BRAHMS : CONCERTO POUR PIANO N° 2

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°660 Décembre 2010Par : Joachim Achucarro, piano, direction Sir Colin DavisRédacteur : Marc Darmon (83)

Excep­tion­nel DVD, qui fera décou­vrir à beau­coup le fan­tas­tique pia­niste espa­gnol qu’est Achu­car­ro. À l’heure où l’in­ter­pré­ta­tion pia­nis­tique se stan­dar­dise, où les scènes se par­tagent sou­vent entre les « poètes » main­te­nant âgés (Per­ahia, Nel­son Freire, Baren­boïm) et les vir­tuoses (Lang Lang, Volo­dos, Yun­di), quel plai­sir de voir un pia­niste qui se risque dans une inter­pré­ta­tion qui prend au corps, dans la lignée des Arrau, des Rich­ter, des Rubinstein.

Coffret DVD AchucarroCe jeu, qui allie puis­sance et pro­fon­deur de la main gauche et clar­té et cou­leur de la main droite, offre à la fois majes­té, puis­sance et cha­leur. Son jeu de la pédale est éga­le­ment tout un art. Le pia­niste espa­gnol joue sur un tabou­ret sur­éle­vé, son corps est faci­le­ment pro­je­té vers le cla­vier, ce qui lui per­met une grande dyna­mique. Ce grand pia­niste de notre temps, qui enseigne en trois langues (il parle éga­le­ment par­fai­te­ment l’an­glais et le fran­çais) célèbre ses cin­quante ans de car­rière avec cet enre­gis­tre­ment du Second Concer­to de Brahms.

Immortalisée pour le DVD

Cette inter­pré­ta­tion n’a pas été enre­gis­trée lors d’un concert public, mais bien pour être immor­ta­li­sée en DVD. Elle est très bien fil­mée, ce qui nous per­met en par­ti­cu­lier de ne rien man­quer de chaque inter­ven­tion du soliste. Et chaque fois nous sommes sub­ju­gués par cette patte sonore, ce timbre et cette cou­leur, par ces phra­sés qui nous empêchent de relâ­cher l’at­ten­tion une seconde. Cette inter­pré­ta­tion très per­son­nelle, avec des phra­sés constam­ment ori­gi­naux, oblige sou­vent le chef à regar­der le soliste pour battre le tempo.

Un solo de violoncelle

Le Second Concer­to de Brahms est en quatre mou­ve­ments, alors que tous les concer­tos qui l’ont pré­cé­dé depuis le XVIIIe siècle sont en trois mou­ve­ments. Le mou­ve­ment lent insère un très beau solo de vio­lon­celle joué par le pre­mier vio­lon­celle de l’Or­chestre Sym­pho­nique de Londres. Ce der­nier montre une nou­velle fois la qua­li­té de ses ins­tru­men­tistes et son haut niveau d’excellence.

Le grand Sir Colin Davis

Achu­car­ro a joué avec les plus grands chefs (Rat­tle, Meh­ta), mais cet enre­gis­tre­ment est sa pre­mière col­la­bo­ra­tion avec le grand Sir Colin Davis. Ce for­mi­dable chef est insuf­fi­sam­ment connu et recon­nu. On se sou­vient de ses com­bats pour faire décou­vrir dans les meilleures condi­tions l’en­semble de l’œuvre de Ber­lioz. Il est un grand chef d’o­pé­ra (il a long­temps diri­gé Covent Garden).

Mais il est aus­si un for­mi­dable accom­pa­gna­teur, comme le prouve son enre­gis­tre­ment des concer­tos de Bee­tho­ven avec Clau­dio Arrau, et ce DVD.

En bonus, le DVD contient un réci­tal d’A­chu­car­ro dans la salle Goya du musée du Pra­do. Brahms encore avec les Inter­mez­zi op.117, puis deux Pièces pour la main gauche de Scria­bine (très impres­sion­nant à voir), deux Pré­ludes de Cho­pin et un extrait d’Ibe­ria. Du très grand piano.

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