Centrales immergées : un concept en rupture

Dossier : L’industrie nucléaire après FukushimaMagazine N°686 Juin/Juillet 2013
Par BERNARD PLANCHAIS (75)

Le mar­ché des SMR est com­plé­men­taire de celui des gros réac­teurs ; il s’adresse à des réseaux de faible puis­sance ins­tal­lée (<10 GWe) ou fai­ble­ment inter­con­nec­tés. C’est un mar­ché d’offre qui s’ouvrira très lar­ge­ment dès lors qu’un pro­duit SMR com­pé­ti­tif, contre­ba­lan­çant les effets d’échelle en faveur des gros réac­teurs, lui sera pro­po­sé. Le seuil de com­pé­ti­ti­vi­té des SMR a été esti­mé à une élec­tri­ci­té pro­duite à un coût infé­rieur à 100 €/MWh.

REPÈRES
Dans les grands pays indus­triels qui ont pour­sui­vi un pro­gramme nucléaire après Fuku­shi­ma, États-Unis, Chine, Rus­sie, Corée du Sud, et peu­têtre bien­tôt à nou­veau le Japon, les petits réac­teurs (SMR, small modu­lar reac­tors, réac­teurs de puis­sance infé­rieure à 300 MWe, TNPP, trans­por­table nuclear power plants) com­mencent à être consi­dé­rés comme une des voies du renou­veau du nucléaire, à côté des réac­teurs de forte puis­sance (témoin le pro­jet russe en construc­tion de barge de sur­face Aka­de­mik Lomonosov).

L’industrie nucléaire se rapproche de l’industrie navale

On observe chez tous les pro­mo­teurs étran­gers de SMR un rap­pro­che­ment entre indus­trie nucléaire et indus­trie navale. Il paraît évident que seules les rup­tures auto­ri­sées par les méthodes de construc­tion navale per­met­tront aux SMR de deve­nir compétitifs.

C’est ce qui a conduit à déve­lop­per une gamme d’éléments modu­laires, des « briques tech­no­lo­giques », gages de com­pé­ti­ti­vi­té, adap­tées à toutes les confi­gu­ra­tions ter­restres ou marines.

Dans le naval de défense, DCNS est l’industriel de réfé­rence en France et un des lea­ders mon­diaux. Anti­ci­pant une stag­na­tion de ce mar­ché en Europe et les trans­ferts de tech­no­lo­gie impo­sés par les clients étran­gers, le groupe a enga­gé dès 2008 une stra­té­gie de déve­lop­pe­ment dans l’énergie avec l’ambition d’en faire une nou­velle ligne d’activité indus­trielle à côté du naval.

La maî­trise des sys­tèmes com­plexes, des moyens indus­triels excep­tion­nels et la connais­sance des contraintes du milieu mari­time ont per­mis au groupe de réa­li­ser avec suc­cès les grands pro­grammes navals (SNLE, SNA, porte-avions), et en par­ti­cu­lier leur pro­pul­sion nucléaire en étroite liai­son avec Are­va- TA.

C’est avec ces atouts que le groupe s’est enga­gé dans le sec­teur du « nucléaire civil » et celui des « éner­gies marines renou­ve­lables » (EMR). Cette stra­té­gie de déve­lop­pe­ment est aujourd’hui confor­tée par des pre­miers contrats avec EDF, Are­va ou le CEA. Au-delà, DCNS pense pou­voir appor­ter à l’équipe France du nucléaire une contri­bu­tion déter­mi­nante pour conqué­rir de nou­veaux marchés.

SMR côtiers et immergés

Les méthodes de construc­tion navale per­met­tront aux petits réac­teurs de deve­nir compétitifs

Tout d’abord avec des SMR côtiers trans­por­tables : cela consiste à pous­ser la logique de la pré­fa­bri­ca­tion de la cen­trale en chan­tier naval à son maxi­mum, et à l’acheminer vers un site ter­restre côtier.

Ensuite avec des SMR immer­gés : c’est l’objet du pro­jet Flex­blue, qui pré­sente à la fois une com­pé­ti­ti­vi­té et une sûre­té nucléaire inéga­lées. Ces méthodes peuvent aus­si être par­tiel­le­ment appli­quées à des réac­teurs ter­restres de grande puissance.

Technologies éprouvées

Phase de développement
Le pro­jet est main­te­nant suf­fi­sam­ment avan­cé tant sur le plan indus­triel que com­mer­cial pour per­mettre de pas­ser à une phase de déve­lop­pe­ment détaillé et au début de la réa­li­sa­tion d’un pre­mier module bien avant 2020. C’est dans cet objec­tif que nous avons enga­gé la recherche de par­te­naires industriels.

Uti­li­sant exclu­si­ve­ment des tech­no­lo­gies éprou­vées dans l’industrie nucléaire, navale ou off­shore, entiè­re­ment fabri­qué en chan­tier naval DCNS, selon des stan­dards et avec des moyens éprou­vés, fia­bi­li­sant son devis, Flex­blue com­bine une réduc­tion des risques de pro­jet, une com­pé­ti­ti­vi­té inédite pour un SMR avec le nou­veau para­digme de sûre­té que pro­cure l’immersion.

Cette der­nière consti­tue en effet, en même temps qu’une source froide infi­nie, une pro­tec­tion natu­relle du module contre les agres­sions de toutes ori­gines, ren­dant les acci­dents graves vir­tuel­le­ment impossibles.

Faible impact sur l’environnement

Des acci­dents graves vir­tuel­le­ment impossibles

Les modules, dont le nombre est adap­té à la puis­sance ins­tal­lée sou­hai­tée, sont ancrés entre 50 et 100 mètres de fond. Les amé­na­ge­ments de site et de génie civil sont très réduits, l’installation n’a pas d’impact sur le pay­sage, et, en fin de vie, le site est ren­du très sim­ple­ment à l’état ex ante : les modules sont retour­nés dans leur chan­tier de construc­tion pour y être déman­te­lés, comme c’est l’usage pour nos sous-marins.

Des enjeux industriels considérables

Les enjeux indus­triels des SMR, sur­tout ceux construits en chan­tier naval, sont consi­dé­rables avec la créa­tion poten­tielle sur le sol natio­nal de plu­sieurs dizaines de mil­liers d’emplois à forte valeur ajou­tée, et le main­tien des com­pé­tences et du tis­su indus­triel natio­naux du nucléaire.

Commentaire

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Guy IMBERT (DR CNRS honoraire)répondre
31 mars 2020 à 19 h 46 min

Bon­jour mon­sieur : – 50 à ‑100 m étant encore proche de la « pro­fon­deur de com­pen­sa­tion » et d’un inté­rêt halieu­tique non négli­geable, car dans la tranche de pro­fon­deurs des migra­tions diurnes du zoo­plank­ton, le bio­lo­giste marin que je suis aurait ten­dance à recom­man­der 150 – 200 m. Par ailleurs, le bilan éner­gé­tique d’un sous-marin civil sto­cké à l’é­tat neuf et « air-indé­pen­dant-pro­pul­sion (Stir­ling 75 kW) immer­sion 600 m (de 30 m de long, 400 t, 10–15 hommes d’é­qui­page), s’é­qui­libre entre 1 et 1,5 MW ther­mique. Quel réac­teur nucléaire (éven­tuel­le­ment logeable en cais­son 60 bars, 30 m³ ) envi­sa­ge­riez-vous pour un tel engin qui ne deman­de­rait qu’à ser­vir de pla­te­forme d’es­sais ? Vôtre,

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