BÉLA BARTÓK : Concerto pour orchestre
Les talents de pédagogue de Jean- François Zygel sont désormais unanimement connus. Avec ses conférences tout d’abord, rapidement filmées et diffusées à la télévision et en DVD, puis ses émissions didactiques également à la télévision, il est devenu le symbole de la musique classique « expliquée », et donc de la musique classique rendue accessible à tous. Après une série consacrée aux plus grands compositeurs (tous ses DVD sont à conseiller, mais ses analyses des Français Debussy et César Franck nous paraissent particulièrement passionnantes), Zygel a entamé une belle collection plus ambitieuse qui consiste à décortiquer une oeuvre symphonique, avec l’appui de l’Orchestre philharmonique de Radio France et de son chef coréen Myung- Whun Chung. Après la Symphonie du Nouveau Monde, la Symphonie pastorale, le Boléro de Ravel, Zygel nous présente ici le Concerto pour orchestre de Béla Bartók.
Ayant fui le nazisme aux États-Unis, Bartók, à soixante-deux ans, est malade et sans subsistance à partir de 1942. La Société des auteurs américains, sous l’influence du chef d’orchestre Serge Koussevitzky, lui commande ce Concerto pour orchestre. Le titre Concerto pour orchestre est évidemment un oxymore, puisque habituellement un concerto fait intervenir un ou plusieurs solistes pour concerter justement avec l’orchestre. Le titre montre le besoin de virtuosité de l’orchestre dans cet oeuvre, virtuosité comme celle d’un soliste de concerto, et signifie aussi que Bartók fait intervenir des soli de la plupart des instruments, ou même de pupitres entiers, tout au long de l’exécution.
Les explications linéaires de Zygel, avec le soutien de son piano ou de tout l’orchestre, maintiennent l’intérêt et restent continûment pertinentes. Elles analysent notamment les thèmes du Concerto, et mettent l’accent sur les signes reconnaissables du style de Bartók, tels que les mélanges de rythmes et d’atmosphères, thèmes folkloriques, et son constant hommage à Bach (ostinato, contrepoint, canons et fugue, choral, etc.). Ces explications sont parfois agrémentées des commentaires de Myung-Whun Chung qui parle un français parfait (il dut remplacer Daniel Barenboïm à la tête de l’Opéra Bastille à la fin des années 1980). De plus, les commentaires du livret, très riches et très documentés, permettent d’aller encore plus loin dans l’analyse du contexte de composition de l’œuvre.
Le DVD contient naturellement aussi l’exécution intégrale de l’œuvre. Grâce aux images très bien réalisées, avec des gros plans pertinents (les bois, les pupitres de cordes) et aux explications de Zygel, cette œuvre emblématique devient aussi accessible que du Beethoven ou du Mozart.