofession… Ma mission : garantir que tout soit en place pour soutenir les Maisons dans leurs ambitions.
J’ai eu la chance de pouvoir vivre des expériences variées et intéressantes. C’est aussi un bel exemple de l’engagement de LVMH et de ses maisons dans le développement de ses collaborateurs.
Au travers de votre parcours, quelles sont pour vous les compétences clés qui font la différence ?
Les entreprises sont remplies de cadres exigeants, travailleurs, compétents dans leurs domaines et qui savent calculer vite et faire de belles présentations. Le succès que connaissent les marques du groupe LVMH repose en partie sur la reconnaissance du facteur humain dans nos métiers. Ce qui fait la différence, c’est ce qu’on appelle les « soft skills » : empathie, créativité, confiance, écoute, honnêteté, être orienté solution, esprit d’entreprendre, prise de recul… Peu importe que vos équipes soient des financiers, des vignerons, des techniciens, des vendeurs, donnez-leur un cap, motivez-les, écoutez-les, respectez-les, supportez-les. Prenez soin de vos équipes, elles prendront soin de votre entreprise !
Comment pourriez-vous définir la culture LVMH ?
Le groupe LVMH respecte l’identité et la culture de chacune des Maisons qui le constituent. Si nous sommes un groupe décentralisé, le groupe reste une entreprise familiale où l’esprit entrepreneurial est clé dans le développement de chaque Maison. Mais il existe bel et bien une « culture LVMH » sur nos dénominateurs communs : une tension positive entre notre ancrage dans la tradition et une quête de modernité et d’innovation quotidienne, une passion pour les produits que nous élaborons en recherchant toujours l’excellence pour nos clients, et cette volonté d’avoir un impact positif sur la société dans laquelle nous évoluons.