Cécile SYKES (X84)
Physicienne du solide de formation (Doctorat en physique des semi-conducteurs), Cécile Sykes s'est intéressée à la physique de la matière molle dans le cadre d'un contrat postdoctoral avec Rhône-Poulenc, aujourd'hui Rhodia. Elle a alors travaillé sur des problèmes appliqués aux peintures et aux revêtements, visant à prédire la capacité d'une surface à être mouillée par un liquide de manière stable, ou pas. Elle obtient en 1992 un poste de chargée de recherches au CNRS en physique de la matière molle, dans un laboratoire CNRS affilié également à ce qui est aujourd'hui Sorbonne Université.
Elle s'intéresse à la fin des années 90 à l'application des concepts de physique de la matière molle aux systèmes vivants au sein d'un laboratoire CNRS associé à l'Institut Curie à Paris. Son projet consiste alors à comprendre l'un des dysfonctionnements cellulaires qui mène aux métastases cancéreuses : le mouvement (appelé "motilité") trop rapide des cellules cancéreuses. Avec son équipe, notamment sa collègue biologiste Julie Plastino, elle conçoit des systèmes expérimentaux épurés qui miment cette motilité par la dynamique d'assemblage d'un biopolymère, l'actine, qui joue un rôle essentiel dans l'activité dynamique du squelette de nos cellules (cytosquelette). Des objets de différente nature (billes de latex micrométriques, gouttelettes d'huile ou membranes) peuvent ainsi être propulsés et déformés par l'assemblage de l'actine qu'elle parvient à contrôler à leur surface. Ces systèmes expérimentaux lui ont permis de comprendre les mécanismes physiques et mécaniques de la production de force et des déformations par l'assemblage de l'actine. Ce travail a donné lieu à une cinquantaine de publications dans des journaux internationaux et deux brevets, et a contribué à l'identification d'une molécule qui diminue le risque de métastases.
Son équipe s'est aussi intéressée au rôle possible de la dynamique de l'actine dans le mouvement de la membrane des globules rouges. De manière surprenante, les fluctuations actives de la membrane des globules rouges ne reposent pas sur la dynamique de l'actine mais plutôt sur l'attachement transitoire d'une autre protéine du cytosquelette, la spectrine, à la membrane cellulaire.
En parallèle de ses activités de recherche, Cécile Sykes a enseigné la physique statistique et la physique des polymères biologiques, cours destinés à des physiciens, des biologistes et des chimistes. Aujourd'hui, au sein du département de physique de l'Ecole Normale Supérieure à Paris, où son équipe s'est installée en 2021, Cécile s'intéresse aux changements dans le noyau lors de la migration cellulaire confinée, toujours avec des systèmes expérimentaux épurés, et toujours en collaboration avec l'Institut Curie, en particulier avec son département de recherche translationnelle. Cécile Sykes est directrice de recherches au CNRS, et également chargée de mission pour l'interdisciplinarité entre la physique et la biologie à l'Institut de Physique du CNRS.
Tous les articles :
- Une X dans la recherche : où en est la parité femmes-hommes au CNRS ? - Magazine N°777
- Voyage aux frontières de la physique avec la biologie - Magazine N°721