Avant-propos
Une industrie sur tous les fronts
Cette discipline qui permit de forger les premiers outils irrigue l’ensemble des activités primaires, secondaires et tertiaires.
De l’extraction des matières à leur distribution, de la conception, de la fabrication et du traitement des produits à leur livraison, la mécanique est en effet partout.
Au côté de grands groupes réputés, souvent leaders mondiaux dans leur domaine, près de 7 000 PME mécaniciennes, réparties sur l’ensemble du territoire, et qui représentent en moyenne 20 % de l’emploi industriel de chaque région, font quotidiennement preuve de créativité et de capacité de développement dans chacune des multiples spécialités de cette vaste industrie répartie en cinq grands domaines d’activité :
- machines, équipements et systèmes de production,
- outillage, composants, pièces, sous-ensembles,
- activités de sous-traitance,
- optique, instruments de précision et de mesure,
- équipement des ménages et de la santé.
Ces industries ont en commun de fournir l’essentiel de l’investissement de l’industrie, des services et des ménages comme :
- les équipements de l’industrie : machines-outils, machines textiles, de fabrication du papier, équipements de dépollution…
- les matériels pour l’agroalimentaire : équipements de salaisonnerie, machines à fabriquer le chocolat…
- les équipements du commerce : matériel de grande cuisine, éléments frigorifiques…
- les équipements pour les services : matériel d’imprimerie, mobilier métallique, matériel médicochirurgical,
- les matériels pour le bâtiment et les travaux publics,
- les machines pour l’agriculture,
et regroupent aussi les fabricants de composants et les sous-traitants qui travaillent presque exclusivement pour l’investissement en tant que fournisseurs de l’automobile, de l’aéronautique ou des équipements mécaniques.
Une croissance ralentie mais toujours positive
Après six années d’une croissance forte et continue (+ 5% en moyenne annuelle), qui a entraîné une évolution significative des effectifs -, témoignage du caractère très manufacturier du secteur -, les entreprises françaises de mécanique ont enregistré en 2001 une progression de 2,5 % de leur chiffre d’affaires qui s’établit à 83,6 milliards d’euros.
Preuve de leur compétitivité, elles exportent près de 50 % de leur production dont plus de la moitié sur les marchés de l’Union européenne. Sur les neuf premiers mois de 2001 les exportations de la mécanique française sont restées dynamiques s’inscrivant en progression de plus de 6 % par rapport à l’exercice précédent.
Les baromètres sectoriels mensuels mis au point par la Fédération des industries mécaniques, et publiés pour la première fois en 2001, conduisent toutefois à une prévision d’activité en baisse pour 2002.
Ils confirment en effet que le ralentissement économique européen, et donc la baisse de production des industries mécaniques, devrait se poursuivre au moins au cours du premier semestre.
Dans le meilleur des cas, les entreprises du secteur espèrent un raffermissement de l’activité tirée par les exportations vers les autres marchés mondiaux, et ceci à condition que l’économie américaine amorce une reprise au milieu de l’année.
En revanche, analysé sur une plus longue période, le besoin d’investissement reste fort en Europe, compte tenu du retard pris sur les États-Unis au cours de la dernière décennie.
La production de la mécanique européenne sera donc orientée à la hausse dans les prochaines années et celle de la mécanique française devrait participer de cette tendance de fond.
Encore faut-il, pour ce faire, que les conditions évoquées plus loin soient réunies.
Des hommes hautement qualifiés
Les industries mécaniques emploient près de 600 000 salariés dont 78 % ont une compétence qualifiée.
Aujourd’hui en effet le mécanicien doit pouvoir mettre en œuvre et allier les technologies et les techniques les plus nouvelles -, comme l’électronique ou l’informatique maintenant omniprésentes dans notre industrie -, aux disciplines plus traditionnelles.
L’imagination pour concevoir, l’efficacité et la qualification pour produire, la connaissance des réalités industrielles pour conserver ses atouts de compétitivité : autant de défis que doit relever le mécanicien.
Du CAP au diplôme d’ingénieur, plus de 50 formations conduisent aux métiers de la mécanique, tant dans l’industrie que dans l’ensemble des autres secteurs utilisateurs.
Et pourtant les entreprises de mécanique peinent aujourd’hui à recruter le personnel qualifié dont elles ont besoin. L’analyse de ces difficultés et les initiatives prises dans ces domaines sont traitées dans l’article consacré à la formation.
Une industrie en mouvement
Après avoir réalisé, depuis de longues années, d’importants progrès de productivité, de flexibilité, de qualité, d’intégration des problèmes environnementaux, les entreprises de mécanique développent, chacune dans leurs domaines, des efforts permanents d’innovation, plutôt incrémentielle que de rupture, améliorant ainsi, pas à pas, les procédés et les produits existants :
- évolution d’une sous-traitance de capacité vers une sous-traitance de compétence,
- mise en œuvre, parfois au terme d’une recherche collective, de nouveaux procédés (usinage à grande vitesse, découpe laser ou jet d’eau…),
- nouvelles méthodes d’analyse de besoin client (prototypage…),
- nouvelles méthodes d’organisation de conception ou reconception (standardisation des composants, gestion des modifications, conception par la méthode d’analyse du cycle de vie…),
- développement de nouveaux services associés aux produits,
- augmentation des performances en termes de sûreté, de fonctionnalités… parallèlement à la réduction des coûts,
- utilisation des nouveaux matériaux,
- intégration des nouvelles technologies.
Témoin de cet important mouvement innovant des industries mécaniques, le bilan sectoriel Mécanique 2000 de l’Anvar qui relève que plus du tiers des projets innovants du secteur accompagnés par l’Agence sont qualifiés de premières mondiales.
Pour maintenir leurs atouts de compétitivité les entreprises de mécanique doivent, parallèlement, innover et répondre tant aux exigences de leur environnement : donneurs d’ordres, réglementations, etc., qu’aux enjeux de la mondialisation.
Autant de défis pour les industriels de la mécanique que la Fédération a pour mission de prévoir et accompagner, d’une part en apportant aux professions qu’elle représente les outils de veille et de développement pour leurs entreprises et, d’autre part, en assurant aux plans français et international la défense et la promotion de ce secteur majeur de l’industrie française.
L’environnement économique doit intégrer les enjeux de cette mutation de dimension mondiale
Il n’y a pas de grand pays développé sans industrie prospère. Intervenant dans l’ensemble des activités, la mécanique joue par conséquent un rôle fondamental dans l’évolution de tous les secteurs économiques. Il est d’ailleurs remarquable qu’à quelques exceptions, parfois brillantes, la présence d’une puissante industrie mécanique soit l’apanage des pays fortement industrialisés et donc à niveau de vie élevé.
Si les entreprises de mécanique peuvent se prévaloir de réussites souvent remarquables -, résultats d’efforts conduits avec persévérance depuis de longues années -, les besoins qu’elles expriment vis-à-vis de leur environnement économique et social sont de trois ordres.
- D’abord, la conduite d’une politique économique et sociale adaptée à la compétition mondiale pour réduire
leur vulnérabilité puisque, structurellement, elles doivent faire face aux périodes basses du cycle d’investissement
Ceci induit la mise en place d’une politique réactive, équitable et dynamique :
- réactive, parce que le monde bouge et que les entreprises ne doivent pas être freinées dans leur capacité à innover, investir et embaucher ;
- équitable, parce qu’aujourd’hui elles sont systématiquement plus, et souvent mal, réglementées et davantage taxées que leurs concurrentes étrangères ;
- dynamique, parce que les éléments dogmatiques, de quelque tendance qu’ils s’exercent, figent les situations et empêchent le progrès.
Mesures structurelles et flexibilité en matière de politique économique et sociale, adaptation de certaines réglementations aux réalités du terrain et évolution des comportements constituent, pour la mécanique, les priorités à mettre en œuvre.
À ce titre, la Fédération des industries mécaniques demande notamment la suppression de la taxe professionnelle qui, dans sa forme actuelle, constitue une véritable taxe sur l’investissement.
Elle formule à cet égard une proposition, en totale harmonie avec les dispositions en vigueur, ou envisagées, chez nos concurrents européens, qui consisterait en particulier en un impôt assis sur les résultats et non plus sur les coûts.
Une autre préoccupation forte des mécaniciens concerne l’inadaptation à l’industrie de la loi de 1975 sur la sous-traitance, composante importante du secteur.
La FIM demande tout simplement, comme cela se fait dans les autres pays européens, de garantir le paiement du sous-traitant par le client final à un moment où les donneurs d’ordres intermédiaires peuvent se révéler défaillants.
- Le second tient à l’amélioration des relations existant en France au sein du monde économique
Au-delà des incontournables évolutions qui relèvent des pouvoirs publics, et dont la fiscalité constitue un élément essentiel, un certain nombre d’améliorations doivent aussi être rapidement apportées par les entreprises dans leurs relations clients/donneurs d’ordres/fournisseurs.
Face à la multiplication des facteurs de risque inhérents notamment au retournement de la conjoncture et aux événements internationaux, les différents acteurs économiques doivent en effet, par des relations saines et équilibrées, constituer une chaîne solide et responsable.
Force est aujourd’hui malheureusement de constater que le non-respect ou l’allongement des délais de paiement et certaines pratiques abusives perdurent, voire s’amplifient. Cette dérive doit être corrigée.
Et d’ailleurs, alors qu’on oppose si souvent producteurs et distributeurs, il a été possible d’obtenir, pour les biens de consommation durables, de premiers accords sur les conditions de paiement, même en cas de litiges partiels.
Cette notion de chaîne doit s’appliquer également aux services que recherchent les mécaniciens auprès de leurs banques et de leurs assureurs.
Il est facile de comprendre qu’un industriel qui exporte 50 % de sa production, dont les contrats se déroulent sur de nombreux mois, et qui subit parfois durement les évolutions rapides de la demande de ses clients, a des besoins de financement adaptés.
Ceci concerne aussi les assureurs, qui doivent apprécier les risques inhérents à des activités spécifiques qui ne peuvent être traités de façon statistique, et, bien sûr, déterminer leurs tarifications en fonction de ces éléments.
- Enfin, il s’agit de l’image de la mécanique, qui rejoint pour partie la place de l’industrie dans notre pays
Comme je l’ai évoqué, l’industrie mécanique doit se doter de nouvelles compétences, mais elle a aussi l’ambition d’offrir un avenir à ceux qui cherchent des métiers valorisants. Cette industrie est basée sur la qualification des hommes et des femmes qui concourent à la création de richesse. C’est une réalité aussi bien dans les grandes que dans les petites entreprises de ce secteur. En dehors de l’exploitation de matières premières, il n’y a pas en effet d’expérience de réussite d’implantation industrielle sans cela.
Constituant un maillon incontournable dans les applications des progrès de la science dans la vie de tous les jours, la mécanique doit également être reconnue du monde de la recherche comme une discipline à part entière. Ce point est fondamental mais je n’y insiste pas car il est largement développé par ailleurs.
La mécanique doit avoir aussi, et ce n’est pas le moins important, la confiance de ceux qui acceptent d’investir dans le capital de ses entreprises, car c’est une activité qui nécessite, même dans les petites entreprises, des moyens importants. Le caractère structurellement cyclique de son activité se prête mal à une vision à court terme de ces participations et implique la confiance que j’évoquais ci-dessus.
Transversale et indispensable à tous les secteurs, la mécanique doit ainsi pouvoir vivre, se développer et maintenir ses formidables atouts de compétitivité.
Car, » au cœur du monde en mouvement « , elle constitue un indicateur très révélateur de » l’état de santé » des entreprises industrielles.